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Comment les réfugiés syriens vivent l'arrivée des Ukrainiens en Suisse

Des réfugiés syriens et afghans devant le centre fédéral pour requérants d’asile à Zurich. L'un d'eux s'exprime: «Ce serait bien si nous étions aussi chaleureusement accueillis en Suisse».
Des réfugiés syriens et afghans devant le centre fédéral pour requérants d’asile à Zurich. L'un d'eux s'exprime: «Ce serait bien si nous étions aussi chaleureusement accueillis en Suisse».

Comment les réfugiés syriens vivent l'arrivée des Ukrainiens en Suisse

La Suisse ouvre ses portes aux réfugiés ukrainiens. Les migrants de Syrie et d'Afghanistan ont le sentiment d'être traités de manière inégale. Témoignages.
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21.03.2022, 11:3421.03.2022, 11:47
Sarah Serafini
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Ces jours, de nombreux réfugiés ukrainiens entrent en Suisse. Ils étaient déjà 9000 vendredi. La plupart d'entre eux arrivent en train à la gare centrale de Zurich et sont ensuite envoyés au centre fédéral pour requérants d'asile afin d'y être enregistrés. De longues files d'attente s'y forment. Les Ukrainiennes – la plupart sont des femmes avec leurs enfants – sont assises sur leurs valises, regardent leurs téléphones et attendent patiemment leur tour.

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Tête baissée, deux jeunes hommes passent devant la foule. Il s'agit de Hassan et Nidal, tous deux âgés de 17 ans et originaires de la ville kurde de Derik, située proche de la frontière avec la Syrie. Hassan est à Zurich depuis quatre mois, Nidal depuis deux. Ils ont voyagé pendant près de six mois et sont arrivés en Suisse par la route des Balkans.

«Ils sont comme nous»

Leurs voix se perdent dans le bruit de la rue. Ils regardent timidement leurs chaussures. Leur demande d'asile a été rejetée, racontent-ils. Ils ont toutefois obtenu une admission provisoire, le fameux permis F. Comme ils n'ont pas encore 18 ans, ils attendent d'être hébergés dans un logement spécial pour mineurs. Ils sont heureux d'être en Suisse.

Ils ont évidemment entendu ce qui se passe actuellement en Ukraine. Mais ils ne suivent pas l'actualité de près. Hassan montre du doigt les réfugiés ukrainiens et dit: «Nous savons qu'ils sont comme nous. Ils ont aussi fui une guerre.»

La grande majorité des réfugiés ukrainiens s'enregistrent au centre fédéral d'asile avant d'être transférés vers un autre lieu d'hébergement. Certains d'entre eux sont même hébergés chez des particuliers. Hassan et Nidal ont observé que les Ukrainiens arrivent et repartent après quelques heures seulement. Hassan dit envieusement: «Bien sûr, ce serait plus agréable de vivre chez quelqu'un. Mais bon, ici ça va aussi.» Ils dorment dans une chambre à huit lits.

Les deux jeunes Syriens se contentent d'une certaine simplicité, ne veulent pas se plaindre et évitent de se faire remarquer. Ils connaissent les préjugés à l'égard des «jeunes hommes d'apparence arabe». Ils craignent qu'un mot de travers ou un geste de rébellion ne mette en péril leur statut de demandeurs d'asile. Leur souhait serait de pouvoir étudier en Suisse.

Traitement inégal

Deux jeunes Afghans passent près de Nidal et Hassan. Ils se saluent à distance avant d’échanger quelques mots. Nidal a appris un peu de dari, une des langues nationales afghanes, lors de sa fuite vers la Suisse. Un autre homme, qui a observé la scène, se joint à eux. Il est de Kiev, dit-il en anglais. C'est là qu'il a fait ses études. Mais à l'origine, il vient du Pakistan et parle également le dari. Ils finissent par échanger tous ensemble.

Avec l'aide de l'étudiant, les deux Afghans se présentent. Ils s'appellent Diar et Jonis, ont tous deux 16 ans et sont arrivés en Suisse il y a quelques jours seulement. Comme les Syriens Hassan et Nidal, ils ont passé des mois sur la route. Un des deux jeunes, Jonis, dit qu'il a été maltraité pendant sa fuite. Il montre sur son téléphone portable des photos de son visage bleui et de ses pieds battus jusqu'au sang.

Plus le groupe s'agrandit, plus Jonis affirme qu'il a de la peine avec la situation actuelle. Par exemple, son ami Diar dit que son entretien pour la demande d'asile a été mis en attente, «à cause des nombreuses personnes ukrainiennes qui arrivent actuellement». Jonis raconte qu'il faut désormais faire la queue à chaque fois que l'on veut entrer dans le centre pour requérants d'asile. «Hier, il m'a fallu 40 minutes avant de pouvoir entrer. Et je n'avais qu'un pull. J'avais vraiment très froid».

Diar rassure son collègue Jonis, qui commence à s’énerver. Puis, il ajoute: «Ce qui se passe en Ukraine est terrible. Et je suis infiniment désolé pour les gens là-bas. Mais ce qui se passe en Afghanistan est aussi terrible. Je ne comprends pas pourquoi on nous traite si différemment.» Que les Suisses aident les Ukrainiens est une bonne chose. «Mais j'aimerais qu'on nous accueille aussi à bras ouverts

Moins d’argent avec le permis F

Diar trouve injuste que les réfugiés ukrainiens reçoivent le statut de protection S, alors qu’eux obtiennent le permis F.

«Ils ont plus de droits parce qu'ils sont européens»
Diar, réfugié afghan

Les deux permis diffèrent sur plusieurs points. Les personnes admises à titre provisoire titulaires d'un permis F ne peuvent pas faire venir leur famille, n'ont pas la liberté de voyager et reçoivent l'aide sociale de l'asile, dont le montant est inférieur à celui de l'aide sociale obtenue avec le permis S.

L'étudiant pakistanais de Kiev traduit les échanges, puis s'arrête soudainement. Il demande: «Et moi, qu'est-ce que je vais recevoir? Un permis S ou un F? J'espère que ce n'est pas un F!» On le rassure: «Si tu as un permis de séjour pour l'Ukraine, tu auras un S.» L'étudiant rit de soulagement: «J’en ai un.» Les Afghans et les Syriens qui l'entourent restent dans le silence. Ils ne peuvent se réjouir qu'à moitié.

Traduit de l'allemand par Charlotte Donzallaz

Les réfugiés ukrainiens
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Les réfugiés ukrainiens
Dans un centre d'accueil improvisé en Moldavie.
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140 réfugiés ukrainiens ont été évacués vers la Suisse
Video: watson
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