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Mariage pour tous: le combat continue pour les LGBT

La terrasse du café Le Phare, Genève. 26 septembre 2021.
La terrasse du café Le Phare, Genève. 26 septembre 2021.image: watson

Mariage pour tous, la suite: la GPA et la transidentité

Le mariage pour tous est passé haut la main. Il reste maintenant à en assurer le service après-vente. Côté LGBT, d'autres revendications sont d'ores et déjà brandies, avec en point de mire la très délicate GPA.
27.09.2021, 07:3827.09.2021, 10:47
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Le plus émouvant fut sans doute le complet silence qui accueillit les premières estimations données à midi par la télé. Non qu’il y eût le moindre doute, mais à ce moment-là, chacun se remémorait sûrement un peu de sa vie de gay, de lesbienne, de trans, de quelque chose d’autre que la norme. C’est à 13h15 qu’on entendit, enfin, un bruit de joie, celui d’un bouchon de champagne. Vive les mariés! A peu près ça, oui. Dorina Xhixho, l’égérie du mariage pour tous côté PSG (Parti socialiste genevois), venait de briser la drôle d’atmosphère. «On a du mal à marquer notre joie. L’investissement émotionnel a été si fort», confiait la jeune femme d’origine albanaise.

En ce dimanche de votations, la terrasse du Phare, un «bar gay genevois» tenu par Pierre depuis les débuts, dans les années 90, accueillait la communauté LGBTQI (avec le temps, l'acronyme s’est allongé).

«J’avais un ami. On était très proche. Je m’en occupais beaucoup. Il est mort il y a un an au bout de trois maladies successives. On n’avait jamais vraiment abordé l’après. Est-ce qu’on aurait pu vouloir se marier, bien qu’on ne fût pas amant? Oui, sûrement. Eh bien, voilà, le mariage, ça sert à ça aussi, à protéger l’autre, celui qui reste. A le mettre, s’il y a lieu, à l’abri du besoin.»
Christophe (prénom modifié), la cinquantaine

Le Phare. Un nom de circonstance. Attention aux récifs! En voici un, nommé UDC: «Il va falloir être très attentif aux nouvelles revendications qui pourraient apparaître au sein de certains milieux, que ce soit au niveau des mères porteuses ou des quotas de genre sur les listes électorales. Il ne faut pas aller plus loin dans l’immédiat», a aussitôt averti le vice-président de l’UDC Vaud, Yohan Ziehli.

Transidentité: doléances fournies

Il ne va pas être déçu, le pépère. Ce sont peut-être les plus résolus, les radicaux de la cause LGBTQI, mais ils comptent bien continuer d’aller de l’avant sur les revendications. Les quotas de genre sur les listes électorales? On verra. Dimanche, au Phare, la transidentité présentait un cahiers de doléances fourni.

Mo, Lucie, Lynn, de gauche à droite. Genève, 26 septembre 2021.
Mo, Lucie, Lynn, de gauche à droite. Genève, 26 septembre 2021.image: watson

Mo, 28 ans, né «femme», son genre assigné à la naissance, dit-il, a transitionné.

«Plusieurs choses: on voudrait que la norme pénale antiraciste soit étendue à la transphobie, comme ce fut le cas pour l’homophobie le 9 février dernier. Ensuite, nous, les transgenres, on aimerait pouvoir entamer une transition hormonale et chirurgicale sans autorisation psychiatrique, ce qui aujourd’hui n’est pas possible. Il faudrait aussi faire sauter l’âge légal de 16 ans, à partir duquel on peut entamer une transition sans l’accord des parents. Je considère qu’avant dix ans, on a déjà des capacités de discernement sur ce qu’on est et ce qu’on n’est pas. On pourrait dans les jeunes années commencer par prendre des bloqueurs hormonaux, de façon à éviter une puberté contrainte.»
Mo, 28 ans, personne transgenre

Mo, tous ceux et toutes celles qui pensent comme lui, se heurtent à l’AMQG, l’Association pour une approche mesurée des questionnements de genre chez les jeunes. Des empêcheurs de transitionner à la demande. L’AMQJ, soutenue par l’un des cofondateurs de Pink Cross, l’une des premières antennes gay de Suisse romande, milite contre «la médicalisation outrancière des troubles de l’identité de genre». La modération, un truc de boomers.

«Aujourd’hui, transtionner, c’est quand même plus facile qu’avant. Je l’aurais bien fait il y a vingt ans, mais je suis sûre que j’aurais perdu mon travail et que j’en serais venue à me prostituer»
Lynn, née homme

Lynn a effectué sa transition entre 2014 et 2017. Elle était alors cadre bancaire. «J’en ai parlé à la direction de la banque, mais j’ai bien vu qu’ils n’étaient pas très chauds. Je n'avais plus de travail à faire. Avec la banque, on s’est entendu, j’ai fini par partir. Le plus embêtant, c’est que c’était à trois ans de la retraite.» « Ah bon, tu as cet âge-là? On ne dirait pas», font ses amis Mo et Lucie, qui la croyaient plus jeune. Lynn semble apprécier le compliment.

Et la GPA?

Mo partage sa vie avec Lucie, 23 ans. Le mariage? Pourquoi pas. Un enfant? Oui, mais Mo étant «stérile», Lucie devra procéder à une PMA, une procréation médicalement assistée, autorisée par la nouvelle loi votée dimanche. Reste l’adoption, ou encore la GPA, la gestation pour autrui, la solution de la mère porteuse.

Dorina Xhixho (PS), au centre, entourée de Sofia Hallstörm (Les Vert.e.s), à gauche, et de Roger Gaberell (PDC).
Dorina Xhixho (PS), au centre, entourée de Sofia Hallstörm (Les Vert.e.s), à gauche, et de Roger Gaberell (PDC). image: watson

Sauf que la GPA est interdite par la Constitution suisse, rappelle Dorina Xhixho, la jeune femme engagée au PS genevois. «C’est une question extrêmement sensible», dit-elle d'une façon un peu convenue. «Je trouve qu’on ne devrait pas faire de la GPA une problématique uniquement LBGT. Les hétéros aussi peuvent être concernés», affirme-t-elle.

Surtout ne pas donner l’impression de ne pas forcer l'avantage après la large victoire de dimanche. Pour beaucoup, la GPA est une ligne rouge. Interdiction de s’en approcher.

«C’est de la société civile que viendront les choses»

Sur les revendications à venir (doit-on inclure la GPA?), Dorina XhiXho parle en politique. «Il faut voir, c’est une question de timing. C’est de la société civile que viendront les choses. Mais sur le substantiel, sur les droits qu’il reste à conquérir par la communauté LGBTQI, à titre personnel, je suis à fond pour.»

«Attention aux répercussions sur les lieux de travail»

Un peu plus et l'on passait à côté d’un point essentiel. L’acceptation de l’homosexualité. En termes inversés: la lutte contre l’homophobie. Cette question préoccupe Dorina Xhixho. Il s’agit désormais d’assurer le service après-vente du mariage pour tous:

«Cela va entraîner plus de visibilité pour les couples de même sexe. Ce qui est en soi une bonne chose et ne peut que contribuer à la banalisation de l’homosexualité. Mais cela peut aussi créer des situations d’homophobie. Je pense beaucoup aux répercussions sur les lieux de travail. Il faudra se montrer vigilant.»
Dorina Xhixho, membre du PS genevois

Approche «intersectionnelle»

La question culturelle n’est pas moins sensible. Sans chercher à stigmatiser quiconque, les militants LGBTQI se rendent compte de la difficulté à aborder la question homosexuelle dans des milieux conservateurs, en particulier religieux. Sensibiliser les ministres du culte, notamment les imams, afin qu’ils véhiculent un message de tolérance auprès des fidèles sur les thèmes LGBTQI? Dorina Xhixho ne souhaite pas empoigner la question ainsi. Elle plaide pour une approche «intersectionnelle», dans laquelle toutes les discriminations touchant les minorités seraient abordées de front.

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