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Marine Le Pen, «candidate normale» qui monte sur air de guerre civile

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Marine Le Pen, Paris, 22 mars 2021.image: EPA
Analyse

Marine Le Pen, «candidate normale» qui monte sur air de guerre civile

Dans une France où des militaires se posent en recours face aux risques de «guerre civile», Marine Le Pen, candidate du Rassemblement national à la présidentielle de 2022, veut apparaître comme un choix électoral évident. Sa cote, elle, n'en finit pas de grimper.
12.05.2021, 19:2113.05.2021, 15:47
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Marine Le Pen a des super-pouvoirs. Elle aimante et irradie. Elle est le Magnéto de la politique française. Pas le plus beau rôle des X-Men, mais peut-être bien le plus puissant. Si, jusqu’à présent, le «gentil» l'a toujours emporté à la fin, à l’image d’Emmanuel Macron à la présidentielle de 2017, elle, la «méchante», mène la danse. A un an de l’échéance suprême en France, elle imprime le tempo, le tempo bat pour elle. C’est kif-kif. Comme souvent avec son parti, le Rassemblement national (RN, autrefois Front national), l’actualité, rarement joyeuse, joue en sa faveur. Pas besoin de se baisser pour ramasser les fleurs, le bouquet vient de lui-même à la main.

De quoi le bouquet est-il fait ces temps-ci? Essentiellement de drames: l’assassinat terroriste d’une fonctionnaire de police en avril à Rambouillet, le tir d’un voyou qui a coûté la vie à un policier le 5 mai à Avignon, des décisions de justice jugées trop clémentes par une partie des Français, là pour le meurtre et la défenestration d'une femme juive, ailleurs pour des attaques de policiers dans des cités.

Dans le dernier «baromètre» du Figaro Magazine, Marine Le Pen gagne 8 points, le plus gros gain de toutes les personnalités testées. Avec 34 avis favorables, elle s’installe au deuxième rang, derrière les 46 de l’ancien premier ministre Edouard Philippe, le «gendre idéal de la macronie», qui passe pour l’homme du recours si le chef de l'Etat Emmanuel Macron devait s’effondrer dans l’intervalle qui le sépare de l’élection présidentielle de 2022.

Eponge du mécontentement populaire

Davantage que tous les autres opposants au président de la République, Marine Le Pen, dont la prestation télévisuelle, calamiteuse, dans l'entre-deux tours de la présidentielle de 2017, a comme été effacée des mémoires, capte le mécontentement populaire: en partie sur les questions liées au Covid, principalement, pense-t-on, à la suite de faits tragiques, qu'une frange grandissante de citoyens attribue à un Etat «faible avec les forts, fort avec les faibles».

Ce sentiment qu’ont certains Français d’être écrasés par des petites frappes ou des terroristes, que le RN a tôt fait d’associer à l’immigration, quand ce n’est pas à l’islam, fait en bonne part la cote de Marine Le Pen. Le RN et sa présidente voient les choses avec des lunettes grossissantes, là où d’autres, principalement à gauche, les abordent avec des lunettes rapetissantes. Exagération dans un cas, minimisation dans l'autre. Prime à l'effet de loupe.

Un catastrophisme s’installe dans le paysage hexagonal sur fond d’antagonismes paraissant irréconciliables, ce dont l’émission «Balance ton post» de Cyril Hanouna offre quotidiennement un aperçu. Deux tribunes rédigées par des militaires et publiées par le magazine de la droite identitaire Valeurs actuelles, la dernière en date le 9 mai, posent l’armée en recours face au «délitement» du pays et au risque de «guerre civile».

Cosy et passe-partout

Loin de condamner, comme le gouvernement et la plupart des partis, des initiatives rompant avec le primat du civil sur le militaire, Marine Le Pen dit y «souscrire», tout en prônant la voie pacifique pour la résolution des conflits qui minent la France. Le message est clair: le recours, c’est elle. Le 29 avril, soit après la parution de la première tribune signée par des militaires, 58% des Français disaient approuver leur démarche, du moins leur analyse de la situation.

Côté vie quotidienne, Marine Le Pen est en quête de normalité. Le magazine Le Point l’avait montrée entourée de ses chats en novembre 2020. Son look serait à la fois plus cosy et plus passe-partout. Elle se veut l’incarnation du bon sens en toute chose.

Côté vie politique, s’il est une composante que ce Magneto au féminin aspire et assèche, c’est bien la gauche. Laquelle est toujours plus réduite à sa portion sociétale (écologie et antiracisme), quand la candidate d’extrême droite n'en finit pas de grignoter des parts dans l'électorat des ouvriers et des employés sur des questions à la fois matérielles et existentielles.

Incarnation d'une
identité majoritaire

Si les sondages la donnent battue au second tour face à Emmanuel Macron (de bien moins qu’en 2017) et des figures de la droite classique comme Xavier Bertrand et Valérie Pécresse, ils l’annoncent gagnante face à tous les candidats de gauche, seule la maire de Paris Anne Hidalgo faisant, et encore, jeu égal avec elle.

En 2017, Marine Le Pen se donnait des airs du Mitterrand de 1981 (ce président socialiste dont la France ces jours-ci se souvient de l'accession au pouvoir il y a 40 ans), l’Europe en moins et le bouc-émissaire en plus, l’immigration et son cortège de sous-entendus. En 2022, à quelques retouches près, sur l'Europe notamment, il devrait en être de même. Face à une gauche adossée à des identités minoritaires, récupérant une laïcité qui longtemps fit consensus en France en tant que mise à distance du religieux, elle se veut porteuse d'une identité majoritaire. Comme Donald Trump avant sa victoire en 2016.

La question sécuritaire paraissant agir en sa faveur, une détérioration discontinue de la situation sur ce point lui apporterait peut-être les voix qui lui manquent encore pour être élue présidente de la République. Telle la «candidate normale» (le mantra de François Hollande candidat et vainqueur en 2012) qu’elle s’imagine sans doute pouvoir incarner au regard d’une période troublée. Son intérêt n'étant pas de l'apaiser avant l'élection.

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source: ap / khalil hamra
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