Quelque chose de pas normal s’est passé tôt ce jeudi matin à Montreux. Quelque chose d’affreux a réveillé la perle de la riviera vaudoise, depuis plusieurs jours éblouie de soleil. Cinq corps ont été retrouvés au bas du 35 de l’Avenue du Casino, côté lac, au pied de deux palmiers. Ils sont tombés ou ont été précipités d’un appartement d’angle, avec balcon, situé au septième et dernier étage d'un immeuble d'habitations. Le drame se serait déroulé peu avant 7 heures.
Sophie* se rendait à son travail, dans une confiserie, où nous la retrouvons aux alentours de 9h30. «Il était environ 7 heures quand je suis passée devant l'immeuble en question. Un monsieur portait secours à une femme couchée sur le sol. C’est tout ce que j’ai vu. Je n’ai pas cherché à en voir plus», restitue machinalement la jeune femme, comme désireuse d’oublier au plus vite cette vision choquante. Elle peut, si elle le souhaite, contacter la cellule psychologique mise en place sans tarder par les autorités.
Que s’est-il passé? Qui sont les cinq individus retrouvés gisant par terre? Diffusé à 13h45, un communiqué de presse de la police cantonale vaudoise a fourni des éléments d’information permettant de comprendre partiellement les circonstances de cette tragédie:
Les cinq victimes sont de nationalité française et toutes issues de la même famille: «Le père de 40 ans, son épouse de 41 ans, la sœur jumelle de celle-ci et la fille du couple, âgée de 8 ans, sont les quatre personnes décédées. Le fils, âgé de 15 ans, est hospitalisé dans un état grave.»
Une instruction a été ouverte. Sur place, on aperçoit des membres de la police scientifique en combinaison blanche, de même qu'un chien policier et son maître.
Dès 9 heures ce jeudi matin, à la sortie de la gare de Montreux, l’employée d’une boulangerie en tablier de travail, en pause-café-cigarette sur le trottoir faisant terrasse, évoque, la première, la piste de la secte pour expliquer l’horreur. «Je n’en sais rien, c’est ce que j’ai entendu dire», fait-elle.
En tout état de cause, il s’agit d’un drame familial. Une voix, comme l’affirme la police cantonale vaudoise, a répondu de derrière la porte aux deux gendarmes venus interpeller le père. Tout ou partie des quatre autres personnes qui ne se sont pas fait entendre à ce moment-là n’étaient-elles déjà plus dans l’appartement? Ont-elles d'elles-mêmes sauté dans le vide? Y ont-elles été jetées, et si oui, dans quel état de conscience? Des questions auxquelles l’enquête va devoir répondre.
Il y avait trois locataires au septième étage de cet immeuble. L’une des adresses est un cabinet de beauté. Une deuxième est celle d’un monsieur dont la boîte aux lettres, devant l’entrée du 35, a été placée tout en bas des autres, parce que, petit, il ne parvenait pas à atteindre la rangée du haut. Où l’on trouve la troisième adresse. Celle de la famille qui à présent n’est plus là. L’épouse exerçait, semble-t-il, une profession médicale.
«Ils habitaient là depuis deux ou trois ans», croit savoir Michelle, une habitante de l’immeuble, résidente du deuxième étage. «Je ne les connaissais absolument pas. Vous savez, ici, tout est parfaitement tranquille.» Michelle et son mari, tous deux à la retraite, ont emménagé au 35 en 1969, au cœur de ce Montreux battant au son du be-bop. Elle a vu Stevie Wonder en concert et d’autres célébrités dont elle ne se rappelle plus le nom sur l’instant.
Ce jeudi, la perle de la riviera vaudoise, avec son micro-climat faisant fleurir les magnolias plus tôt que partout ailleurs, est sous le choc d’un drame auquel on aimerait qu’il n’y ait pas d’explications. Le père de 40 ans, décédé, portait paraît-il des shorts été comme hiver.
*Prénoms d'emprunt.