➡️ Tout d'abord les chiffres: les arbitres sifflaient en moyenne 37,9 fautes par match lors de l'Euro 2004 au Portugal. Ils n'en ont sanctionné que 22 par rencontre cette année.
➡️ Ensuite les explications de Christophe Girard, chef de la commission des arbitres au sein de l'ASF.
M. Girard, les footballeurs sont-ils devenus plus sages?
Non, absolument pas (il rit).
À quoi attribuez-vous cette réduction importante du nombre de fautes sifflées?
Je ne sais pas s'il y a véritablement moins de fautes. Ce qui est sûr en revanche, c'est qu'elles sont moins sifflées. Les grandes instances veulent favoriser un maximum la fluidité du jeu et encourager l'attaque. En cela, la règle de l'avantage permet à la fois de ne pas interrompre une action et de ne pas pénaliser une équipe qui joue vers l'avant. Et puis, les joueurs aussi ont changé.
En quoi?
Ils ne jouent plus de la même manière. Ils sont devenus moins «bourrins». Un match France-Allemagne comme en 82, on ne le reverra jamais. Il y a une meilleure homogénéité technique. Il y a plus de vingt ans, les disparités étaient grandes.
Les équipes nationales elles-mêmes ont évolué dans leur manière de jouer.
Exactement. L'Allemagne est passée d'un jeu très physique, très dur sur l'homme à une attention portée sur la tactique. Dès lors que vous avez des footballeurs qui maîtrisent leur technique, dans des sélections portées sur la science du jeu, vous avez automatiquement moins de fautes.
On est passé d'un marquage individuel à un marquage en zone. Cela aussi a un impact sur le nombre de fautes, non?
C'est tout à fait vrai. C'est encore un changement dans la manière de jouer qui réduit le nombre de contacts, et dès lors le nombre de fautes.
Si les joueurs et les équipes ont changé, on imagine que les arbitres ont eux aussi évolué.
Oui. Quand on dit qu'un arbitre siffle «petit», ça signifie qu'il siffle toutes les fautes; quand il siffle «haut», c'est qu'il laisse beaucoup le jeu se dérouler, et qu'il tolère les éventuels contacts qu'il peut y avoir. Or, on a demandé aux arbitres de siffler «haut», c'est-à-dire de toujours sanctionner ce qui fait mal, mais de ne plus siffler ce qui est évitable. Et de laisser l'avantage quand c'est possible.
C'est la fin des fameuses «fautes tactiques» à 40m du but!
Il y a quelques années encore, elles valaient un avertissement. On estimait que si un joueur se faisait retenir par le maillot ou par le bras, même s'il était encore loin du but adverse et qu'il devait encore dribbler cinq adversaires, cela méritait un jaune. Aujourd'hui, les arbitres prennent en compte la notion d'action prometteuse avant de sanctionner.
C'est judicieux, car un carton jaune ne ralentit pas seulement le jeu; il l'arrête le temps que l'arbitre note le nom du fautif sur son carton. On a toujours dit que moins on voyait l'arbitre et mieux c'était. Eh bien, c'est encore plus vrai maintenant. Le public tolère moins ses interventions. Mais il y en a parfois qui sont inévitables pour protéger l'intégrité des joueurs.
Durant cet Euro, il y a eu 22 fautes par match en moyenne. Peut-on faire «mieux» l'an prochain au Qatar?
Quel serait le but, finalement, puisque la qualité d'un match ne dépend pas du nombre de fautes sifflées? Bien sûr, dans un monde idéal, il n'y aurait plus aucune faute, mais 22 c'est peu.