Elles sont très rares, alors forcément, quand elles débarquent, elles font sensation. Le championnat suisse n'est pas le plus convoité par les stars mondiales du ballon rond. Pourtant, certaines d'entre elles, au crépuscule de leur carrière, ont porté le maillot d'un club helvétique ces dix dernières années.
Il y a eu les champions du monde italiens Gennaro Gattuso (FC Sion) et Gianluca Zambrotta (FC Chiasso), l'ex-défenseur iconique de l'Inter Milan et du Real Madrid Walter Samuel (FC Bâle) ou encore Djibril Cissé (Yverdon-Sport). Dernier gros coup en date: la signature en début de semaine d'Holger Badstuber au FC Lucerne.
Die erste Trainingseinheit von @Badstuber ist absolviert ✔️. Auch ein sechsmaliger Deutscher Meister muss sich dem Einstandsritual stellen 🤣.#FCL #nomeLozärn #seit1901fürimmer pic.twitter.com/QeZLx3nRC5
— FC Luzern (@FCL_1901) July 13, 2021
Le défenseur central allemand (32 ans) a porté le maillot du Bayern Munich entre 2009 et 2017 et celui de la Mannschaft (2010-2015), avec laquelle il compte 31 sélections – dont une demi-finale de l'Euro 2012. Il a notamment accroché à son riche palmarès six sacres en Bundesliga et une Ligue des champions (2013).
Mais ces quatre dernières saisons, Badstuber a peu joué sous le maillot de Stuttgart. Il a même disputé le dernier exercice avec l'équipe réserve. Pourtant, Lucerne compte sur lui:
L'état d'esprit de champion, c'est justement ce qui avait frappé Marco Degennaro en voyant Gennaro Gattuso la première fois à l'entraînement en 2012 avec le FC Sion. «C’était impressionnant, et on avait l’impression d’avoir acheté 25 nouveaux joueurs!», rigole l'actuel directeur général d'Yverdon-Sport, qui occupait le même poste dans le club valaisan. «Avec une telle vedette dans l'effectif, tous les autres joueurs s'investissent davantage. Il y a aussi un impact positif chez les jeunes du club, qui ont l'ambition de côtoyer la star sur le terrain.»
Marco Degennaro et Christian Constantin ont vu en Gattuso un leader capable d'insuffler une nouvelle énergie à Tourbillon. Ils attendaient aussi de l'ex-milieu de l'AC Milan des performances sur le terrain. «Le joueur doit encore avoir quelque chose à amener sur le plan du foot, c'est la base, tranche Marco Degennaro. A Sion, on se disait toujours: "Il faut jouer comme Gattuso!" Alors un jour, avec le président, on a pensé: «On dit toujours ça, alors pourquoi pas le faire vraiment? (rires)»
A Yverdon, Mario Di Pietrantonio avait aussi réussi un gros coup, en été 2017. Le président du club vaudois était parvenu à faire signer Djibril Cissé (ex-Liverpool et Marseille, entre autres). Avec là-encore l'aspect sportif comme argument numéro un, dans l'optique d'une promotion en Challenge League. «Nous l'avions choisi pour son expérience et son esprit de gagneur, rembobine le dirigeant. Il a été très pro, et il a marqué 23 goals en une saison, du jamais vu en Promotion League!»
Derrière ces recrutements, les clubs ont conscience que la venue de telles stars va booster leurs recettes et leur image de marque. «L'arrivée de Cissé a fait parler d'Yverdon dans le monde entier, se réjouit Mario Di Pietrantonio. On a vendu des maillots du club floqués Cissé jusqu’en Afrique! On avait toutefois espéré plus de ventes.» Le président nord vaudois estime la hausse de spectateurs au stade Municipal due à la venue de l'attaquant français entre 20 et 30%.
A Sion, celle de Gattuso a aussi garni les tribunes. «La vente d'abonnements a augmenté entre 15 à 20%, se rappelle Marco Degennaro. Ça reste la meilleure saison du club dans ce domaine depuis plusieurs années.»
Le club valaisan a vendu 4000 chandails avec le nom du champion du monde transalpin sur le dos. C'est pas mal, mais nettement moins que ce qu'aurait pu rapporter l'engagement d'une autre star de la Botte. «Aussi en 2012, on espérait faire signer Alessandro Del Pierro, rappelle l'ex-directeur général sédunois. Quand on est allé discuter avec lui, il était question de distribuer 100'000 maillots du FC Sion floqués avec son nom. Avec environ 50 francs de marge, imaginez ce que ça représente! Avec de tels joueurs, on doit penser au marché mondial, notamment asiatique. On entre dans une autre dimension.»
A l'heure des réseaux sociaux et de la communication numérique, faire venir une star dans son équipe offre un rayonnement planétaire, avec les avantages économiques qui vont avec. Et parfois des petites difficultés: «Quand Fabio Grosso, lui aussi champion du monde avec l'Italie en 2006, était l'entraîneur du FC Sion, on recevait trois à quatre lettres par jour, avec des demandes de photos, de vidéos, d'autographes, etc. C'était très difficile à gérer pour un petit club», explique Marco Degennaro.
Entre ses deux mandats à Tourbillon, le nouveau directeur général d'Yverdon-Sport a travaillé pour le FC Chiasso. En 2013, il avait aussi réussi à enrôler un campiono del mondo au Tessin: le latéral Gianluca Zambrotta. Sa présentation s'était déroulée dans les locaux de Chicco d'oro, l'un des sponsors du club rouge et bleu. Une stratégie gagnante:
En plus d'être d'excellents footballeurs, les stars qui foulent les pelouses helvétiques deviennent de véritables ambassadeurs de leur club. Et même lorsqu'ils ont raccroché les crampons ou quitté notre pays, leur influence reste. «Grâce au passage de Djibril Cissé à Yverdon, notre club jouit d'une grande crédibilité auprès des joueurs étrangers, notamment français. Elle peut donner un coup de pouce pour des transferts intéressants», s'enthousiasme Mario Di Pietrantonio.
Alors pourrait-on voir un jour Thomas Müller ou Toni Kroos débarquer au FC Lucerne? En tout cas, les premiers matchs d'Holger Badstuber en Suisse centrale seront analysés attentivement.