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JO 2022: le ski alpin à Pékin est une absurdité

Klaus Zaugg Peking Yanqing
Le spectaculaire pays des merveilles hivernales pékinois. Ou pas.image: sportfanatics.ch

Des paysages sans neige ni charme: le ski à Pékin est une absurdité

Plusieurs villes sans neige et sans montagnes ont organisé des JO d'hiver. Alors pourquoi pas Pékin? Non. C'est seulement sur place que l'on découvre l'aberration d'y organiser un tel événement. Reportage.
10.02.2022, 12:1510.02.2022, 15:01
klaus zaugg, notre envoyé spécial à pékin
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Les sports d'hiver sont arrivés il y a longtemps dans les mégapoles: le hockey sur glace se joue depuis bientôt cent ans au Madison Square Garden de New York, à Zurich ou à Berlin. Et dans l'histoire olympique, les sports de glace ont souvent été organisés dans les grandes villes, comme Salt Lake City ou Vancouver, entre autres. Oui, les Jeux d'hiver sont devenus urbains. Alors où est le problème avec Pékin?

En fait, la magie des Jeux d'hiver vient des sports de neige. Son point culminant: la descente de ski alpin. La Formule 1 de la neige glacée. Décris-moi le lieu où elle se dispute, et je te dirai si les Jeux ont une âme.

Du coup, départ direction la véritable station spatiale de Yanqing, située à une centaine de kilomètres au nord de Pékin, la base non moins lunaire de ces JO. Pour aller admirer Feuz, Odermatt et Cie.

Klaus Zaugg Peking Yanqing
L'Olympia Express quitte Pékin, direction Yanqing. image: sportfanatics.ch

Bien évidemment, il est exclu de sortir de la bulle sanitaire. Alors le voyage débute en train rapide (vitesse maximale: 183 km/h), se poursuit à bord de deux bus et, finalement, s'achève en télécabine.

Les autochtones n'ont pas accès à ces liaisons entre la base spatiale à Pékin et sa station dans les montagnes. Elles sont hermétiquement fermées.

Klaus Zaugg Peking Yanqing
Notre envoyé spécial Klaus Zaugg, dans la télécabine à Yanqing.image: sportfanatics.ch

C'est ce qui rend le voyage si spécial. En regardant par la fenêtre, on sait pertinemment qu'on ne peut pas aller à la rencontre de ceux qui sont à l'extérieur. Dans nos wagons, bus ou cabines, on est en sécurité. C'est ce qui se passera un jour sur Mars, quand on ira de station spatiale en station spatiale. Là-bas aussi, il ne faudra surtout pas descendre des véhicules, histoire d'éviter la confrontation avec un milieu hostile.

Grues et barres d'immeubles

On quitte donc la grande ville. Ah, comme ça fera du bien d'arriver enfin dans les montagnes! Des forêts de sapins enneigées et d'imposantes montagnes de neige. Et les architectes olympiques qui ont certainement pensé aux douillets chalets alpins en construisant les bâtiments. Il y a clairement de quoi se réjouir d'aller découvrir ce pays des merveilles hivernales chinois.

Klaus Zaugg Peking Yanqing
En chemin, pas beaucoup d'indicateurs que les montagnes sont proches.image: sportfanatics.ch

Qu'il n'y ait pas de montagnes enneigées visibles depuis Pékin? Aucun souci. Il n'y en avait pas non plus à Calgary, Salt Lake City ou Vancouver. Il avait aussi fallu voyager hors de ces villes olympiques pour voir une nature hivernale.

Et si on se fie aux horaires, le voyage entre Pékin et son paradis hivernal durera environ trois heures, avec les temps d'attente pour les correspondances. Presque l'équivalent du trajet entre Zurich et Saint-Moritz. Et après tout, Zurich n'est pas non plus un univers de neige et de glace. Saint-Moritz, en revanche, oui. La station grisonne a même accueilli deux fois les JO d'hiver (1928 et 1948).

Le train ultramoderne roule silencieusement loin de Pékin. A travers la fenêtre, de hauts immeubles. Des grues de chantier. Comme c'est le cas dans tous les centres urbains. Le trajet en train ne dure qu'une demi-heure. Ensuite, il faut monter dans un bus. Puis un second.

L'arrivée de la télécabine à Yanqing, une station spatiale au milieu de nulle part.
L'arrivée de la télécabine à Yanqing, une station spatiale au milieu de nulle part.image: sportfanatics.ch

Rejoint-on vraiment un paradis hivernal? Non, ce n'est pas possible?! La région est plate. Asséchée. Elle ressemble à un désert. Et pas de neige.

Comme une traversée de l'Atlantique et du désert

Tout à coup, les montagnes. La route monte, file sur les ponts, dans les gorges et des tunnels. Mais toujours aucune trace d'or blanc. Ni sur les flancs, ni sur les sommets. Un désert froid, sec et aride. Où est-on? Un paysage qui rappelle plutôt le désert du Sinaï.

Et puis la délivrance. Juste avant l'arrivée de la télécabine, au pied de l'aire d'arrivée de la descente: de la neige! Un soulagement semblable à celui des braves marins qui revoyaient enfin la terre après une longue traversée de l'Atlantique.

Klaus Zaugg Peking Yanqing
Une fine bande de neige entre les rochers, le décor lunaire de la descente des JO de Pékin.image: sportfanatics.ch

Une étroite bande blanche qui se faufile entre des rochers nus et bruns. De la neige artificielle. C'est fou! En Europe et en Amérique, il y a d'énormes montagnes enneigées. Il suffit de penser au Lauberhorn, à Wengen! Mais les descendeurs, les pilotes de Formule 1 hivernaux, les héros olympiques les plus courageux, ont traversé la moitié du monde pour venir s'affronter dans cet endroit laid et inhospitalier. Quelle folie!

Alors bien sûr, on a tous lu des articles à ce sujet, vu des images à la télévision ou entendu parler à la radio. Mais l'absurdité et la folie d'une piste de ski olympique dans cette région ne peuvent être appréhendées dans toute leur ampleur qu'une fois sur place. Une station de ski populaire? Bien naïf celui qui le croit. Les bâtiments construits ici n'ont rien à envier à ceux d'un film apocalyptique. Impensable que quelqu'un puisse venir ici pour le plaisir. Mais peut-être que tout est différent en Chine.

Oiseaux de mauvaise augure

On regarde ce décor avec une certaine naïveté (ou peut-être est-ce du bon sens?), en pensant: un jour, les Jeux olympiques d'hiver sur Mars seront comme ça. Là-bas aussi, il fait sec, les rochers ont, d'après les photos, une couleur similaire à ceux de Yanqing et on ne peut pas non plus quitter la station spatiale (comprendre: la bulle sanitaire). Le report de la course à cause du vent s'inscrit dans cette absurdité olympique.

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Le manque de neige est criard, même quand on est au cœur des montagnes.image: sportfanatics.ch

Après une heure et demie et l'annulation de l'épreuve du jour, Il est temps de quitter ce lieu affreux, froid et plein de courants d'air. Désabusé. Et un peu déçu de ne pas avoir vu de vraie neige, des sapins enneigés et un chalet.

Et puis, tout à coup, dans la télécabine, des sons familiers au loin. Pas celui du cor des Alpes, non. Ni de l'accordéon. Mais bien le croassement d'un corbeau. Oui, des corbeaux! De magnifiques et grands corbeaux. Des corbeaux olympiques!

Les montagnes des corbeaux. Voilà où on en est: ces oiseaux sont tout ce qu'il nous reste du pays des merveilles olympiques hivernal.

Adaptation en français: Yoann Graber

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