Voilà un projet qui risque de ne pas plaire aux étudiants de l'Université de Neuchâtel: le Conseil d'Etat envisage, à la lumière de son mandat d'objectifs 2023-2026, d'augmenter les taxes d'études semestrielles.
Comme le mentionne le document, la taxe passerait de 425 à 720 francs par semestre pour les étudiant-e-s suisses. Les étrangers paieraient pour leur part 870 francs (contre 700 actuellement).
En incluant les taxes obligatoires supplémentaires (tels que les frais d'inscription et d'examens, cotisation aux associations, etc...), le montant effectif total passerait de 515 à 810.- par tête et par semestre, soit une augmentation de «près de 60%» , comptabilise pour sa part la Fédération des Etudiant-e-s Neuchâtelois-e-s dans un communiqué. Une charge décrite par cette dernière comme intenable pour un nombre d'académiciens.
Selon Le Quotidien jurassien, le canton de Neuchâtel verse une enveloppe d’environ 200 millions tous les quatre ans à l’institution. Sous réserve du nombre d'étudiants enregistrés, l'augmentation des taxes permettrait de mettre dans l'escarcelle quelque 1 841 270 francs – soit, près de deux millions – de recette supplémentaire annuelle, de quoi séduire les autorités cantonales, qui souhaitent que les bénéficiaires des prestations publiques mettent davantage la main au porte-monnaie.
Mais l'argument massue de ce dernier réside dans les coûts d'études, les plus bas en comparaison intercantonale. En effet, le barème pratiqué par Neuchâtel est le plus modeste de Suisse, avec celui de l’Université de Genève. Le montant n’a pas été modifié depuis de nombreuses années (depuis 1998, soit 24 ans).
C'est que les taxes universitaires sont très disparates sur le territoire suisse.
Ainsi, comme le démontre le tableau ci-dessous, Neuchâtel, Genève et Lausanne sont clairement plus abordables que les autres institutions. Lucerne, Fribourg, Berne occupent le haut du panier avec les écoles polytechniques. Et les taxes neuchâteloises sont sans commune mesure avec celles de l'Università della Svizzera italiana, où les Suisses doivent s'acquitter d'une dîme de 1100 francs (sans compter les taxes obligatoires supplémentaires de 900 francs), ou encore de la prestigieuse académie de Saint-gall, où les charges voguent entre 1000 et 1700 francs par semestre entre le bachelor et le master.
Comme le rappelle Le Quotidien jurassien, un universitaire d’une faculté «standard» coûte à la collectivité environ 10 000 francs par année. En conséquence, faut-il harmoniser les taxes par le haut, comme l'envisage le gouvernement neuchâtelois? «Faire passer les étudiants à la caisse quand le canton n'investit pas davantage dans la formation, ce n'est pas logique», assure Emile Blant, co-Président de la FEN et député au Grand conseil. Il estime que le Conseil d'Etat manque sa cible.
Une position partagée par le rectorat de l'uniNE, qui a également affiché son opposition à une augmentation des taxes, pour une question d'attractivité. En effet, une bonne partie des universitaires proviennent d'autres cantons, tels que Vaud et Genève. Et avec eux, des subventions intercantonales.
Cependant, force est de constater que la question de l'attractivité n'est pas si simplement balayée par des considérations d'ordre pécuniaire. Le taux d'inscription pourrait être influencé par d'autres critères, comme la réputation de l'établissement, ou encore ses spécialisations.
A cela, la FEN répond que les questions de l'accès aux études et de l'égalité pâtiraient sévèrement d'une hausse des taxes.
Mais que représente vraiment cette «minorité»? Sollicité par watson, le Bureau social de l'UniNE ne constate pour sa part pas une explosion de la précarité estudiantine dans les statistiques actuelles - du moins pas en période normalisée.
Cependant, précise le bureau en se référant aux chiffres de l'Office fédéral de la statistique (OFS), tout le monde n'est pas loti à la même enseigne. En moyenne, les étudiants suisses se financent en grande partie grâce au soutien familial. Mais pas moins de 73% des étudiants des hautes écoles suisses indiquent exercer une activité rémunérée à côté des études. Et en termes de volume d'activité, la majorité des étudiants actifs (68%) affiche un taux d’occupation pouvant aller jusqu’à 40%. Or, la portion du temps consacré au job a un impact sur le nombre d'heures consacré aux études.
Pour rappel, la décision d'augmenter ou non les taxes d'études revient au Conseil d'Etat, qui pour l'heure a assuré simplement «ouvrir une réflexion». La question devrait se préciser avec celle du financement de l'université et du montant de l'enveloppe financière quadriennale. Le gouvernement a annoncé mi-décembre proposer au Grand Conseil de verser 200 millions (200'575'580) de francs à l'UniNE pour la période 2023-2026, soit quatre tranches annuelles de 50 millions.