«Sur internet, il n'y a que du sexe. Sous toutes ses formes! Pas un seul indice sur la façon de tuer un être humain. En revanche, il y a un ustensile de cuisine pour toutes les tailles d'anus.» Cette tirade pourrait résumer à elle seule l'atmosphère déglinguée de la mini-série Inside Man, produite par la BBC et qui vient de débouler sur Netflix: flippante, absurde et (méchamment) drôle.
Surtout quand on sait que celle qui prononce cette phrase (au beau milieu de la cuisine) est une femme au foyer anglaise sans histoire. Encore plus quand on sait que le récepteur de cette plainte étonnante n'est autre que son pasteur de mari, dont l'ado est soupçonné de trimballer du matériel pornographique sur une clé USB.
Vous trouvez déjà que ça fait beaucoup? Attendez, de faire connaissance avec le sémillant Jefferson Grieff, de l'autre côté de l'Atlantique. Incarné par le très magnétique Stanley Tucci, Grieff est un condamné à mort cruel mais érudit, qui attend son heure en filant des coups de main dans des affaires de meurtres. Et il s'y connaît un peu Jeff: avant d'assassiner froidement son épouse (en prenant soin de lui trancher la tête), il était professeur en criminologie.
Voilà. C'est bien la valeur morale qui danse sans vergogne sur l'échine tendue de tous les protagonistes de ce thriller intense et loufoque, et qui refuse de choisir entre nous chauffer les zygomatiques et nous glacer le sang. Le bien, le mal, le mauvais, le gentil, la repentance, la résignation. Le tout, enrobé d'une escalade d'événements qu'on peut tous croiser au détour d'une journée de merde. Enfin, ça, c'est Jeff qui le dit:
Quatre épisodes d'une heure qui passent des Etats-Unis à l'Angleterre, du couloir de la mort au crime pastoral, de l'enquête à l'angoisse. Et si on enjambe l'Atlantique toutes les dix minutes, c'est que Beth, une journaliste qui semble hypnotisée par cet Hannibal Lecter des bibliothèques, a besoin de ses talents pour résoudre une disparition qui hante la famille religieuse anglaise.
Et la philosophie de parloir n'est jamais loin: «Je suis condamné à mort pour avoir étranglé ma femme, bien sûr que je suis une sale merde. La question est... Beth: est-ce que vous aussi?»
Même si Inside Man est bourrée de petits défauts, le suspens et le cynisme y sont suffisamment jubilatoires pour que les quatre épisodes se digèrent comme une ostie trempée dans de la sauce piquante, un soir caniculaire de novembre.
Mention (très) spéciale pour le drôle d'assistant de Grieff, lui aussi condamné à mort. Un gros nounours psychopathe, à l'humour aussi dense que son casier judiciaire. Il a assassiné quatorze femmes et... mangé les pieds de sa maman. «Mais elle était déjà morte, ça ne compte pas.»
Allergiques à l'humour anglais corrosif, vous voilà prévenu.