La semaine dernière, watson a établi le contact avec Marc Raymond Wilkins et Dirk Lustig, deux ressortissants suisses installés à Kiev. Dans un premier témoignage, ils nous assuraient que la situation dans le pays était calme et qu'ils ne quitteraient pas le pays.
Recontactés cette semaine, alors que la tension ne cesse de monter dans le pays, ils étaient encore plus déterminés à rester. Mercredi, tous deux refusaient catégoriquement de fuir. L'un d'entre eux, Dirk Lustig, avait même prévu de se rendre au front, pour témoigner, informer, aider.👇
Tôt jeudi matin, Vladimir Poutine a officiellement déclaré la guerre à l'Ukraine. Les alarmes se sont mises à hurler dans tout le pays et les avions de chasse et les missiles ont commencé à fendre le ciel ukrainien.
Si Marc Raymond Wilkins a donné suite à son plan d'urgence, celui de se rendre à Berlin en cas de guerre, Dirk Lustig, lui, a décidé de rester dans le pays. Une amie de ce dernier Patricia Shmorhun Hawrylyshyn a également accepté de nous raconter ce qu'elle est en train de vivre actuellement à Kiev, où elle est établie depuis plus de vingt ans.👇
«Je devais me rendre dans le Donbass tôt le matin ce jeudi. Le train était prévu à 6h, mais les bombardements ont tout chamboulé», explique Dirk Lustig, qui a dû rapidement se réorganiser et faire face à la situation d'urgence.
S'il a pensé à quitter Kiev, l'incertitude quant à la provenance des bombardements l'a fait renoncer à partir: «On a décidé de ne pas bouger pour l’instant»
Dirk n'a pas dormi de la nuit. À 4h du matin, il reçoit l'information qu'une guerre est sur le point d'éclater, puis, à 4h45, quelques minutes après la fin du discours du président russe, les premières explosions se font entendre.
«Heureusement que je n’ai pas suivi ma première impulsion qui était de partir à 30 ou 40km de Kiev, poursuit-il. Je me suis rendu compte qu'il y avait une base militaire pas loin et qu'elle était l'une des cibles des attaques.»
S'il se tient prêt à évacuer le pays, il n'a toujours aucune véritable intention de partir. «J’ai une voiture qui est prête, une valise qui me permet de tenir une semaine, j’ai réuni tout l’argent que j’ai à gauche et à droite.»
En ce moment, dans son petit village de Petropavlivska Borshchahivka, il décrit l'atmosphère comme étant «bizarre»: d'un côté, les gens sont calmes et continuent à vivre comme si de rien n'était. De l'autre, des avions de chasse traversent constamment le ciel.
Basée à Kiev, Patricia Shmorhun Hawrylyshyn a imaginé un plan en plusieurs étapes. Cette Suissesse d'origine ukrainienne est dans la capitale depuis presque vingt ans. Elle a grandi à Genève, elle est psychologue de formation et elle nous explique ce qu'elle est en train de vivre.👇
Etablie dans le quartier gouvernemental au centre de Kiev, elle a décidé, il y a quelques jours, de déménager à 20km du centre, près de l'aéroport de Kiev Boryspil.
Pour elle, il faut envisager la situation par étapes: «Pour nous, la priorité, c'était déjà de sortir du centre, où il y avait déjà des menaces de bombardements» explique-t-elle. Dans un deuxième temps? «Partir vers l'ouest».
Réveillée à 4h30 du matin par les premiers bombardements, elle a voulu emmener sa famille encore plus loin: «On a essayé de partir dans les montagnes à l'ouest.»
Malheureusement, après avoir parcouru seulement 10km en 3h, et à la vue de longues files d'attente dans toutes les stations-service, Patricia a rebroussé chemin.
S'estimant chanceuse d'avoir pu quitter la ville et se rendre chez des amis à la campagne, Patricia nous explique avoir, pour l'heure, tout ce dont elle a besoin. Le mot d'ordre? Garder son calme. «On s’occupe des filles, elles font leurs devoirs, la vie continue. Je pense que, selon la situation, on avisera.»
Rentrer en Suisse? Pour l'instant, c'est impossible: «On n’est pas partis à la première vague, on ne pense pas partir à moins que nos vies soient directement en danger.»
C'est après avoir entendu les premières bombes que Marc Raymond Wilkins et sa femme ont décidé de quitter la ville. Il était alors 5h du matin et ils n'avaient préparé que leurs documents d'identité.
Dans la hâte, ils n'ont pris que quelques affaires avec eux et ont sauté dans leur voiture: «Nous avons assez rapidement décidé de changer nos plans et de quitter la ville.»
Le plan? Rejoindre Berlin via Varsovie en Pologne. À la frontière, une longue file d'attente, avec de nombreuses familles souhaitant également quitter le pays: «Il y a beaucoup de gens, mais tout le monde est très calme, choqué bien sûr, mais calme.»