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Témoignage watson

Ukraine: «Kiev est vide!» raconte Olga, retournée dans son pays

La jeune femme avait fui la capitale quelques jours après le début des bombardements. Deux mois après le début de la guerre, elle est revenue à Kiev.
La jeune femme avait fui la capitale quelques jours après le début des bombardements. Deux mois après le début de la guerre, elle est revenue à Kiev.
Témoignage watson

«Lors de la dernière attaque, j'étais dans le métro», Olga raconte la vie à Kiev

Olga avait fui la capitale ukrainienne quelques jours après le début des bombardements. Deux mois après le début de la guerre, elle est revenue à Kiev et reprend peu à peu ses marques. Entretien.
04.05.2022, 16:5205.05.2022, 07:26
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Le 25 février, soit le lendemain des premiers bombardements russes sur Kiev, watson avait contacté Olga, jeune juriste qui s'était réfugiée avec son petit ami dans une école de la capitale ukrainienne (voici son histoire).

Deux mois après le début de la guerre, elle est de retour dans la capitale ukrainienne et a repris une activité professionnelle.

Bonjour Olga, nous sommes restées en contact durant ces deux mois, mais nous n'avons pas eu l'occasion de nous voir, vous avez l'air d'aller bien.
Oui, merci, je suis heureuse de vous voir aussi. Je suis d'autant plus heureuse que je suis avec mon petit ami, mes parents et que nous sommes tous réunis, tout le monde est sain et sauf.

Lors de notre premier entretien le 25 février, vous vous étiez réfugiée avec votre petit ami dans une école, qu'avez-vous fait par la suite?
Nous sommes restés six jours dans l'abri de l'école et nous avons quitté Kiev pour Cherkasy, au Sud de la capitale. Nous sommes restés à Cherkasy deux semaines puis nous sommes repartis pour Lviv près de la frontière polonaise, où nous avons trouvé un appartement pour moi, mon petit ami et mes parents.

Vidéo: watson
L'état des infrastructures ukrainiennes sur la route Zhytomyrska qui mène au centre de ville de Kiev. Vidéo d'Olga Maria Nacorado

Depuis quelques jours vous êtes retournée à Kiev, pour quelles raisons?
Tout d'abord pour le travail. Je suis juge assistante au tribunal administratif et j'ai appris que les collègues revenaient au bureau. Je n'ai jamais vraiment quitté mon boulot, j'ai continué de travailler à distance lorsque nous étions à Lviv et je voulais revenir à Kiev pour être sur place. Les dossiers sur lesquels je travaille sont très importants à mes yeux, il s'agit entre autres de jugements sur des paiements d'aides sociales et c'est important que ces cas soient traités par le tribunal, mais c'est aussi très compliqué de travailler dans ces conditions.

Vous avez donc toujours eu la possibilité d'exercer votre métier même en tant de guerre?
On peut dire oui. En tout cas, j'ai continué de recevoir mon salaire. Seul le mois de février n'a pas été payé, mais pour le reste, soit le mois de mars et d'avril, nous avons toujours été payés. En plus, c'est important de continuer de travailler, car avec nos salaires, on finance aussi l'armée.

«L'administration pour laquelle je travaille a décidé de prendre 40% de notre salaire pour le verser directement à l'armée ukrainienne. Je soutiens totalement cette décision»

Dans d'autres entreprises ukrainiennes, les salariés choisissent de donner 10% de leur revenu ou 30%.

Ce n'est pas un peu dangereux de revenir à Kiev? Il y a eu encore des bombardements récemment non?
Oui, bien sûr que cela peut paraître dangereux. C'est une ville qui compte plus de deux millions d'habitants et quand on se promène dans la rue, elle semble complètement vide. On voit des checkpoints partout. Lors de la dernière attaque russe, j'étais dans le métro et tout à coup, il s'est arrêté et nous ne savions pas vraiment pourquoi. J'ai regardé les infos sur mon téléphone et j'ai vu que les Russes avaient bombardé une usine non loin de Kiev.

En quoi votre comportement a-t-il changé aujourd'hui? Vous n'avez plus peur des attaques?
Concernant le danger dont vous parlez, vous avez raison, nous avons peur, mais j'ai appris à vivre avec cette peur permanente.

«Je dirai que c'est comme en Israël, il y a la peur au quotidien, mais cela ne nous paralyse plus du tout. Aujourd'hui, nous savons réagir, nous savons où nous réfugier lorsqu'il y a une menace. C'est en quelque sorte ma nouvelle réalité.»

Aujourd'hui, je sais que l'Ukraine reçoit des soutiens militaires des pays étrangers, je sais qu'on se défend mieux contre les attaques de l'armée russe et j'ai confiance.

Votre état d'esprit a changé en quelque sorte?
Oui, complètement. Je n'attache plus beaucoup d'importance aux choses matérielles, je me fiche d'avoir une voiture, des objets, cela ne compte plus avec la guerre.

«J'ai deux paires de jeans, quelques pulls et c'est assez pour vivre. Les choses matérielles ne comptent plus. Ce qui importe, c'est que ma famille soit sauve»
Olga (au centre) accompagnée de son petit ami et de ses parents.
Olga (au centre) accompagnée de son petit ami et de ses parents.

Comment se passent vos journées à Kiev?
À Kiev tous les commerces ferment à 18h et le couvre-feu commence à 22h. En résumé, je vais travailler vers 10h jusqu'à 17h, je me dépêche pour aller faire les courses et je rentre directement chez moi. Ici tous les transports en commun sont gratuits, vous pouvez vous déplacer comme bon vous semble. Avant la guerre, nous avions beaucoup de produits disponibles. Aujourd'hui, l'offre est restreinte, vous avez deux choix de yaourt par exemple, plus de possibilité de manger du poisson et les prix des aliments et de l'essence augmentent rapidement. Les commerçants sont toutefois très solidaires et offrent parfois de la nourriture gratuitement.

Paté de sardine, boisson, voici ce que certains commerçants offrent aux habitants de Kiev.
Paté de sardine, boisson, voici ce que certains commerçants offrent aux habitants de Kiev. Olga Maria Nacorado

Avez-vous pensé quitter l'Ukraine à un moment ou un autre et vous réfugier dans un autre pays?
J'ai beaucoup discuté avec des amis qui sont partis à l'étranger et j'ai pris la décision de rester en Ukraine. Nous avions des possibilités d'aller au Canada, en Europe, notamment en France et en Allemagne, mais nous avons fait le choix de rester ici ensemble. Vous savez, refaire sa vie et partir de zéro, c'est extrêmement difficile.

«Je suis juriste, j'ai un bon travail, une vie sociale, des amis et toute ma vie est en Ukraine. Aller me réfugier en Allemagne, ne pas connaître la langue et chercher du travail dans un autre domaine professionnel pour subvenir aux besoins de ma famille serait trop compliqué.»

Mes connaissances qui sont parties doivent travailler en tant que serveuses ou autres alors qu'elles avaient une bonne situation en Ukraine. Je ne me voyais pas sauter le pas. Je préfère rester chez moi.

Les bombardements, l'insécurité, la peur au quotidien, n'est-ce pas trop cher payé pour conserver votre vie d'avant?
Ce n'est pas encore le retour de la vie d'avant vous savez. Mais c'est au moins un semblant de normalité.

«L'autre jour, je suis allée boire un cappuccino avec des amis sur une terrasse à Kiev dans un café. Je peux vous dire que cet instant était magique»

C'était le meilleur cappuccino de ma vie. On discutait, on prenait le soleil et je me suis dit que c'était un peu la vie d'avant qui revenait.

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Un bâtiment en flammes après un bombardement russe, Kiev.
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Témoignage d'une famille de réfugiés
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