Il y a une vingtaine d'années, trouver un vaccin contre le cancer était le moteur de tous les chercheurs en ARNm. C'était aussi la motivation de Ugur Sahin, le fondateur de Biontech, qui a mis toute sa volonté dans la lutte contre le cancer grâce à la technologie ARNm. C'est ainsi qu'est né le vaccin Covid qui a freiné la pandémie de manière significative.
Toutefois, malgré de longues recherches, aucun vaccin à ARNm n'est encore disponible sur le marché pour combattre le cancer. Moderna vient cependant de publier les résultats prometteurs d'une étude clinique de phase II sur un vaccin contre le cancer à base d'acide ribonucléique messager (ARNm).
Le vaccin ARNm est utilisé dans le cadre d'une thérapie combinée. Dans ce traitement, le vaccin ARNm de Moderna est combiné à la célèbre immunothérapie Keytruda de Merck. Keytruda est une thérapie par anticorps monoclonaux, un inhibiteur de point de contrôle, qui améliore la capacité du système immunitaire à reconnaître et à combattre les cellules tumorales. Keytruda est utilisé contre le cancer «noir» de la peau quand il est si avancé qu'une ablation chirurgicale du mélanome n'est plus possible.
Le traitement par le vaccin ARNm combiné aux anticorps monoclonaux a réduit le risque de récidive ou de décès de 44% par rapport au traitement par Keytruda seul.
Stéphane Bancel, patron de Moderna, cité dans le communiqué de la société américaine, estime que ces résultats constituent la première preuve d'efficacité pour un traitement anticancéreux par ARNm dans le cadre d'un essai clinique.
Les données complètes seront bientôt présentées lors d'une conférence sur l'oncologie et partagées avec les autorités sanitaires.
Une vaccination contre le cancer est beaucoup plus compliquée qu'une vaccination contre un virus, comme l'explique Burkhard Ludewig, directeur de recherche à l'hôpital cantonal de Saint-Gall. Une exception est le cancer du col de l'utérus HPV, qui est causé par un virus et peut donc être évité préventivement par une vaccination.
Selon lui, il est évident que le nouveau vaccin à ARNm sera utilisé contre le cancer «noir» de la peau.
Comme les immunothérapies sont également très efficaces contre les tumeurs pulmonaires, on peut en déduire qu'un vaccin à ARNm pourrait également agir contre d'autres types de cancer, comme le promet Moderna. «Il est probable que le cancer de l'amygdale provoqué par le papillomavirus soit également pris en considération», explique Ludewig.
Le vaccin contre le cancer de la peau est un nouveau type de vaccin personnalisé contre le cancer. Les vaccins personnalisés contre le cancer visent à activer le système immunitaire de manière à ce qu'un patient puisse produire une réaction antitumorale sur mesure. Une réaction spécifiquement adaptée à sa signature de mutation tumorale.
Les tumeurs des patients devraient être séquencées et analysées, afin de produire ensuite le vaccin adéquat pour chaque patient. On peut donc s'imaginer qu'un tel vaccin individuel aurait un prix élevé.
Ce vaccin est utilisé à titre préventif pour éviter une récurrence, c'est-à-dire la réapparition de la tumeur.
Y a-t-il eu une percée dans la recherche sur le cancer ? «Je ne parlerais d'une véritable percée que lorsque les résultats seront confirmés par d'autres études, c'est-à-dire la phase III. Pour l'instant, il s'agit d'une progression importante», déclare le directeur de recherche. D'autres études montreraient alors également combien de temps dure la protection vaccinale. «En règle générale, les vaccins nécessitent des rappels réguliers, éventuellement annuels», précise Burkhart Ludewig.