Christian Constantin, vous avez affirmé au Nouvelliste que vous envisagiez de quitter le FC Sion dans 3 ou 4 ans. Etait-ce mûrement réfléchi ou l'avez-vous dit à chaud?
Non, c'est quelque chose de tout à fait réaliste.
Qu'est-ce qui vous poussera à arrêter: la lassitude physique ou la lassitude morale?
C'est l'âge qui avance, bourricot!
Et comment le ressentez-vous, cet âge qui passe?
Oh, tout va bien. Mais je n'ai pas de régime de faveur, je ne suis pas différent de présidents comme Tapie ou Facchinetti, qui sont tous les deux décédés aujourd'hui. Mon tour viendra.
Ça vous plaît de vieillir?
Ce n'est pas une interrogation que j'ai, car je ne peux rien y faire. La seule question que je peux me poser, c'est: comment faire pour bien vieillir?
Et ça passe par le fait de vous détacher du FC Sion et de prendre du temps pour vous?
Non, non. Mais il arrivera un moment où il faudra partir. Je me dis que m'en aller l'année du 100e anniversaire de la Coupe de Suisse (ndlr: en 2026), c'est pas mal.
Vous avez été champion de Suisse avec Sion en 92 et 97.
J'ai pris le club en mars 92, mais c'était M. Luisier qui avait commencé la saison, donc je ne peux pas m'approprier la paternité de ce titre. Mais c'est vrai que j'ai remporté le championnat en 97, ainsi que la Coupe plusieurs fois: 95, 96, 97, 2006, 2009, 2011, 2015.
Quel objectif avez-vous eu pendant toutes vos années de présidence et craignez-vous de ne jamais pouvoir réaliser?
En Suisse, il y a un entraîneur qui a gagné huit Coupes, c'est Karl Rappan. Un joueur qui en a gagné huit aussi, c'est Severino Minelli. Mais aucun autre président n'a gagné plus que quatre Coupes. Moi j'en ai sept. J'aimerais en remporter encore une pour faire comme les autres.
Vous avez mis beaucoup d'énergie, d'argent, d'amour, de temps dans la gestion du FC Sion et...
(il coupe) Je dois être le président qui est resté le plus longtemps. J'ai 20 ans de 1e division.
Vous ne regrettez pas d'avoir consacré autant?
Je n'ai aucun regret, t'es fou?! J'ai eu des crève-cœurs, bien sûr, mais aussi beaucoup de plaisir. Et aujourd'hui, je me rappelle des plaisirs. Et puis je suis quand même le mec qui a mis le plus d'argent dans le foot professionnel en Suisse.
Plus que Sven Hotz (ancien mécène du FC Zurich)?
C'était un nain de jardin à côté de moi.
Comment votre fils Barthélémy (directeur sportif) a-t-il pris le fait que vous ne le considériez pas comme un possible successeur?
Attends, attends. Pour être président, il faut être capable de générer des recettes. Si un jour Barthélémy sait le faire, il pourra devenir président. Mais sinon, ce serait un cadeau empoisonné de ma part que de lui laisser la direction du club à mon départ.
Ferez-vous partie de ces présidents qui ne partent pas avant de trouver un successeur?
Chez nous, en Valais, il faut être clair: avoir un club en 1e division, c'est quelque chose d'artificiel. Sion est la plus petite ville de la Ligue, dans une région économique qui est la plus pauvre de la Ligue. On n'est pas fait pour être en 1e division. Si on n'a pas un vrai mécène qui est amoureux du FC Sion et de sa région, on devra rentrer dans le rang.
Vous assurerez-vous tout de même que quelqu'un reprenne le club avant de partir?
Non. Si tu veux, à cet instant précis, je n'imagine pas trouver quelqu'un d'assez déraisonnable pour reprendre le rôle de président tel que je l'ai occupé. Mais peut-être que je trouverai une autre forme de ressource pour le club.
Laquelle?
L'éclatement des droits de télévision comme dans les pays étrangers, par exemple. J'ai plus ou moins 5 ans pour essayer de mettre le train sur les rails dans ce sens-là, pour l'ensemble du football suisse d'ailleurs.
C'est important pour vous de réussir votre sortie?
Je suis déjà parti une fois. Quand j'avais fait le doublé en 97, y'avait la Champion's League derrière, il fallait faire des infrastructures et je n'arrivais pas à m'en sortir avec la Ville. J'avais laissé ma place. On a vu les conséquences.
Est-ce important que les gens gardent une bonne image de vous quand vous partirez, ou vous vous en moquez?
Les gens, tu sais très bien ce que c'est. La gratuité de la parole sert plus à être négatif que positif. Je m'en fous de tout ça! Je ne pourrai pas changer l'être humain.