La Suisse a violé les droits de l'athlète sud-africaine Caster Semenya. La Grande Chambre de la Cour européenne des droits de l'homme valide la décision rendue en 2023 en défaveur de la Suisse dans le litige opposant la coureuse de demi-fond hyperandrogène à World Athletics.
Les juges ont estimé, à une majorité de 15 contre 2, que le droit de l'athlète à un procès équitable (art. 6 de la convention) avait été violé par la Suisse. Ainsi, l'examen sur appel par le Tribunal fédéral de la décision du Tribunal arbitral du sport n'atteint pas le niveau d'attention requis.
Dans le détail, la Grande Chambre confirme que le recours de Caster Semenya devant le Tribunal fédéral pour contester la décision du Tribunal arbitral du sport créait un lien juridictionnel avec la Suisse. Dès lors, cette dernière devait garantir les droits protégés par l'art. 6 durant la procédure qui s'est déroulée à Mon Repos.
Après avoir souligné le «déséquilibre structurel» de la relation entre les fédérations sportives et les athlètes, les juges de Strasbourg ont relevé que le droit à un procès équitable de la recourante exigeait un «examen particulièrement rigoureux de sa cause». En effet, la compétence du Tribunal arbitral du sport lui était imposée par une instance sportive et non par la loi et le litige portait sur des droits civils qui, en droit interne, correspondent à des droits fondamentaux.
Or l'examen opéré par le Tribunal fédéral n'a pas répondu à ces exigences. Ainsi, il n'a pas examiné plusieurs points laissés en suspens par le Tribunal arbitral du sport. Celui-ci avait évoqué en particulier la difficulté que les athlètes concernées pouvaient rencontrer pour maintenir leur taux de testostérone en-dessous de la limite fixée par le règlement de World Athletics (WA). Pourtant, cette question était déterminante pour l'issue de la cause.
Il y a deux ans, la CEDH avait admis, dans une décision de chambre, la requête de Caster Semenya sur plusieurs points. Elle avait estimé que le règlement de WA, confirmé par les instances suisses, violait son droit à la vie privée, en particulier. Cette violation n'est aujourd'hui pas confirmée par la Grande Chambre.
Le règlement litigieux impose aux femmes présentant un excès d'hormones mâles (hyperandrogènes) de réduire leur taux naturel de testostérone pour participer aux compétitions reconnues par WA. La Suisse a fait appel de la décision de 2023 devant la Grande Chambre de la CEDH. (jzs/ats)