A l'école primaire, Corinne Suter avait écrit dans un carnet que son plus grand rêve était de devenir championne olympique. Ce mardi matin, il est devenu réalité. Et pourtant, le début de saison de la Schwytzoise ne laissait pas présager une telle issue. On rembobine.
Zermatt, fin septembre. Les conditions ne sont pas idéales, la piste un peu trop molle. Comme d'habitude, Corinne Suter peaufine son ski. Le début de la saison approche, il faut profiter au maximum de ces entraînements. La Schwytzoise descend la pente à 100 km/h. Tout à coup, la faute de carre. Puis la chute.
«Une chute pas si grave que ça, en fait», relativisera la nouvelle championne olympique de descente deux mois plus tard. Mais comme les skis sont restés crochés dans la neige, l'accident n'a pas été sans conséquences. Corinne Suter a souffert de graves contusions osseuses aux tibias et d'écorchures au visage. Résultat: une pause forcée de plusieurs semaines.
Et pourtant, elle a de la chance. «Une chance énorme», surenchérit-elle. La musculature qu'elle a développée au fil des ans lui a permis d'éviter le pire. Et d'être présente à Lake Louise début décembre, où les spécialistes de la vitesse ont lancé leur saison. Avec, en ligne de mire, les Jeux olympiques de Pékin.
Trois jours avant la première descente de la saison, tout début décembre, Suter est assise dans un fauteuil de l'hôtel Chateau, une bâtisse aux allures de forteresse, sur les rives du mondialement célèbre Lac Louise au Canada. Elle répond aux journalistes. La Schwytzoise a l'air d'avoir les pieds sur terre, d'être en paix avec elle-même. Satisfaite de ce qu'elle a, elle ne semble plus dérangée par la pression des années précédentes. Les questions sportives sont à nouveau au centre de l'entretien. Mais l'évolution mondiale de la pandémie la fait réfléchir, lui donne un autre regard sur sa vie de skieuse. Ses mots le prouvent:
Cette vision des choses contribue à sa décontraction nouvelle. Mais ce sont surtout ses succès sur la neige et leurs multiples confirmations qui apportent à la Schwytzoise la sérénité qui lui a manqué par le passé, ce qui l'empêchait d'exploiter pleinement son talent. L'argent et le bronze glanés aux championnats du monde 2019, avant même son premier podium en Coupe du monde, ont brusquement débloqué la situation. Depuis, elle joue constamment les premiers rôles. Avec une apogée ce mardi, donc.
Avoir perdu des kilomètres d'entraînement à cause de sa blessure en septembre ne l'a même pas contrariée. Au contraire.
«Au début, j'ai eu du mal. J'ai été freinée de cent à zéro, c'était difficile», avoue-t-elle. En même temps, elle reconnaît à quel point cette pause lui a été bénéfique. «Pendant quatre ou cinq jours, j'ai dormi 14 ou 15 heures d'affilée. C'est là que j'ai remarqué que mon corps en avait besoin.» Elle a aussi apprécié les semaines suivantes avoir à nouveau du temps pour d'autres choses, comme sa famille et les chevaux.
Son succès l'a menée vers une série d'engagements supplémentaires. Corinne Suter est devenue une personne très demandée médiatiquement et a été happée par de nouveaux sponsors haut de gamme. Elle a par exemple entamé une collaboration avec une grande marque de montres, pour laquelle des stars du sport comme Usain Bolt, Novak Djokovic et Kylian Mbappé font également de la publicité. Son titre olympique va certainement lui ouvrir d'autres portes très lucratives.
Ces contrats incluent des engagements sur les réseaux sociaux. Une épée à double tranchant, estime Suter. Depuis ses succès aux championnats du monde 2019, elle s'y dévoile davantage et poste aussi, par exemple, des photos en bikini de ses vacances. Mais la championne du monde de descente essaie de ne pas passer trop de temps sur les réseaux sociaux. Elle essaie de les utiliser à bon escient:
Malgré sa longue pause forcée, Corinne Suter nourrissait de grands espoirs pour cet hiver olympique. Avant sa blessure, la Schwytzoise était en pleine forme. Elle a rapidement retrouvé son niveau, comme a pu le constater Roland Platzer, l'entraîneur suisse de vitesse. Tina Weirather, experte pour la télévision alémanique SRF et ancienne coéquipière, lui reconnaissait les qualités nécessaires pour aligner les victoires. Elle avait vu juste!