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«On ne sort pas indemne du marathon des Sables»

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Un participant comme perdu dans l'immensité du désert marocain sous une chaleur écrasante.Image: Instagram

Deux Romands témoignent: «On ne sort pas indemne du marathon des Sables»

La course de 250 km, disputée en autosuffisance dans le désert marocain, se termine ce lundi après plusieurs jours de souffrance (cloques, araignées et insolations). Deux Romands qui y ont participé par le passé témoignent.
04.04.2022, 11:4904.04.2022, 18:05
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Lundi soir, le soleil va se coucher pour la dernière fois sur le 36e marathon des Sables et il sera temps, pour les coureurs, de mesurer tout le chemin parcouru, et les obstacles franchis. La course avait été endeuillée l'année dernière par le décès d'un participant, et il est certain que tous savaient que ça pourrait leur arriver cette année. «En 2017, un coureur avait aussi eu un arrêt cardiaque», se souvient Alain Bersier. «Heureusement, il avait pu être sauvé.»

Le Vaudois n'a jamais oublié le marathon des Sables, une épreuve par étapes disputée sur 250 km et sept jours dans le désert marocain. Une course qui ne ressemble à aucune autre, et dont les pièges sont partout.

Le premier tient dans la gestion de l'eau. Les candidats bénéficient d'un nombre limité de litres par jour (entre 10 et 12 selon les étapes). Ils peuvent en obtenir davantage, mais chaque bouteille supplémentaire leur coûte des pénalités de temps. L'eau qui leur est fournie doit répondre à tous leurs besoins:

  • Hydratation: les températures atteignent parfois les 50 degrés et il est vital de boire suffisamment.
  • Rafraîchissement: les coureurs doivent régulièrement s'asperger d'eau.
  • Hygiène: l'eau sert aussi à se laver chaque soir. Pour en utiliser un minimum, les athlètes trempent des lingettes dans quelques décilitres qui, au contact du liquide, se gonflent et agissent comme gants de toilette.

Instant fraîcheur

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Image: marathondessables.com

L'eau et la tente sont les seuls éléments fournis par les organisateurs aux concurrents (1200 cette année). Ceux-ci doivent porter sur leur dos tout le reste, c'est-à-dire vêtements et nourriture pour six jours.

Le contenu du sac d'un participant. Le règlement impose un poids global minimum de 6,5 kg et de 15 kg maximum, hors poids de l'eau journalière transportée.
Le contenu du sac d'un participant. Le règlement impose un poids global minimum de 6,5 kg et de 15 kg maximum, hors poids de l'eau journalière transportée.Image: DR

Supporter une telle charge sollicite douloureusement les organismes. Alain Bersier: «Quand on court avec un sac aussi lourd, c'est comme si on faisait de la descente non-stop, même sur un revêtement plat. On a douze kilos qui pèsent et tapent sur les muscles. En Suisse, je m'entraînais à courir dans les descentes avec un pack de jus de pomme dans le sac à dos».

Malgré sa préparation, le Vaudois était perclus de courbatures au soir de la première étape marocaine. «J'ai participé à des ultra-trails de 165 km avec 12 000 m de dénivelé positif, mais le marathon des Sables, c'est l'épreuve la plus dure que j'ai faite. Alors que c'est 250 km sur 7 jours, et que c'est quasiment plat.»

Lui a eu de la chance: il n'a pas trop souffert de cloques. Mais certains arrêtent de les compter après deux jours.

C'est pas toujours le pied!

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Une fois que vous n'avez presque plus d'eau, un sac de quinze kilos sur le dos, que vous êtes à moitié lavé et que vous avez les pieds en sang, il vous faut encore avaler les kilomètres sur un terrain parfois piégeux et sous un soleil de plomb.

Le terrain piégeux

Les concurrents traversent des dunes, des plateaux caillouteux, des oueds asséchés ou encore des petites montagnes.
Les concurrents traversent des dunes, des plateaux caillouteux, des oueds asséchés ou encore des petites montagnes.Image: Instagram

Les effets du soleil de plomb

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Image: Instagram

Même respirer devient pénible. «La chaleur et le sec, ça vous sèche les narines», explique notre interlocuteur. «Vous avez des plaques de sang qui se forment dans le nez. Et puis cette poussière dans les yeux, toujours...»

Les belles années sont celles sans tempêtes dans le désert.

Le vent balaie parfois les espoirs des concurrents.
Le vent balaie parfois les espoirs des concurrents.Image: Instagram

Et aussi sans mauvaises rencontres, de type araignées, serpents ou scorpions. «On les voit se déplacer sur les dunes, la nuit avec la lampe frontale. C'est un spectacle incroyable», témoigne Raymond Girardet, un autre participant romand. C'est moins drôle quand le spectacle a lieu sous la tente. «Certains participants ont dû abandonner parce qu'ils s'étaient fait piquer par une araignée dans la nuit. Elles ne sont pas mortelles, mais elles provoquent infection et fièvre. Vous n'êtes pas bien.»

Le genre de bestioles qui s'invitent parfois à la course.
Le genre de bestioles qui s'invitent parfois à la course.

Ceux qui y échappent repartent le lendemain et ont intérêt à faire la course en tête. C'était le cas d'Alain Bersier, formidable 51e du classement général en 2017. Sauf qu'une fois par année, lors de l'étape la plus longue de la semaine, les premiers partent en dernier. «Et ben, c'est pas drôle», se marre le Vaudois. «Parce qu'en étant devant, on peut progresser sur du sable qui n'a pas été trop brassé. Les derniers, eux, doivent fournir plus d'effort pour avancer, sous une chaleur toujours plus écrasante à mesure que le soleil se lève.»

La répétition des efforts sur sept jours laisse des séquelles durables. Mais pas toujours celles qu'on croit.

«On n'en sort pas indemne, mais dans le bon sens du terme. Je pensais la faire qu'une seule fois lorsque j'ai découvert l'épreuve en 2014, mais c'est une expérience de vie tellement fantastique que j'y suis retourné trois ans plus tard. Quand on rentre d'une telle course, on se rend compte qu'on peut faire des choses qu'on n'imaginait pas avant de partir. Ça donne confiance et ça nous ouvre à l'humilité, à l'entraide et aux autres. Et puis, les paysages qu'on traverse sont tellement fabuleux»
Raymond Girardet

Le désert pour soi

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Image: Instagram

Le Vaudois de 75 ans sait qu'il faut composer avec certaines réticences au départ. «Quand on dit qu'on va là-bas, les gens nous prennent pour des fous.» L'inquiétude est légitime. Les participants eux-mêmes n'en sont pas dépourvus. «Partir à l'aventure dans le désert, c'est un peu flippant», retrace Alain Bersier. «Je me souviens m'être demandé s'il n'y avait pas de risque d'attentats, dans une zone pas toujours stable et sur une épreuve organisée par la France.»

Le campement vu du ciel

Chaque soir, le «village» est remonté à l'arrivée de l'étape pour les coureurs.
Chaque soir, le «village» est remonté à l'arrivée de l'étape pour les coureurs.Image: Instagram

Mais cinq ans plus tard, lui aussi aimerait repartir. Peut-être l'année prochaine, avec deux proches. «J'aimerais vivre ça avec eux. Partager, échanger. C'est inoubliable. Quand on revient, on n'est plus les mêmes amis.» Et plus tout à fait les mêmes humains.

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