Suisse
Justice

L'EPFL licencie un lanceur d'alerte, la justice l'oblige à le réintégrer

La prestigieuse Ecole polytechnique fédérale (EPFL) a essuyé un revers judiciaire au Tribunal administratif fédéral. Elle doit réintégrer un collaborateur lanceur d'alerte.
La prestigieuse Ecole polytechnique fédérale (EPFL) a essuyé un revers judiciaire au Tribunal administratif fédéral. Elle doit réintégrer un collaborateur lanceur d'alerte.Image: shutterstock

L'EPFL vire un lanceur d'alerte et subit un revers judiciaire

Un collaborateur ayant dénoncé la présence dans les murs de l'EPFL d'une société étrangère à l'institution a été viré pour cause de «restructuration». Pas convaincu par le motif du licenciement, le Tribunal administratif fédéral vient de demander sa réintégration.
18.10.2021, 05:49
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Didier*, un collaborateur de l'Ecole polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL), a remporté le bras de fer judiciaire qui l'opposait à son employeur. Après près de deux ans d'absence pour cause de maladie, il a été licencié en 2018. Au cours de l'été, Didier a saisi le Tribunal administratif fédéral. Mais, l'EPFL a fini par annuler ce licenciement car, selon un rapport médical, aucun élément objectif ne permettait de douter de la récupération d'une capacité de travail à 100%. Toutefois, l'EPFL a informé Didier qu'aucun poste ne répondait à son profil à la suite «d'une restructuration». Deux mois plus tard, rebelote: Didier est viré. L'employeur lui a notifié la fin du contrat de travail pour décembre.

Mesure de représailles?

Si officiellement, une réorganisation interne a entraîné la suppression du poste de Didier, pour celui-ci, il s'agit de représailles, car il a dénoncé l'utilisation du site et du matériel de l'EPFL par une société privée. Il avait signalé cette présence qu'il estimait indue à l'Ombudsman. Didier a contesté le congé et a demandé l'application des directives de l'institution prévues pour protéger les collaborateurs-lanceurs d'alerte ayant signalé des faits juridiquement ou éthiquement incorrects.

Caractère abusif

Après avoir porté le dossier à la Commission de recours interne des Ecoles polytechniques fédérales (EPF) qui n'a admis que partiellement son recours, Didier a saisi le Tribunal administratif fédéral (TAF) en mai 2020. La Cour a rendu son arrêt en août dernier. Les arguments de l'EPFL ont été balayés. «Le caractère abusif de la résiliation peut découler non seulement des motifs du congé, mais également de la manière dont la partie qui résilie exerce son droit, dans la mesure où cela conduit à la reconnaissance du caractère répréhensible d'un motif», a rappelé le TAF. «L'employeur doit en effet agir avec égard et prévenance et jouer franc jeu», ont déclaré les juges.

«Une résiliation abusive peut aussi apparaître dans le cas où l'employeur porte une atteinte grave à la personnalité de l'employé ou adopte un comportement biaisé ou trompeur contrevenant de manière caractéristique au principe de la bonne foi. Il est étonnant de constater que la restructuration aurait conduit à ce que seul le recourant soit licencié(...) Le motif de licenciement allégué, à savoir la réorganisation des services, est inexistant et n'a servi que de prétexte»
Tribunal administratif fédéral
«L'intimée a adopté un comportement contraire à la bonne foi en violant délibérément son engagement dans la décision de résiliation des rapports de travail»
Tribunal administratif fédéral
Affaire très coûteuse pour l'EPFL
L'EPFL doit verser une indemnité de dépens de 3 231 francs à Didier. Mais ce montant constitue une miette par rapport à l'ardoise, qui sera beaucoup plus salée. Selon nos informations, l'EPFL doit rembourser à la caisse de chômage les indemnités perçues par Didier depuis son licenciement et verser à celui-ci la différence entre son salaire et ce qu'il touchait au chômage. Didier ayant été remplacé bien avant son licenciement (durant son arrêt-maladie), en fait, l'EPFL se retrouve à payer deux salaires pour un seul poste pendant au moins trois ans. C'est dire que ce licenciement abusif aura coûté plusieurs centaines de milliers de francs à la prestigieuse institution spécialisée dans la science et la technologie.

Le contrat subsiste

La Cour a également mis en exergue les contradictions de l'EPFL, «qui n'a eu de cesse de faire référence à la longue absence du recourant pour cause de maladie, alors même qu'elle prétendait qu'il ne s'agissait pas du motif de la résiliation des rapports de travail». Après avoir admis le recours de Didier, le TAF a conclu: «le contrat de travail subsiste et les rapports de travail se poursuivent». N'ayant pas contesté cet arrêt auprès du Tribunal fédéral, l'EPFL n'a plus d'autre choix que de réintégrer Didier. Et le rétablir financièrement dans ses droits. «Des discussions concrètes sont en cours pour procéder à la réintégration de ce collaborateur et ainsi se conformer au jugement du Tribunal administratif fédéral», a réagi vendredi Corinne Feuz, porte-parole de l'EPFL. Malgré ce succès judiciaire, l'avocate de Didier se montre prudente. «Ce qui nous importe à présent, c'est que l'arrêt du TAF soit exécuté par l'EPFL de bonne foi, conformément à sa teneur. J'y veillerai», a martelé Me Inès Feldmann.

*Prénom d'emprunt

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