Didier*, un collaborateur de l'Ecole polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL), a remporté le bras de fer judiciaire qui l'opposait à son employeur. Après près de deux ans d'absence pour cause de maladie, il a été licencié en 2018. Au cours de l'été, Didier a saisi le Tribunal administratif fédéral. Mais, l'EPFL a fini par annuler ce licenciement car, selon un rapport médical, aucun élément objectif ne permettait de douter de la récupération d'une capacité de travail à 100%. Toutefois, l'EPFL a informé Didier qu'aucun poste ne répondait à son profil à la suite «d'une restructuration». Deux mois plus tard, rebelote: Didier est viré. L'employeur lui a notifié la fin du contrat de travail pour décembre.
Si officiellement, une réorganisation interne a entraîné la suppression du poste de Didier, pour celui-ci, il s'agit de représailles, car il a dénoncé l'utilisation du site et du matériel de l'EPFL par une société privée. Il avait signalé cette présence qu'il estimait indue à l'Ombudsman. Didier a contesté le congé et a demandé l'application des directives de l'institution prévues pour protéger les collaborateurs-lanceurs d'alerte ayant signalé des faits juridiquement ou éthiquement incorrects.
Après avoir porté le dossier à la Commission de recours interne des Ecoles polytechniques fédérales (EPF) qui n'a admis que partiellement son recours, Didier a saisi le Tribunal administratif fédéral (TAF) en mai 2020. La Cour a rendu son arrêt en août dernier. Les arguments de l'EPFL ont été balayés. «Le caractère abusif de la résiliation peut découler non seulement des motifs du congé, mais également de la manière dont la partie qui résilie exerce son droit, dans la mesure où cela conduit à la reconnaissance du caractère répréhensible d'un motif», a rappelé le TAF. «L'employeur doit en effet agir avec égard et prévenance et jouer franc jeu», ont déclaré les juges.
La Cour a également mis en exergue les contradictions de l'EPFL, «qui n'a eu de cesse de faire référence à la longue absence du recourant pour cause de maladie, alors même qu'elle prétendait qu'il ne s'agissait pas du motif de la résiliation des rapports de travail». Après avoir admis le recours de Didier, le TAF a conclu: «le contrat de travail subsiste et les rapports de travail se poursuivent». N'ayant pas contesté cet arrêt auprès du Tribunal fédéral, l'EPFL n'a plus d'autre choix que de réintégrer Didier. Et le rétablir financièrement dans ses droits. «Des discussions concrètes sont en cours pour procéder à la réintégration de ce collaborateur et ainsi se conformer au jugement du Tribunal administratif fédéral», a réagi vendredi Corinne Feuz, porte-parole de l'EPFL. Malgré ce succès judiciaire, l'avocate de Didier se montre prudente. «Ce qui nous importe à présent, c'est que l'arrêt du TAF soit exécuté par l'EPFL de bonne foi, conformément à sa teneur. J'y veillerai», a martelé Me Inès Feldmann.
*Prénom d'emprunt