Hourra. Dès samedi 26 juin, les Suisses certifiés sans Covid pourront à nouveau s’enlacer, se trémousser, se déconfiner le visage et l’espace vital. Sans restriction et sans masque. A deux ou à 30 000. Mais pas sans crainte: le traumatisme du dernier effeuillage caniculaire qui a dégénéré en 2020 n’aidera certainement pas le pays à faire sereinement irruption dans cette nouvelle trêve estivale avec la candeur politiquement autorisée mercredi.
Parce qu’on a tous en mémoire ce retour de grandes vacances qui a muté en un brutal retour de bâton pandémique. On se souvient tous d’Alain Berset statuant, peu à l’aise, que nous nous étions «trop relâchés». De son appel «à nous reprendre». Le coup de massue après le coup de soleil: on pensait avoir réussi à déconnecter, alors qu’on avait simplement déconné.
Surtout que l’an dernier, à la même période, nous n'accusions «que» quatre mois de crise dans les pantoufles et avions «surmonté l'épreuve de ce virus». Dans notre esprit et dans les paroles au passé-composé de Simonetta Sommaruga. On nous souhaitait déjà un bel été avec un soulagement précoce, naïf, mais sincère.
Mais soit. On décompressera, notamment parce qu'on possède désormais deux cartouches d'un tout jeune vaccin dans le barillet, que la «situation est enviable» et qu’avec cet assouplissement XXL «on fait un pas courageux sans toutefois être téméraire». Avec ou sans phrase qui fait mouche, c'est bien le Conseil fédéral qui aura le plus à perdre si le virus et sa collection de variants venaient à gripper notre rentrée scolaire.
C'est un fait: on écarquille le pays alors que le variant Delta gronde. En silence chez nous (pour l'instant), dans la fureur ailleurs déjà. La course à l'immunité s’intensifie. Sans compter que les études concernant la contagion entre fêtards majeurs et vaccinés sont inexistantes.
Enfin, la chefferie fédérale «ne peut avouer qu’une seule fois s'être trompée», comme l'analysait pour watson le politologue René Knüsel il y a quelques semaines. Cette carte a déjà été jouée et la jauge de tolérance citoyenne est épuisée. Il faudra donc trouver mieux dans le cas d’une catastrophe bis en septembre. Et autre chose que le retour du masque en extérieur aux premiers brouillards de l'automne puisque, là, les données scientifiques ont toujours manqué pour pouvoir l'imposer à la population en bombant le torse.
Alors, oui, dès samedi, on renversera avec une allégresse un peu touchante notre Spritz à 16 balles sur une chemise voisine gorgée de cette bonne vieille sueur de discothèque. Mais cette fois avec un petit diable en Borsalino sur notre épaule, car il y a peu de chances qu’on sache tous aussi docilement se reprendre en septembre.