Suisse
Enfants

Pénurie de familles d'accueil: «Le système est saturé en Suisse»

Le canton de Vaud lance une campagne pour recruter 50 familles d’accueil pour répondre à l'augmentation des enfants ayant besoin de protection.
200 enfants sont actuellement placés dans les différentes familles d'accueil du canton de Vaud.Image: devenir-famille-accueil.ch

Pénurie de familles d'accueil: «Le système est saturé en Suisse»

En décembre dernier, le canton de Vaud a lancé un appel pour trouver 50 familles d'accueil, afin de répondre à l'augmentation du nombre d'enfants qui doivent être protégés. Comment expliquer une telle situation? Manon Schick, Directrice générale de la DGEJ, nous répond.
30.01.2024, 08:4030.01.2024, 12:42
Plus de «Suisse»

«Est-ce que quelqu'un comme vous peut aider quelqu'un comme moi?» peut-on lire sur les affiches de la campagne lancée en décembre 2023 par la Direction générale de l’enfance et de la jeunesse (DGEJ). Le but? Trouver cinquante familles d'accueil en 2024, car de plus en plus d'enfants ont besoin de mesures de protection.

Ce lundi 29 janvier a eu lieu la première séance d'information à destination de celles et ceux qui souhaiteraient déposer leur dossier. Une centaine de personnes se sont inscrites.

watson: Pourquoi y a-t-il un besoin urgent de familles d'accueil dans le canton de Vaud?
Manon Schick:
Parce que les familles d'accueil actuelles sont vieillissantes et que nous devons les renouveler. Une partie des personnes qui prennent en charge des enfants seront bientôt à la retraite. Plusieurs d'entre elles nous ont d'ailleurs dit qu'elles n'accueilleraient plus d'enfants en bas âge. Et c'est justement eux qui ont besoin de protection aujourd'hui.

«En effet, depuis environ deux ans, nous observons une augmentation du nombre d'enfants, principalement entre 0 et 4 ans, qui ont besoin de mesures de protection, car ils naissent dans des familles extrêmement précaires, où la mère souffre de problèmes de toxicomanie par exemple et où le père est souvent absent.»
Manon Schick, Directrice générale de la DGEJ.
Manon Schick, Directrice générale de la DGEJ.Image: ARC-Sieber

Comment expliquer cette augmentation?
La situation était déjà problématique avant la pandémie. Mais la crise sanitaire, les semi-confinements et aujourd'hui l'inflation sont autant de facteurs qui ont aggravé le cas de certaines personnes qui souffraient déjà d'une grande précarité et/ou de problèmes d'addictions. L'évolution démographique dans le canton de Vaud explique également l'augmentation des enfants qui doivent être placés. En 2018, 7000 enfants avaient un dossier ouvert à la DGEJ. En 2023, ils étaient 8000.

Actuellement, combien d'enfants en bas âge bénéficient de mesures de protection?
18 enfants – 13 de moins de 4 ans et 5 entre 4 et 8 ans – sont dans un foyer d'urgence. En temps normal, ils sont placés en famille d'accueil après quelques mois, parce qu'il est préférable à cet âge-là d'avoir une figure d'attachement unique et non plusieurs éducateurs qui défilent durant la journée.

«Aujourd'hui cependant, ces enfants sont en foyer depuis près d'une année»

Pourquoi ne sont-ils pas placés en famille d'accueil?
Nous sommes face à des situations familiales qui se sont tellement dégradées au fil des ans qu'une perspective d'un retour à domicile n'est pas envisageable. C'est pour cela que les enfants placés en famille d'accueil y restent pendant des années, voire jusqu'à leur majorité.

Avec quelles conséquences?

«Le système de prise en charge est saturé, dans le canton de Vaud comme ailleurs en Suisse»

Il n'y a plus de flux dans les foyers et cela créé des blocages. En ce moment, 200 enfants sont placés dans nos 190 familles d'accueil. 700 enfants sont placés dans les différentes institutions du canton de Vaud, qui compte normalement 750 places: une quarantaine sont gelées temporairement en raison du manque de personnel éducatif. Nous sommes réellement à la limite de nos capacités. Il est important de préciser qu'un enfant est d'abord placé en foyer d'urgence, puis en institution. Il sera placé en famille d'accueil si un retour dans la famille biologique n'est pas possible. Pour ce faire, des évaluations sont effectuées. Si les parents suivent une thérapie par exemple, un retour est envisageable au bout d'un certain temps.

Quels sont les critères à remplir pour accueillir un enfant chez soi?
Le processus de sélection dure quatre mois. Nous avons d'abord une séance d'information comme celle qui a eu lieu ce lundi soir. Une fois le dossier déposé, des personnes chargées de l'évaluation des milieux d'accueil font passer des entretiens à domicile.

Quelles sont les questions posées?
Par exemple, comment est-ce que la famille gère les situations avec des enfants difficiles, qui peuvent avoir de gros problèmes de santé, qui se réveillent la nuit, car ils ont été soumis à un fort stress? Il faut également s'assurer qu'il y a de la place pour une personne en plus dans la maison ou l'appartement.

«Nous rendons les gens attentifs au fait qu'accueillir un enfant est exigent et imprévisible: il peut rester quelques mois comme de nombreuses années. Si quelqu'un n'est pas prêt à s'engager sur le long terme, il ne faut pas se lancer.»
Manon Schick, Directrice générale de la DGEJ

Nous faisons aussi en sorte que le profil de l'enfant soit adapté à la famille. Par exemple, si des parents ont déjà des enfants en bas âge, ils ne vont pas accueillir un bébé. Quant à l'aspect financier, 850 francs sont actuellement versés pour le logement et la nourriture. Des factures doivent être faites pour les autres dépenses. Nous sommes toutefois en train de mettre en place un système de forfait. L'indemnité reçue sera plus élevée et devrait permettre de couvrir tous les frais. Durant toute la durée de l'accueil, les familles sont suivies et des contrôles sont effectués.

«Quant aux familles sélectionnées en ce début d'année, elles devraient être effectives d'ici cet été»
Le Covid-19 en Suisse, retour en images
1 / 17
Le Covid-19 en Suisse, retour en images
Le port du masque se généralise en Suisse et dans le monde au cours de l'année 2020.
source: keystone / jean-christophe bott
partager sur Facebookpartager sur X
Ceci pourrait également vous intéresser:
3 Commentaires
Comme nous voulons continuer à modérer personnellement les débats de commentaires, nous sommes obligés de fermer la fonction de commentaire 72 heures après la publication d’un article. Merci de votre compréhension!
3
Le côté «improvisé» des candidatures au Conseil fédéral agace
Le conseiller aux Etats socialiste Daniel Jositsch a critiqué les élections au Conseil fédéral, les qualifiant de «non démocratique». Un politologue et un membre du Parlement y voient effectivement des défauts considérables.

Le premier des innombrables SMS que reçoit le sénateur UDC Werner Salzmann arrive dès 5h37 jeudi matin. «Je suis totalement sur la ligne de Jositsch», lui écrit un collègue. «On a besoin de toi maintenant.»

L’article