Vous êtes 67% à ne pas vibrer pour l’Europe. Vous êtes 46%, une nette majorité, à préférer la formule des accords bilatéraux à tout autre modèle relationnel avec l’Union européenne (UE).
Mis en ligne mardi 15 juin, le jour du débat urgent au Conseil national suite à la rupture des négociations sur l’accord-cadre, notre questionnaire entendait mesurer la cote de l’Europe institutionnelle auprès des lectrices et lecteurs de watson. De vous. Nous vous remercions infiniment de votre participation à cette enquête, qui ne prétend pas être un sondage au sens strict du terme. Il n'empêche et nous le constatons: le désamour pour Bruxelles, siège de l’UE, est profond. Les pourcentages figurant dans cet article sont ceux relevés ce jour à midi.
«L’Europe n’a pas la cote. Par voie de conséquence, l’adhésion à l’UE non plus», en conclut logiquement Pascal Sciarini, professeur de sciences-politiques à l’Université de Genève, qui commente ci-après les résultats du questionnaire. L’option «adhésion à l’UE» ne remporte en effet que 14% des suffrages, en comparaison des 46% pour les bilatérales et des 23% en faveur d’une adhésion à l’Espace économique européen (EEE).
Quant à l'option «EEE», elle ne récolte aujourd'hui plus aucune majorité. Ni chez ceux qui avaient le droit de vote en 1992, ni chez ceux qui ne l'avaient pas ou n'étaient pas encore nés (respectivement, 53% et 59% de non).
Pourquoi ce désamour, côté romand, qui est aussi la base du lectorat de watson? Plusieurs raisons à cela. En voici quelques-unes, que détaille Pascal Sciarini:
Si les scores en faveur de l'adhésion à l'UE sont extrêmement faibles, tant auprès des personnes qui avaient le droit de vote en 1992 qu'auprès de celles qui ne l'avaient pas à cette époque ou n'étaient pas nées (20% dans les deux cas), Pascal Sciarini n'en déduit pas pour autant que tout est fini entre la Suisse et l'Europe.
«En additionnant les voix pour les bilatérales, celles pour l'EEE et celles pour l'UE, on obtient un total d'environ 80% d'individus qui ne sont pas prêts à abandonner toute relation avec l'Europe institutionnelle. C'est beaucoup. En comparaison, ils ne sont même pas 20% à vouloir que la Suisse se désengage totalement de cette relation», note le professeur de sciences-politiques. «De toute façon, reprend-il, la Suisse ne pourra pas se satisfaire du statu quo. Les accords bilatéraux devront être revus.»
Les raisons proposées pour expliquer le refus de toute forme d'adhésion, font apparaître, elles, deux motivations principales: un danger pour la démocratie directe, qui «n'y survivrait pas», et la crainte d'un alignement vers le bas des salaires suisses.
Quand on scrute les raisons de ce refus global, il saute aux yeux que l'image dégradée de la France agit sur nos consciences de Romands, alors que le poids de l'Allemagne, lui, ne nous fait pas peur. Le pays d'Angela Merkel reçoit même une forme de satisfecit. «Si vous aviez soumis votre questionnaire à un lectorat alémanique, la réponse vis-à-vis de l'Allemagne aurait sans doute été tout autre», sourit Pascal Sciarini. «Là encore, ajoute le professeur genevois, comme la Suisse alémanique, l'Allemagne, avec son sérieux, apparaît aux Romands comme un pôle de stabilité.»