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Directeur du Montreux jazz festival, Mathieu Jaton raconte l’événement

Mathieu Jaton, heureux de faire vibrer Montreux cet été.
Mathieu Jaton, heureux de faire vibrer Montreux cet été.keystone/mjf/Nicolas Zentner/watson

Les dessous du Montreux Jazz Festival, édition spéciale pandémie

Le Montreux Jazz Festival est bien là cette année, mais dans une configuration toute particulière, Covid oblige. L’événement sera quand même la grande bouffée d’air musical de l’été au bord du lac Léman. On a demandé à son boss, Mathieu Jaton, comment ça allait se passer.
01.06.2021, 10:5801.06.2021, 15:01
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C’est presque un petit miracle, un semblant de retour à la normalité après plus d’un an de quasi-néant musical: le 55e Montreux jazz festival (MJF) aura lieu du 2 au 17 juillet, alors que ses cousins de l’été – Paléo et Festi’Neuch en tête – ont jeté l’éponge. Lui a fait le pari d’exister. Pari en passe d’être gagné avant même le début de l’événement.

Tout le programme et nos coups de cœur 👇👇👇

Le directeur de la manifestation, Mathieu Jaton, est content. Très content. Même s’il reconnaît que son festival aura une saveur particulière en raison des mesures de lutte contre le coronavirus qui demeurent, surtout pour les grands événements comme le sien. Pour watson, il raconte comment il a réussi à mettre en place une telle fête. Interview!

Cette cuvée 2021 spéciale pandémie est-elle fidèle au standing du Montreux jazz festival (MJF)?
Mathieu Jaton: Oui et c’est ce qui me fait le plus plaisir. Nous avons réussi à proposer une programmation qui garde l’esprit du festival, sa recette: un mélange de grandes stars qui jouent dans des configurations uniques et exceptionnelles – Zucchero et Woodkid joueront sur le lac devant 500 personnes – de jeunes stars émergentes – Yseult, Nubya Garcia, Arlo Parks ou Altin Gün – et des petites pépites comme Alina Amuri, Nnavy ou Arma Jackson.

Avec la situation sanitaire mondiale, est-ce le mieux que vous pouviez imaginer?
C’est difficile à dire, car tous les systèmes de tournée sont complètement perturbés. Ce qui a été déterminant, c’est le charme de Montreux et cette scène sur le lac. Zucchero a été le premier à dire oui quand il a vu notre proposition. Il est ravi de venir jouer sur le lac, en acoustique, en mode «back to the roots». C’est la beauté de la crise: elle dégage une sorte de magie.

Montreux Jazz Festival 2021 croquis
Le croquis du site du festival, avec la scène sur le lac.Nicolas Zentner/MJF

Il y a deux mois, quand vous annonciez l’organisation de cette édition, où en étiez-vous avec la programmation?
Nulle part. Nous avions les artistes confirmés pour l’édition 2021 «normale», qui a été balayée. Certains, comme Ibrahim Maalouf et Woodkid, avaient prévu de très gros shows à l’Auditorium Stravinski. Quand nous leur avons présenté la scène du lac, ils ont adoré et sont aujourd’hui ravis de venir avec un spectacle adapté. Ce ne serait pas possible sans la confiance qu’ils nous témoignent.

Concrètement, comment fait-on avec les artistes? Faut-il les contacter pour un festival dont on n’est pas certain qu’il aura lieu?
C’est sport! Nous avons trouvé une façon d’être agiles pour ne pas subir les décisions politiques. Ce n’est pas évident, mais, en avril, nous sentions que proposer une scène de 500 places était raisonnable.

«Dès ce moment, nous avons rappelé tous les artistes en un temps record: ce que nous faisons habituellement en six mois, nous l’avons fait en un mois»
Mathieu Jaton

Vous avez fait un pari et vous l’avez gagné, avant même le début du festival?
Oui effectivement. Mais le MJF est organisé dans un contexte urbain, avec des capacités limitées. Contrairement à d’autres, il a été plus simple de faire une configuration modulable. Par contre, il y a encore des inconnues quant aux futures décisions politiques ou la façon dont nous allons appliquer les règles, comme les tests, les certificats, les contrôles…

Il y aura de nouvelles annonces le 11 juin pour une entrée en vigueur le 23. Nous serons sur le fil du rasoir jusqu’au bout. Et puis, il y a toujours des risques, par exemple d’un variant du virus qui bloque des artistes dans un pays, etc. Il y a des clauses Covid dans tous les contrats.

Est-ce que beaucoup d’artistes vous ont dit non?
Pas vraiment. Il y a certaines choses qu’on a essayé qui n’ont finalement pas marché, certains artistes ont renoncé à tourner. D’autres choses ont marché et font très plaisir.

Avec les masques, les certificats, les contrôles et les inscriptions pour les scènes gratuites, comment sera l’ambiance au MJF cette année?
Il faut être très clair: l’ambiance ne sera pas celle qu’on connait d’habitude. Celle où l’on circule sur les quais, où l’on prend une bière, où l’on va voir un concert à gauche et à droite dans la plus grande liberté.

«Le public doit être conscient que pour aller dans les espaces du festival, il faudra être tracé, contrôlé, etc. Surtout, la notion des quais déambulatoires n’existera pas»
Mathieu Jaton

Certes, il y a une partie gratuite, de la musique en extérieur et en intérieur, mais il y aura des contraintes. L’inscription pour les scènes gratuites, c’est surtout pour éviter des frustrations. Nous ne voulons pas qu’une personne vienne de loin et qu’elle se retrouve devant un événement complet sans alternative comme les autres années. Nous préférons des gens frustrés online que des gens frustrés devant les portes du festival. C’est le système choisi puis on verra si on peut alléger selon les décisions politiques de juin.

Il y a quand même toujours beaucoup de monde qui flâne, qui traine à Montreux lors du festival. Dites-vous donc à tout le monde de ne pas venir sans billet ou inscription?
C’est clairement le message. Ça ne sert à rien d’essayer de venir le soir lors des concerts: les quais seront fermés et même les bateaux ne pourront pas approcher depuis le lac.

Est-ce que des idées développées pour cette édition vont rester dans le futur?
Depuis le début de la crise, tout ce que nous avons fait l’a été dans une idée de développement. Nous ne voulions pas d’un sparadrap pour la crise. La configuration du Montreux Palace et des jardins ont été pensés l’année passée. La scène du lac est expérimentale et pourrait être utilisée dans le futur. Je rappelle qu’en 2024, il y a les travaux au Centre des congrès et le MJF va devoir trouver des solutions.

Est-ce que c’est l’aide financière de la Confédération (le «parapluie de protection» voté par le Parlement pour favoriser l’organisation d’événement) qui permet cette édition?
Non, cette aide est une garantie supplémentaire. Par exemple, s’il y a un variant qui pose de gros problèmes et qui pousse le Conseil fédéral à tirer la prise fin juin, nous ne perdrons que plusieurs centaines de milliers de francs.

Sans cette garantie, auriez-vous quand même lancé la machine MJF cette année?
Je suis suffisamment fou pour dire que oui.

Dans tous les cas, l’édition 2021 sera-t-elle à perte?
C’est certain. Cette année, notre modèle économique est complètement différent. Normalement, notre budget provient à 45% de la billetterie, 25% des ventes de boissons et alimentations et 25% du sponsoring. Pour 2021, nous sommes respectivement à 10%, 5% mais prêt de 50 % de sponsoring.

Nous espérons recevoir une couverture de déficit du canton selon le principe d’indemnisation jusqu’à concurrence maximale de 80% de la perte résiduel. Mais ce n’est pas une garantie: une fois l’édition terminée, il faudra déposer un dossier.

Est-ce que la disparition du MJF vous a traversé l’esprit?
Je pense que ça a traversé l’esprit de tous les acteurs culturels. Mais pour moi, c’est inimaginable et je chercherai toutes les solutions pour faire en sorte que le MJF survive. La différence cette année, c’est que personne ne maîtrise le risque pandémique. En plus, il a une dimension géopolitique: si demain, les Etats-Unis décident de placer la Suisse sur liste rouge, nous sommes bien embêtés.

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