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La France cause d’islam, Neuchâtel vote dimanche sur les religions

Une personne hisse sur le toit du Grand Conseil, entre La Collegiale et le Chateau, un drapeau jaune symbolisant une hausse des contaminations dans le canton de Neuchatel lors de la pandemie de Corona ...
La collégiale de Neuchâtel.Image: KEYSTONE

La France cause d’islam, Neuchâtel vote sur les religions

Les Neuchâtelois se prononcent dimanche par référendum sur une loi combattue par le PLR et l'UDC. Le texte controversé accorde au seul parlement cantonal le droit de reconnaître un intérêt public aux communautés religieuses.
25.09.2021, 08:0727.09.2021, 08:07
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Jeudi soir, à sept mois de l’élection présidentielle en France, nous devions être quelques-uns en Suisse romande à regarder comme un spectacle le duel Zemmour-Mélenchon. Un débat en grande partie consacré à l’islam, à la demande du premier et toujours pas candidat déclaré, résolument engagé dans la thématique identitaire. Dimanche, dans le canton de Neuchâtel, les citoyens se prononceront par référendum et sans effets de manche sur une matière cependant délicate, les religions.

La population neuchâteloise dira si elle accepte ou non la loi sur la reconnaissance des communautés religieuses (LRCR). Le PLR et l’UDC, deux partis de droite, ont voulu ce référendum suite à l’approbation, en 2020, par le Grand Conseil, de cette nouvelle législation.

L'année 1941

Bref rappel historique. En 1941, le canton de Neuchâtel, bien que laïque, reconnaissait à trois Eglises un statut d’intérêt public: la protestante, la catholique romaine, la catholique chrétienne. Souhaitant élargir ce droit à d’autres confessions qui pourraient demander à en bénéficier, le constituant neuchâtelois a introduit en 2000 un article en ce sens. C’est seulement une quinzaine d’années plus tard qu’un projet de loi relatif à cette disposition constitutionnelle est apparu au parlement cantonal.

Si le «oui» l’emporte dimanche, musulmans (7000 dans le canton de Neuchâtel), évangéliques (5000) et juifs (1500), ou toute autre catégorie de fidèles, pourront accéder à ce statut offrant certains avantages. Entre autres, la récolte d’un impôt ecclésiastique facultatif, organisée par les services cantonaux chargés de cet office.

«Un référendum de troisième classe»

En cas de «oui» toujours, le Grand Conseil sera compétent pour décider de la reconnaissance ou non de l’intérêt public d'une ou plusieurs communautés religieuses, en fonction d’un certain nombre de critères. Parmi ceux-ci, «une transparence complète sur les activités de la communauté», ainsi qu’«une implantation de longue date dans le canton». Un décret suffira. Seul un référendum exigé par trente députés pourrait en empêcher ou en retarder l’application.

Ce «référendum de troisième classe», comme l’appelle Jean-Daniel Jeanneret, vice-président du PLR neuchâtelois, est pour beaucoup dans le lancement du processus référendaire qui sera tranché dimanche en votation.

«En l’espèce, notre préférence allait à un référendum obligatoire, mais nous nous serions contentés d’un référendum facultatif. Etant donné le caractère délicat des questions religieuses, l’option retenue par la loi est stigmatisante pour les trente députés qui demanderaient l’organisation d’un référendum. Ils pourraient être accusés d'islamophobie ou d'antisémitisme, selon les cas, par exemple.»
Jean-Daniel Jeanneret, vice-président du PLR neuchâtelois

Ça pourrait déraper

Soit, mais, dans ce cas, pourquoi opter pour le référendum obligatoire ou facultatif, si ces sujets-là sont à ce point sensibles? C'est l'objection faite aux référendaires par les partisans de la loi, au rang desquels les socialistes et une personnalité comme l'ancien chef de la police cantonale neuchâteloise, André Duvillard. Toute consultation populaire sur ces thèmes entraînerait des dérapages, craignent-ils.

Jean-Daniel Jeanneret empoigne le problème par l’autre bout: «C’est précisément parce que la question des religions est sensible qu’il ne faut pas laisser le parlement seul compétent en la matière. On pourrait lui reprocher de vouloir passer en force, alors que, je le rappelle, l'intérêt public est ici en jeu. D'où la nécessité de prévoir la possibilité au moins du référendum facultatif», réplique le vice-président du PLR neuchâtelois et membre du comité référendaire. En tout cas, si les citoyens disent «non» dimanche, il y a des chances pour que le Grand Conseil revoie sa copie.

L'UDC plaide la laïcité

«Pas question!», avertit l’UDC, minoritaire au Grand Conseil neuchâtelois avec seulement huit députés sur cent. Alors que les libéraux-radicaux invoquent des principes d’égalité, les nouvelles communautés n’étant pas soumises à la totalité du parcours législatif accompli il y a longtemps de cela par leurs trois devancières, les démocrates du centre placent la «paix sociale» au centre des leurs arguments. Ils ne veulent ni de cette loi, ni d'une autre.

Président du groupe UDC au Grand Conseil, Niels Rosselet-Christ plaide la «laïcité»:

«Nous avions déposé deux amendements lors de l’élaboration de la loi, ils ont été rejetés. L’un demandait à ce que les communautés religieuses reconnues par la nouvelle loi ne puissent pas avoir accès aux infrastructures publiques telles que les écoles. L’autre, que les prêches soient prononcés dans l’une des langues nationales suisses.»
Niels Rosselet-Christ

Certains propos musulmans visés

Niels Rosselet-Christ le reconnaît, ce deuxième amendement visait plus spécialement la pratique musulmane. «Exiger des prêches en français, c’est mieux se prémunir contre l'éventualité toujours possible de paroles violentes.»

Cet amendement-là, le PLR l'avait rejeté. «Ce qui compte, ce sont les règles du jeu, pas les équipes qui jouent sur le terrain ensuite», estime d'une formule Jean-Daniel Jeanneret. «Et puis, ajoute-t-il, on pourrait tout à fait comprendre qu’une communauté érythréenne catholique ait ses prêches dans la langue d’origine.» Cette dernière remarque pourra paraître contradictoire avec l’une des conditions posées par LRCR. Laquelle enjoint à «la maîtrise de la langue française afin de permettre les échanges avec l’État et avec les autres communautés.»

«Décidément, on ne tend pas la main à la communauté musulmane», se désolait en octobre 2020 Jamel Cherif, vice-président et porte-parole de l’Union neuchâteloise des organisations musulmanes, cité par le site Réformes.ch. «Si la voix politique était choisie plutôt que la voix administrative, nous subirions une décision politique relevant d’un débat public, avec toute la stigmatisation que cela implique», estimait-il alors (watson a tenté sans succès de joindre Jamel Cherif vendredi après-midi).

La communauté musulmane, à tout le moins certains de ses porte-parole, pense qu'une reconnaissance institutionnelle lui permettrait d'être davantage intégrée et acceptée par l'ensemble de la population.

A distance des passions françaises

En 2019, le canton de Neuchâtel, plus précisément le Musée des civilisations de l’islam à La-Chaux-de-Fonds, avait été cité par les «Qatar Papers». Une enquête des journalistes français Georges Malbrunot et Christian Chesnot qui mettait en lumières des financements qataris, soupçonnés d'être liés à la mouvance des Frères musulmans.

Les passions françaises influenceront-elles d'une façon ou d'une autre sur le vote de dimanche? Les référendaires neuchâtelois disent vouloir s'en tenir à bonne distance. En mars dernier, le canton de Neuchâtel avait accepté à 52% l'initiative contre le voile islamique intégral. La présente votation porte, elle, sur plusieurs religions. Celles dites des «autres». Des autres à présent d'ici, parfois depuis très longtemps.

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