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Pourquoi la Suisse est-elle à la traîne face aux statistiques du Covid?

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Image: Shutterstock

La Suisse à la traîne contre le Covid: «On n’est pas assez solidaires»

Habituée à occuper les premières places de comparaisons internationales, la Suisse est pourtant reléguée en bas des classements Covid. Comment l'expliquer et, surtout, doit-on s'en inquiéter? Pour l'infectiologue Didier Pittet, les Helvètes paient leur «manque de solidarité».
31.08.2021, 05:4331.08.2021, 15:01
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Si on en croit les classements, la Suisse est à la traîne dans sa gestion du Covid. En comparaison avec nos voisins d'Europe de l'Ouest, la Confédération a le plus faible taux de personnes vaccinées (seuls 56% des Helvètes ont reçu leur première dose contre 83% des Portugais, par exemple).

Et que l'on parle du nombre de morts, d'hospitalisations ou de cas par million d'habitants ou même du pourcentage de tests positifs, le constat est toujours le même. Quand la Suisse n'a pas le bonnet d'âne, elle se hisse, au mieux, en milieu de classement. Alors comment expliquer de tels résultats de la part d'un pays qui nous a habitué à squatter les podiums?

Les Suisses, mauvais élèves de la vaccination

«J'ai presque honte que l'on se retrouve dans cette situation, alors qu'on avait tout pour bien faire», déplore Didier Pittet, médecin chef du service de prévention des infections aux HUG. Le spécialiste a des mots forts envers la partie de la population qui fait preuve, selon lui, d'un «manque de solidarité» et d'une «attitude individualiste».

«La Suisse est un pays de nantis, on a tout, on ne se rend pas compte des difficultés des autres pays. Peut-être qu'on est trop gâtés, on se sent moins concernés»
Didier Pittet, infectiologue

Et si Didier Pittet se dit déçu de ces statistiques, il n'est pas entièrement surpris. «En Suisse, beaucoup de personnes sont réticentes à la vaccination. On est, par exemple, les plus mauvais élèves en Europe en ce qui concerne la vaccination contre la rougeole.»

Au-delà des aspects individuels, le spécialiste pointe également deux difficultés de la gestion helvétique de la pandémie. «On a moins bien géré la deuxième vague parce qu'on a souffert de notre fédéralisme. On a eu du mal à mettre les cantons ensemble pour travailler de concert, et chacun a fait des efforts différents.»

«Ce retard, on va avoir de la peine à le compenser»
Didier Pittet

Didier Pittet regrette aussi un manque d'originalité dans la promotion de la campagne de vaccination et une absence de différenciation entre les publics-cibles. «On ne peut pas s'adresser de la même manière aux plus de 80 ans qu'aux adolescents!»

L'infectiologue genevois invite donc à une prise de conscience rapide. «Il faut tirer les leçons de tout cela et se dépêcher de changer de cap, sinon l'automne va être compliqué.»

On est dernier, et alors?

Vaccinologue et expert auprès de la plateforme Info-Vacs, Alessandro Diana observe que la Confédération a beaucoup misé sur l'autodétermination de ses citoyens. «On est beaucoup plus libéraux ici que chez nos voisins. Si on compare, les autorités nous ont donné moins de contraintes, même si certains en ressentent», détaille-t-il.

«On n'a pas connu les morts des Italiens ou le confinement des Français. La conséquence, c'est que notre perception du danger est moindre qu'ailleurs»
Alessandro Diana

Mais le spécialiste préconise de ne pas trop s'attarder sur les classements internationaux. «A-t-on vraiment besoin d'être sur le podium? En réalité, ce qui compte pour le Conseil fédéral, c'est d'éviter la surcharge du système sanitaire. C'est le fil rouge de toutes les décisions politiques.»

Alessandro Diana rappelle également que la pandémie n'est pas encore finie. «Pour le moment, ce ne sont que des données intermédiaires. Il faudra refaire un point en fin d'année, mais aussi dans dix ans, pour tirer un bilan plus large.»

La Suisse pourrait sortir gagnante du Covid

Infectiologue à Unisanté, Valérie d'Acremont va dans le même sens. Si elle regrette le retard helvétique en termes de couverture vaccinale, elle voit plutôt d'un œil positif les autres comparaisons internationales. «C'est bon signe pour moi parce que cela montre que l'on n'est pas dans l'extrême. Ces classements ne sont faits qu'avec une vision unique: la lutte contre le virus.»

«Il n'y a pas que le Covid dans la vie. Il faut aussi s'intéresser à l'impact global de la pandémie sur la population»
Valérie d'Acremont, professeure à l'Université de Lausanne

À ses yeux, le Conseil fédéral a su faire la balance entre les différents intérêts de la population: «Les mesures drastiques peuvent faire plus de mal que de bien.»

Ainsi, à moyen terme, la Suisse pourrait bien sortir gagnante, en comparaison internationale, de la pandémie, par exemple en ce qui concerne le développement psychologique de la jeune génération, le taux de chômage ou l'espérance de vie. «Mais il est plus difficile de chiffrer le bien-être que le virus.»

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