Le trouble du déficit de l'attention (TDHA) se manifeste chez les garçons par une agitation et une bougeotte continue en salle de classe, par exemple, ou par des crises de colère régulières. Chez les filles et les femmes en revanche, les symptômes ne sont pas les mêmes, raison pour laquelle le chemin jusqu'au diagnostic est souvent semé d'embûches pour elles.
Selon Sandra Kooij, psychiatre hollandaise et chercheuse sur le TDAH, 3 à 5% des personnes souffrent de TDAH. A l'âge adulte, il y a autant d'hommes que de femmes.
Selon le système de classification des troubles mentaux DSM-5, le trouble TDHA se caractérise par l'apparition des symptômes avant l'âge de douze ans. La déficience due aux symptômes commence quant à elle avant l'âge de 18 ans. Mais ceci n'est pas le cas chez tous les enfants et adolescents.
Sur la base d'études épidémiologiques, la recherche part du principe que deux à trois fois plus de garçons que de filles sont diagnostiqués. Cette différence entre les genres est étayée par l'enquête 2018 auprès des élèves suisses dans le cadre de l'étude HBSC, menée par Addiction Suisse: 5,9% des garçons interrogés ont indiqué avoir reçu un diagnostic médical de TDAH. Chez les filles, ce chiffre n'était que de 2,6%. Pourquoi?
Jusqu'à il y a un peu plus de dix ans, la recherche partait du principe que ce trouble du comportement touchait surtout les garçons:
De ce fait, les femmes ne sont souvent pas diagnostiquées ou le sont de manière erronée, car leurs symptômes se manifestent différemment de ceux des hommes.
Les femmes et les filles sont souvent inattentives. Cela signifie qu'elles sont rêveuses, calmes, distraites – et qu'elles se fondent dans les salles de classe. Selon Sandra Kooij:
Mais même si les filles sont hyperactives, elles se comportent différemment des garçons. Elles parlent beaucoup et ont un caractère pétillant. Sur le site web TDAH et femmes, Jana Engel, médecin spécialiste en psychiatrie et psychothérapie, écrit:
Sandra Kooij ajoute: «Les filles atteintes de TDAH ne dérangent souvent personne d'autre qu'elles-mêmes».
Les filles développeraient ainsi différentes stratégies d'adaptation, qui peuvent fonctionner pendant un certain temps, et qui s'effondrent généralement lorsqu'elles entament des études ou quittent la maison. En effet, les parents ne sont plus là pour s'occuper des tâches quotidiennes: c'est à elles désormais de tout prendre en charge.
Les femmes concernées sont dépassées et se perdent dans le chaos. Elles interrompent par exemple leur formation ou travaillent souvent plus longtemps, en cachette, pour pouvoir tout faire. Sandra Kooij explique:
Beaucoup de ces femmes par exemple se torturent au travail, jusqu'à la dépression d'épuisement.
Arrivés à ce stade, beaucoup demandent de l'aide. Seulement, «les connaissances spécialisées font défaut», selon Sandra Kooij. De nombreuses femmes sont diagnostiquées à tort ou seulement avec une dépression ou un trouble anxieux. «Si le médecin ne reconnaît pas le problème sous-jacent, la femme ne reçoit pas l'aide adéquate», poursuit-elle.
Heureusement, les diagnostics chez les hommes et les femmes s'égalisent une fois arrivés à l'âge adulte, et les symptômes sont reconnus chez tous. Par exemple, les troubles importants de l'attention et de la concentration, une forte impulsivité et une agitation physique et psychique prononcée.
Les hormones jouent toutefois toujours un rôle. En effet, une étude de 2021 à laquelle Sandra Kooij a participé, a pu démontrer que la semaine précédant les règles, la période suivant immédiatement une grossesse ainsi que la ménopause, ont une influence renforçante sur l'humeur et les symptômes du TDAH, car le taux d'œstrogènes diminue pendant ces périodes.
L'hormone sexuelle féminine aurait, dans le cerveau, des fonctions similaires à celles de la dopamine, l'hormone du bonheur. Sandra Kooij explique:
De plus, si le taux d’œstrogènes baisse lui aussi, il y aura de fortes conséquences, comme par exemple encore plus impulsives, du mal à se concentrer ou à dormir. Les femmes pourraient également être confrontées à des accès de colère, de la dépression et de l'anxiété.
En revanche, les effets avant la menstruation et après la grossesse sont courts par rapport à la ménopause, notamment parce que celle-ci dure environ dix ans.
En plus de la médication habituelle contre le TDAH, les femmes peuvent avoir besoin d'un soutien médical supplémentaire, comme une thérapie hormonale par exemple, voire parfois d'antidépresseurs.
La psychiatre Sandra Kooij souhaite que le sujet soit abordé plus ouvertement, afin que les femmes puissent bénéficier d'un soutien et de traitements: «Vous pourrez alors vous épanouir dans vos talents au lieu de souffrir». (aargauerzeitung.ch)