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Suisse: «du porno en classe? Hors de question!»

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«Montrer du porno en classe? Hors de question!»

Un sexologue bâlois propose de montrer du porno directement en classe afin d’enseigner la bonne manière de l’aborder. Cette est idée vivement critiquée. Cela, alors même que de nombreux jeunes de moins de 16 ans en consomment déjà à la maison.
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04.07.2021, 08:1104.07.2021, 17:03
Vanessa Hann
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Il n’a jamais été aussi facile d’accéder à des vidéos pornographiques. Quelques clics sur le téléphone suffisent, ou même des films ou des photos à caractère sexuel sont accessibles.

Johannes Bitzer, sexologue à Bâle, estime qu’il existe un grand besoin d’éducation dans ce domaine. Dans une étude parue dans le bulletin de Sanitas «Health Forecast», un gynécologue écrit ceci:

« Les jeunes doivent apprendre à utiliser ces contenus. Nous recommandons aussi aux enseignants de parler de la pornographie à l’école ou de regarder un film avec leurs élèves»

Le sexologue Johannes Bitzer, qui mène des recherches sur le sujet avec ses pairs, considère que la représentation irréaliste de l’image du corps et de la sexualité dans les films pornographiques est particulièrement problématique. Il a déclaré à Tamedia: «Lorsqu'un adolescent regarde ces films seul, il n’a pas de possibilité de réflexion interactive avec d’autres personnes.» Bien qu'il soit possible d'en discuter plus tard, il serait préférable d’aborder de manière critique l'image déformée que ces films véhiculent.

Montrer du porno aux enfants est interdit
Toute personne qui montre, transmet ou rend accessible de toute autre manière du matériel pornographique à des enfants et des jeunes de moins de 16 ans est passible de poursuites. C'est ce que prévoit l'article 197 du code pénal relatif à la «protection des mineurs.» Par conséquent, d'un point de vue juridique, la proposition du sexologue Johannes Bitzer serait en principe irrecevable. Toutefois, cette disposition s'applique également aux jeunes eux-mêmes, ce que beaucoup ignorent.

Ce qu'en pensent les profs

Patrick Keller, professeur dans un lycée saint-gallois est plutôt d’un avis contraire à celui du sexologue. «Je ne montrerai jamais du porno en classe, c’est hors de question.»

Dans les cours d’éducation sexuelle, il aborde les images du genre et du corps qui sont en partie véhiculées par ces films.

«Je demande aux élèves s'ils ont déjà vu du porno et je leur précise que la façon dont l'image des femmes et des hommes qui y est véhiculée ne correspond pas à la réalité»
Patrick Keller, professeur dans un lycée saint-gallois

Patrick Keller parle également des intervenants en travail social de l’école. Dans les classes séparées par sexe, les élèves peuvent poser des questions à une personne neutre. A ses yeux, les enfants et les adolescents sont suffisamment sensibilisés.

Délinquants à cause du porno?

On n'y pense pas forcément. Mais l'interdiction de montrer du matériel pornographique aux adolescents et aux enfants représente un danger pour les mineurs eux-mêmes.

Et pour cause. Si un adolescent montre ou transmet du matériel pornographique à d'autres ados de moins de 16 ans, il est lui aussi passible de poursuites. Cela semble se produire de plus en plus ces dernières années. Le nombre de jeunes condamnés pour délinquance dans ce domaine a d'ailleurs explosé ces deux dernières années.

Les experts devraient aussi intervenir

Gabriela Heimgartner, membre de l'association de parents «Schule Elternhaus» est choquée que ces infractions aient autant augmenté. De même, elle précise:

«Beaucoup de jeunes ne savent pas ce qui est punissable. Si vous dites simplement: «Vous n'êtes pas autorisé à envoyer de telles vidéos», cela peut aussi jouer un rôle par rapport aux nombres d’infractions.»

Selon elle, il serait aussi préférable que les écoles disposent d'experts externes pour fournir des informations sur le sexe et les réseaux sociaux. «À mon avis, les enseignants le font encore trop souvent. Les professionnels sont, quant à eux, beaucoup mieux informés sur la rapidité avec laquelle on peut obtenir ce matériel sur Internet et sur ce qui encourage les jeunes à le transmettre.» Gabriela Heimgartner pense également qu’il est plus aisé pour les étudiants de parler à un spécialiste externe de leurs expériences en matière de pornographie et de sexualité.

Beaucoup d'éducation sexuelle

En Suisse alémanique, les enseignants sont souvent libres de choisir s'ils veulent faire appel à un spécialiste pour enseigner l'éducation sexuelle. En outre, l'éducation sexuelle est enseignée conformément aux exigences du «Lehrplan 2 » (ndlr. Programme d’études de la scolarité obligatoire commun à toutes les écoles germanophones publiques de Suisse). Ce plan d’études fournit des objectifs au sujet de ce que les enfants devraient apprendre sur la sexualité. L'éducation sexuelle commence en cinquième année et est prolongée dans les classes supérieures. Cela, notamment ces matières :

  • «Nature, homme, société»: Compréhension du développement de son propre corps et réflexion à propos des liens entre amitié, amour et sexualité.
  • «Nature et technologie»: Connaissances de base, adaptées à l’âge, de la reproduction humaine ainsi que des maladies sexuellement transmissibles et des méthodes contraceptives.
  • «Éthique, religions, communauté»: Réflexions sur les relations, à l'amour et à la sexualité ; évaluation de nos responsabilités.

Cette séparation des sujets signifie-t-elle que nous ne savons pas comment traiter les images pornographiques sur Internet? Non, répond Franziska Peterhans, de l'Association suisse des enseignants. «Le sujet est simplement abordé avec des accents différents».

Pour elle, il faut faire appel à des experts externes pour enseigner l'éducation sexuelle. Toutefois, elle ne considère pas la pornographie comme un matériel pédagogique.

Éducation sexuelle: le dessin au lieu du porno

Lilo Gander, membre du centre spécialisé dans l’éducation et le conseil en matière de sexualité «Lust und Frust», est d'accord avec Franziska Peterhans:

«Cela fait partie du travail d'éduquer les enfants à la pornographie. Mais cet enseignement est également possible sans montrer de vidéos et de photos pornographiques»

Les enseignants demandent au centre spécialisé de donner des cours d'éducation sexuelle. Dans les leçons complémentaires de quatre leçons par classe, l'objectif est de répondre aux questions. Une question est particulièrement importante pour les jeunes: «Suis-je normal ?» Les jeunes veulent savoir si leur corps se développe normalement et se comparent souvent aux images qu'ils voient», explique Lilo Gander.

Le matériel pornographique est particulièrement dangereux. Souvent, les jeunes se demandent si leur zone génitale devrait toujours être rasée ou si leurs pénis devrait avoir une certaine longueur, comme sur les images pornographiques. «Avec l’éducation sexuelle, on peut très bien travailler avec des conversations, des dessins ou des images publicitaires et expliquer les aspects scénarisés et irréels du porno. »Interrogé sur les nombreuses infractions commises à cause de la pornographie, Lilo Gander déclare:

«Oui, de nombreux jeunes ne sont pas conscients qu'ils commettent des infractions s'ils transmettent des contenus pornographiques à leurs amis.» C'est pourquoi, dit-il, l'enseignement de l'éducation sexuelle comprend des informations sur les droits et la loi. « Avec le Lehrplan21, nous sommes sur une bonne voie. L'éducation sexuelle dans les écoles reste nécessaire.»
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