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«A cause du Covid, on a une génération de chiens à problèmes»

Chouchoutés pendant la généralisation du télétravail, les chiens se sentent esseulés à présent.
Chouchoutés pendant la généralisation du télétravail, les chiens se sentent esseulés à présent.

«A cause du Covid, on a une génération de chiens à problèmes»

De plus en plus de chiens souffrent de solitude et de l'angoisse de la séparation. La faute à la généralisation du télétravail en 2020, puis au retour massif au bureau. Un choc pour nos amis poilus qui sont perdus et se sentent délaissés.
17.11.2021, 07:2117.11.2021, 07:52
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Dans le jargon des éducateurs canins et des comportementalistes, on les appelle les «chiens Covid». Non pas parce qu'ils ont contracté la fameuse maladie, mais à cause de troubles de l'attachement dont ils souffrent. Selon les spécialistes, depuis que le Covid a commencé à bouleverser le quotidien de la planète, des symptômes d'une ampleur inégalée ont été constatés chez les canidés.

Présidente de la Fédération romande de cynologie, Gina Métrailler explique comment on en est arrivé là:

«Dès le printemps 2020, avec le télétravail, les chiens se sont habitués à passer leurs journées en compagnie de leurs maîtres. Parfois, sans aucun moment de solitude. Et du jour au lendemain, c'est le retour au bureau. Les chiens sont perdus.»
Gina Métrailler présidente de la Fédération romande de cynologie

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Natacha*, une Vaudoise d'une trentaine d'années, sait à présent ce qu'est un chien Covid. «Les voisins m'ont signalé que mon chien hurlait à la mort durant mon absence. Au début, raconte la trentenaire, j'étais incrédule car, normalement, il est tout calme. Mais quand j'ai reçu une lettre d'avertissement de la régie, j'ai fait appel à une comportementaliste. Elle m'a dit que l'animal souffrait de l'angoisse de la séparation.»

Malheureusement pour Natacha, malgré la thérapie mise en place, les aboiements intempestifs n'ont pas cessé. La mort dans l'âme, elle a dû se séparer de son compagnon à quatre pattes. Un mal pour un bien: l'animal a été recueilli par une retraitée.

Peur de la solitude

Cette problématique de l'angoisse de la séparation, la fondation QUATTRE PATTES Suisse la connaît bien. «Après un contact étroit avec le maître, quand le chien est contraint de passer du temps sans la compagnie ou l'attention de sa famille humaine, il a peur de rester seul», analyse Livie Kundert, chargée de campagne pour l’organisation de protection des animaux basée à Zurich. «Les animaux les plus affectés sont les chiens qui manquent de confiance en eux et qui sont craintifs. L'angoisse de la séparation est une des raisons qui poussent les maîtres à les confier à des refuges», poursuit Livie Kundert.

«L'anxiété provoquée par la séparation peut entraîner un comportement destructeur. Les animaux causent des dommages, font leurs besoins dans la maison et/ou aboient continuellement jusqu'au retour de leur maître»
Livie Kundert chargée de compagne chez Quatre pattes suisse

D'une dizaine de cas par an à deux par semaine

Présidente et fondatrice de l'association SOS chiens polaires, Carine Mettraux-Pousaz indique que faute de place, sa structure doit refuser un à deux chiens abandonnés par semaine. «Avant le Covid, c'était une dizaine de cas par an», signale-t-elle. «Dernièrement, une jeune femme m'a dit «Je veux adopter un chien car je suis en télétravail». Et quand je lui ai demandé comment elle ferait à la fin du télétravail, elle a bafouillé», regrette Carine Mettraux-Pousaz.

«Je n'ai jamais été autant confronté à des chiens avec des problèmes d'agressivité, de stress ou de mauvaise gestion des émotions»
Garry Durusseléducateur canin

Socialisation défaillante

La doctoresse et vétérinaire comportementaliste Colette Pillonel relève qu'en dehors des troubles de la solitude, il y a un problème de «socialisation insuffisante».

«A cause du Covid, on a une génération de chiens à problèmes. Surtout ceux acquis en 2020 et qui n'ont été socialisés ni avec les gens ni avec d'autres chiens. Après, c'est la croix et la bannière»
Colette Pillonel vétérinaire comportementaliste

Les chats aussi

Mais les chiens n'ont pas le monopole du cœur. Comme le souligne Colette Pillonel, les chats font également partie du lot des animaux Covid. Car, contrairement à ce que l'on pourrait croire, «pour le chat aussi, la relation à l'humain est très importante». Ainsi, en se retrouvant tout d'un coup seul dans un appartement, certains félins ont développé des tendances dépressives. Une dépression qui «dépend du lieu, du mode de détention et de l'intensité du changement des interactions avec le maître», note l'experte fribourgeoise.

Souffrance plurielle

De fil en aiguille, la souffrance affective des animaux provoque aussi celle de leurs maîtres. Comble du paradoxe, à l'origine de ce cercle vicieux, il y a une relation saine, pleine et entière entre l'animal et son propriétaire. Comme quoi, l'enfer est pavé de bonnes intentions.

*Prénom d'emprunt

Au bureau avec le chien?
L'association QUATRE PATTES Suisse conseille aux propriétaires d'emmener leur chien au travail pour autant que les lieux soient adaptés. Réduction du stress, augmentation des capacités cognitives des collègues et des interactions sociales, lutte contre la dépression et l'anxiété sont, selon l'association, autant de bienfaits procurés par une telle compagnie. A défaut de pouvoir partager domicile et lieu de travail avec son chien, QUATRE PATTES suggère le recours à un dog sitter. Autre conseil et non des moindres, même s'il ne faut pas laisser le chien toute la journée seul à la maison, vous pouvez l'habituer à y rester quelques heures en votre absence. Pour couronner le tout, il y a toute une panoplie de conseils sur notre site.
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