«Dimanche noir pour la presse», la «solitude des médias», «le journalisme en danger»: la presse suisse relève un rejet «attendu» dimanche des aides fédérales à la presse. Elle appelle toutefois les autorités à revenir à la charge, en tenant compte des critiques.
Le journal jurassien pointe les grands éditeurs du pays. «Sans ces passagers de première classe, il est fort probable que le navire d'aides fédérales aux médias serait arrivé à bon port hier».
Il relève aussi un «nein» alémanique imposé au reste du pays, qui s'explique «par la présence des grands éditeurs du pays à Zurich, le poids de l'UDC, la manière de concevoir l'aide de l'Etat et l'environnement médiatique différent de celui de la Suisse romande».
Ce «Röstigraben» apparaît non seulement au niveau fédéral, mais aussi dans les cantons de Fribourg et du Valais, remarquent La Liberté et Le Nouvelliste:
En Valais, le rejet de la loi par les germanophones a fait basculer le canton dans le camp du «non». «Difficile d'expliquer ce résultat en demi-teinte», juge Le Nouvelliste:
Pour le journal fribourgeois, cette défiance populaire au plan national vient en partie de la crise liée au Covid-19. «Des voix reproch[ent] aux médias d'être les porte-parole trop dociles des autorités». Dans ce contexte, «les opposants à la loi ont eu beau jeu de prétendre que l'argent de la Confédération irait engraisser des grands groupes de presse qui n'en ont pas besoin».
Le journal genevois Le Courrier estime que le secteur du journalisme «porte aussi une part de responsabilité», en ayant rejeté pendant longtemps l'idée d'une aide directe aux médias:
La forme de paquet qu'avaient ces aides à la presse est également en cause, affirme Le Temps:
En effet, ce dimanche de votations est un fort «désaveu» pour l'exécutif et le législatif fédéraux, qui «se sont inclinés sur trois des quatre objets soumis à votations [...] Ces résultats prouvent que le fossé se creuse entre les préoccupations de la population et celles de la majorité des dirigeants», ajoute le journal.
Pour l'Agefi, ce dimanche de votations doit se lire sous l'angle du rôle de l'Etat et de la place laissée au marché:
«Et maintenant, que faire?», s'interroge Le Courrier. Car «après ce 'non' du peuple, la mission des médias suisses [...] demeurera la même: vous informer même si cela ne vous plaît pas toujours», avec des moyens qui resteront pareils à ceux d'aujourd'hui: «insuffisants», constate Le Nouvelliste.
A l'instar des autres journaux, Le Quotidien Jurassien appelle à remettre l'ouvrage sur le métier «urgemment». Il demande que le Conseil fédéral intervienne, «afin que La Poste renonce aux hausses de tarifs de distribution». Et «l'idée d’une aide à la transition numérique ne doit pas être abandonnée». Une autre piste possible consisterait en «une action un peu résolue pour instaurer la fameuse Google Tax», ajoute Le Courrier. (ats/jch)