Finiiiii les journées qui s'assombrissent bien trop vite. L’heure d'été verra à nouveau le jour le dimanche 31 mars 2024. A 2 heures du matin, il faudra donc avancer les horloges d'une heure.
Si cette routine biannuelle fait partie intégrante du quotidien de la population occidentale, reste qu'elle déroute encore quelques fois tant sur son origine, que ses mythes ou son impact en Suisse. Ça tombe bien, on s'y est intéressés. Certaines réponses devraient vous étonner.
Retour dans le temps. Au début du XIX siècle, chaque ville en Europe gérait sa propre heure en fonction du soleil. Tous les 18 km, l'heure variait d'une minute environ. Ces différences posaient peu problème puisque rares étaient ceux qui franchissaient la distance d'une traite.
Ce n'est qu'avec l'avènement du chemin de fer que ce système de «temps solaire» a commencé à perturber les voyageurs. Plus particulièrement ceux ratant leurs correspondances et devant prévoir d'autres trains disponibles. Faisant ainsi apparaître un problème majeur: deux trains qui utilisaient des références temporelles différentes risquaient de circuler en même temps sur la même voie de chemin de fer.
En 1883, l'ingénieur canadien Sandford Fleming invente le système des fuseaux horaires afin de normaliser le réseau ferroviaire au Canada. Ce dispositif est alors censé permettre de prévoir une heure homogène pour un territoire donné plus étendu.
Il divise alors (de façon imaginaire) la surface de la Terre en 24 fuseaux horaires, de longitude identique. Lesquels sont alors définis à partir de l'heure dite «méridienne» donnée par Greenwich, petite ville située près de Londres où se trouve l'ancien Observatoire astronomique royal.
Le père du changement d’heure serait Benjamin Franklin, le fondateur des Etats-Unis. Dans une tribune publiée en 1784, il estime en effet que le quotidien des Parisiens ne leur permet pas de profiter autant du soleil que les Américains. Mais ses explications, afin d'avancer le temps d'une heure durant l'été, restent floues et ne convainquent alors personne.
Il faudra patienter une centaine d'années plus tard, en 1907, pour que des chercheurs soulignent l'intérêt du changement d'heure, notamment afin d'économiser l'énergie à une époque où l’éclairage est le dispositif le plus gourmand. Reculer ou avancer d'une heure permet, selon eux, de faire varier les besoins d'éclairage, plus spécifiquement dans les commerces ayant des heures d'ouverture et de fermeture.
L'idée est finalement appliquée en 1916, durant la Première Guerre mondiale. L’Allemagne, la France, l’Angleterre et l’Irlande ouvrent le bal, mais stoppent le projet au début de la Seconde guerre mondiale en 1939. Jusqu'au choc pétrolier de 1973, qui plonge de nombreux pays dans une crise sans précédent. Le 28 mars 1976, l'Europe décide de récupérer le changement d'heure avec pour objectif principal d'économiser de l'énergie. Un plan de sauvetage qui plait à tous les pays du continent, sauf la Suisse.
La Suisse a introduit l'heure d'été au milieu de la Seconde Guerre mondiale. Initialement intitulée «Daylight Saving Time», l'heure d'été durait du mois de mai au mois d'octobre. Il ne s'agissait cependant que d'une mesure temporaire servant uniquement la guerre.
Lorsqu'en 1976, les pays limitrophes décident d'adopter le changement d'heure comme mesure permanente, la Suisse contrecarre le mouvement à coup de référendums. Mais la résistance ne dure pas longtemps. Le positionnement géographique de la Suisse, au cœur de l'Europe centrale, désorganise en effet le réseau ferroviaire du territoire. Ce qui poussera alors le pays à capituler.
La première directive sur le changement d'heure d'été a officiellement été adoptée par toute l'Union européenne en 1980 et la mesure est finalement entrée en vigueur en Suisse le 1er janvier 1981.
Dans la nuit du samedi 30 mars au dimanche 31 mars 2024, les Suisses devront se préparer à passer de l'heure d'hiver à celle d'été, aussi dit «heure d'été d'Europe centrale (CEST)». Cela signifie qu'à 2 heures du matin, nous avancerons les horloges d'une heure. Donc à 2 heures il sera 3 heures.
Evidemment, aujourd'hui, cette habitude bisannuelle ne nécessite plus autant de concentration de notre part qu'auparavant. La plupart des horloges (téléphone portable, ordinateur, et tout autre dispositif lié au réseau de votre opérateur téléphonique) réalisent automatiquement la transition.
Depuis 1996, bien que chaque fuseau horaire soit différent, les changements d'heure se font partout au même moment. En Europe, nous passons simultanément à l'heure d'été le même jour, à la même heure. Soit, pour l'heure d'été, le dernier dimanche du mois de mars à 2 heures du matin. Cette heure de basculement a été choisie de manière à minimiser tout risque de perturbations sur les transports et les télécommunications.
Si la manœuvre fait certes perdre une heure de sommeil, elle permet surtout de gagner une heure de luminosité naturelle en fin de journée, en plus du rallongement naturel et progressif des journées à l'approche de l'été.
Les arguments en faveur de l'heure d'été sont, pour l'opinion publique, d'ordre psychologique. Une étude importante de 2003 dans le Journal of Psychosomatic Research révèle que se réveiller à l'aide du lever du soleil diminuerait même le risque de dépression.
Mais au départ, la raison pour laquelle la Suisse a accepté de se soumettre à l'heure d'été servait principalement à s'adapter aux normes imposées par les pays européens. Lesquels justifiaient qu'une telle mesure permettait d'économiser de l'énergie. Or cette justification n'a jamais été confirmée.
Par ailleurs, de nombreux chercheurs remettent en question les bénéfices sur la santé. Selon eux, changer d'heure deux fois par an conduirait certaines personnes à des stress psychologiques tels que des troubles du sommeil ou des dépressions saisonnières. Mais le changement d'heure pourrait également provoquer des conséquences négatives sur la pression artérielle, la fréquence du pouls et la température corporelle due à des difficultés d'ajustement.
De plus en plus de voix s'élèvent contre les changements d'heure d'hiver et d'été. Il y a quatre ans, l'Union européenne s'était prononcée en faveur de l'abolition de cette mesure internationale. Une première enquête de la Commission européenne avait alors indiqué que 84% des participants étaient favorables à son abolition. Une abolition officielle du changement d'heure aurait ainsi dû rentrer en vigueur dès 2021, afin de ne vivre que selon l'heure d'été.
Néanmoins, la Commission européenne a indiqué à watson que des analyses concrètes de la situation manquaient toujours à l'appel et ne permettaient pas l'arrêt du basculement. Si l'on en croit les propos de la députée UE des Verts Karima Delli rapportés par le Huffington Post fin février 2023, le texte sur la fin du changement d'heure n'est plus à l'ordre du jour et ne devrait pas être discuté dans un avenir proche, rapportent notamment le Huffington Post et Linternaute.
La plupart des pays européens et presque tous les États américains changent d'heure à l'approche de la saison estivale. Une pratique néanmoins abandonnée par beaucoup de pays dans le monde.
La Chine, l’Afrique du Sud, l’Argentine, la Tunisie, l'Égypte ou encore l'Ukraine sont de ceux qui ont abandonné le basculement de l'heure, car ils considéraient le gain énergétique trop minime. En 2016, la Turquie est devenue le dernier pays à choisir de ne plus changer d'heure.
(mndl)