18 heures 17. Après un après-midi où, en séance, on a parlé de la Reine en long, en large et en travers, il était temps d'aller boire des verres entre collègues. Souffler. «En attendant que...»
19 heures 30 et environ 3 secondes, un verre dans une main, un tweet dans l'autre, la Reine est morte. HE! LA REINE EST MORTE! Branle-bas de combat. Quatre paires de mains s'activent. I repeat, la Reine est morte.
A statement from His Majesty The King: pic.twitter.com/AnBiyZCher
— The Royal Family (@RoyalFamily) September 8, 2022
19 heures 34, après avoir brassé de l'air, des mots et des glaçons, nos regards tombent sur un... Corgi. On vient d'apprendre qu'Elizabeth II a poussé son dernier souffle et un «chien de la Reine» apparaît. Je cours. Emily et Rhys, une Anglaise et un Gallois, m'accueillent avec leurs pintes et leur accent British. Ils vivent en Suisse depuis cinq ans et, manifestement, les chapitres «vie et trépas de la famille royale», ce n'est pas particulièrement leur cup of tea. «C'était la Reine, oui, mais c'était aussi une vieille dame, on s'y attendait. La mort de Diana a été bien plus choquante», rappelle Emily, me remettant Big Ben à l'heure.
«C'est un jour historique, c'est sûr. Je la trouvais cool, c'est une icône pop, une figure, elle représentait une certaine stabilité, on a jamais vraiment eu de problèmes avec elle, contrairement à d'autres membres de la famille royale...», reconnaît l'Anglaise. Pour Rhys, l'émotion est encore moins palpable.
Mais alors, pourquoi un Corgi, comme les chiens préférés de la Reine? Emily éclate de rire en m’expliquant qu'il s'agit d'un chien gallois. «Comme Rhys! En fait, ce n'est pas exactement le même que ceux de la Reine. Maddoc, lui, c'est précisément un Welsh Cardigan Corgi.» Ah. Chien saucisse de taille moyenne avec des petites pattes et des longues oreilles, j'avoue m'être laissé prendre. «On aurait pu choisir une autre race, certes, mais on aime ce lien qu'il nous rappelle avec le Pays de Galles. Ce n'est qu'arrivés ici qu'on s'est rendu compte que, pour les gens, c'est le chien de la Reine, point. Ils ne disent même pas la reine d'Angleterre, juste la Reine, comme s'il n'y avait qu'elle au monde...»
C'est d'ailleurs en quittant le Royaume-Uni qu'ils ont pris conscience de l'engouement que suscitent les Windsor. «Cette famille a l'air de compter pour tout le monde, pas juste pour le Royaume-Uni», souligne le Gallois, sans réellement comprendre.
Et la suite, avec Charles, désormais roi? Hésitation. «Clairement, il n'a pas et n'aura jamais la popularité et le charisme d'Elizabeth», s'aventure Rhys. «Personne n'est fan de lui!», assène Emily. Indépendamment du nouveau roi, la monarchie a-t-elle encore une raison d'être? «Non. Ça prend beaucoup de place, vraiment trop de place. On n'est pas anti-monarchie, mais c'est un système vieillot, qui n'a plus sa place sous sa forme actuelle.»
Les larmes des millions de fans d'Elizabeth, qui n'ont pourtant jamais pris le thé avec elle, même s'ils en boivent dans des tasses à l'effigie de la défunte monarque, ça les surprend un peu. «Vous, vous n'avez que le côté rockstar de la Reine, nous, on connaît la famille royale sous un autre angle, on a tout le poids de l'histoire», explique le Gallois.
Et William, sera-t-il plus populaire que Charles, le jour où il accédera au trône? «Pour moi, non, ça ne changera rien», assure Rhys. Emily nuance:
Et Harry et Meghan, on en pense quoi? Emily sourit. «Ils sont aux Etats-Unis, ils font ce qu'ils veulent, c'est cool, ils ont un peu cassé la monarchie et sa rigidité. Ça fait du bien, ça fait plaisir!»