Après avoir raflé des millions de spectateurs aux chaînes de télévision, Netflix entend ravir leurs précieux annonceurs, dans l'espoir de relancer sa croissance essoufflée.
La transition des audiences de la télévision en direct aux programmes à la demande, via internet, «s'est accélérée au point que le streaming a dépassé les chaînes traditionnelles et le câble en temps passé devant le poste aux Etats-Unis», a indiqué Greg Peters:
Au premier trimestre 2022, Netflix avait perdu 200 000 abonnés dans le monde par rapport à la fin 2021. La nouvelle avait fait plonger son cours de Bourse de 25%. Puis, de mars à juin, ce sont 970'000 abonnés qui avaient quitté la plateforme.
Le pionnier du secteur, qui compte plus de 220 millions d'abonnés en tout, a pris deux décisions majeures pour inverser la tendance. Il va resserrer la vis du côté des partages d'identifiants et mots de passe, qui permettent à de nombreuses personnes d'accéder à la plateforme sans payer.
Et il s'est résolu à proposer une formule d'abonnement avec publicité, et même à accélérer son avènement, après des années à refuser cette solution moins prestigieuse. Concrètement, les utilisateurs concernés verront en moyenne 4 à 5 minutes de publicité par heure. Leur catalogue sera restreint d'environ 15%, car Netflix ne peut pas adosser de publicités à certains films et séries sous licence.
Les programmes pour enfants ne seront initialement pas concernés par les pubs et pour certains films récents, les annonces seront plus longues, mais diffusées seulement au tout début.
Les annonceurs, des marques de voiture et de luxe aux voyagistes, ont répondu présents en masse, selon Jeremi Gorman, la directrice de la publicité chez Netflix:
En matière de ciblage, ils pourront choisir les pays et le genre (comédie, action, documentaire...) et exclure certaines caractéristiques (violence, nudité...), suivant le modèle prédominant sur la télévision traditionnelle.
Netflix, avec l'aide de son partenaire Microsoft, récoltera des informations comme le sexe et l'âge de ses utilisateurs et prévoit de faire plus tard du ciblage publicitaire dit comportemental, c'est-à-dire personnalisé en fonction des préférences des personnes, comme sur internet.
La personnalisation permet aussi d'augmenter les prix pour les marques, car les publicités finement ciblées à grande échelle apportent de meilleurs retours sur investissement.
L'entreprise n'a pas donné ses tarifs, mais selon des sources du Wall Street Journal dans un article fin août, les annonceurs devront initialement débourser environ 65 dollars pour viser 1000 spectateurs, et peut-être 80 dollars par la suite, un prix considéré comme plus élevé que sur d'autres plateformes de streaming.
Selon Insider Intelligence, les revenus publicitaires tirés du streaming pourraient atteindre 30 milliards de dollars dans les deux ans, rien qu'aux Etats-Unis, et probablement au moins le double au niveau mondial. Le marché est pour l'instant écrasé par YouTube.
Si en Suisse aucune date n'est arrêtée, l'abonnement à bas prix va débarquer en France, le 3 novembre à 5,99 euros par mois. Aussi si le tarif change et les pubs s'ajoutent, la plateforme réduit aussi sa proposition: les abonnés devront se contenter d’une diffusion en 720p et d'un catalogue à 85% disponible. Les 15% manquants sont liés à des films et des séries acquis par Netflix et dont les pubs ne peuvent être ajoutées, une question de droit en est la cause. (ats/jch)