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Plainte contre les transactivistes à Genève: menace ou réalité?

Uni Mail, Genève.
Uni Mail, Genève. image: keystone

Violences activistes: pourquoi l'Uni de Genève tarde-t-elle à porter plainte?

Près d'un mois après des faits de violence exercés par des transactivistes contre un prof français venu présenter son livre à l'Université de Genève, le rectorat n'a pas encore déposé plainte. Il en a pourtant toujours l'intention...
09.06.2022, 12:3709.06.2022, 23:00
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Plus de trois semaines après des violences exercées contre un professeur français venu donner une conférence à l’Université de Genève (Unige), le rectorat n’a toujours pas déposé plainte. C’était pourtant son intention sitôt les faits connus, estimant qu’à cette occasion, «deux lignes rouges» avaient été franchies: celle de la liberté académique empêchée et l’usage de la violence comme moyen d’action.

Le 17 mai, Eric Marty, professeur à l’université Paris-Diderot, était l’invité du département de français moderne de l’Unige. Il allait commencer sa conférence, consacrée à son livre «Le sexe des modernes», où il aborde la théorie du genre, lorsqu’une vingtaine d’activistes masqués, se réclamant de la cause «trans», ont fait intrusion de la salle, interrompant le conférencier, déchirant ses fiches, jetant des exemplaires de son livre par terre.

L’autorité universitaire condamnait fermement cette action motivée par un esprit de censure – les activistes en question se justifiaient en décrétant le livre d’Eric Marty «transphobe».

L’annonce du rectorat de déposer plainte pénale «contre inconnus», évoquant jusqu’à la possibilité d’exclure les étudiants de l’Unige qui se seraient joints à cette opération, contrariait le syndicat faîtier de l’Université de Genève, la Conférence universitaire des associations d’étudiant.e.x.s (CUAE). Non seulement celle-ci reprochait au rectorat ses intentions répressives, mais elle apportait son soutien aux personnes ayant empêché la tenue de la conférence d’Eric Marty, jugeant à son tour le livre de ce dernier «transphobe».

«Nous avons trois mois pour déposer plainte»

«Nous avons trois mois pour déposer plainte», précise le directeur de la communication de l’Unige, Marco Cattaneo, joint ce jeudi par watson. Pourquoi cela n’a-t-il pas encore été fait? «Il y a tout un travail administratif pour la calibrer correctement», explique-t-il. Marco Cattaneo situe le sens de cette plainte, pour l’heure pendante. «C’est un outil par lequel le rectorat, comme il l’a déjà dit, entend montrer qu’il y a des lignes rouges à ne pas franchir dans un cadre académique.» Doit-on comprendre que la plainte ne sera pas déposée, que le rectorat l’agite comme une menace, le temps que la CUAE s’engage à accepter et à faire accepter, à l’avenir, la tenue de conférences avec le contenu desquelles elle ne serait pas d’accord? «Non, décision a été prise de déposer plainte, nous ne l’agitons pas comme une menace ou un moyen de chantage», assure Marco Cattaneo.

«Organiser le débat»

L’enjeu est la liberté d’expression à l’Université, l’endroit de la confrontation des idées. Y aura-t-il à présent des réunions en amont pour convenir de ce qui pourra être dit par des conférenciers? La question fait bondir Marco Cattaneo. «En aucun cas, répond-il, ce serait parfaitement contraire à la liberté académique.» Il s’agit plutôt d’«organiser le débat», de «permettre la prise de parole», en particulier lorsque les thèmes abordés nourrissent des polémiques. «Je suis sûr que la CUAE n’est pas opposée à la liberté de débattre», affirme, allusif, le directeur de la communication de l’Unige.

Marco Cattaneo donne l’exemple du leader indépendantiste catalan Carles Puigdemont, poursuivi par la justice espagnole, qui avait été invité à s’exprimer en 2018 à l’Université de Genève par le Global Studies Institute, un organisme de l’Unige, «soucieux du droit des minorités».

«L’ambassade d’Espagne nous avait fait savoir son mécontentement»
Marco Cattaneo

Sauf que le problème constaté n’est peut-être pas tant que des structures très officielles puissent être en désaccord avec tel ou tel conférencier invité à donner son point de vue à l’Unige, mais que des étudiants s’arrogent le droit de dire qui est le bienvenu et qui ne l'est pas dans des murs académiques.

Dans une interview au média romand Le Peuple, Eric Marty se défend d’être transphobe. Il rapporte avoir présenté son livre dans des conditions sereines à l’Université Paris 8, souvent dépeinte comme un bastion «woke», et ne mâche pas ses mots à l’encontre de ceux qui l’ont empêché de parler à l’Université de Genève:

«Face à la petite bande de "pseudo-trans", j’ai eu l’impression d’avoir affaire à une bande de petits-bourgeois apparemment aisés qui se donnaient beaucoup de mal pour jouer aux "activistes", tout juste capables d’imiter ce qui se fait ailleurs, incapables de véritable insolence, parfaitement stéréotypés, et dont l’unique efficacité tenait à la pire chose qui soit: l’effet de nombre.»
Eric Marty, dans Le Peuple

Sollicitée ce jeudi par téléphone et par mail sur «l'affaire Eric Marty», la CUAE, le syndicat étudiant de l'Unige, n'a pas donné suite.

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