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Notre jeunesse va-t-elle vraiment si mal?

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Notre jeunesse va-t-elle vraiment si mal?

Depuis deux ans, d'innombrables études et enquêtes dressent un tableau sombre de l'état psychique de la jeunesse suisse. Nos jeunes vont-ils vraiment si mal? Je me risque à une évaluation en tant que maman.
21.10.2022, 10:5821.10.2022, 11:25
Sandra Casalini
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Bien sûr, mes deux enfants ne suffisent pas à rendre mes déclarations représentatives. Mais je pense que ce sont tout de même deux exemples assez typiques de leur génération, chacun à sa manière. J'aimerais commenter ici d'un point de vue très personnel trois chiffres que j'ai tirés d'études. Et je serais ravie de lire vos propres expériences en la matière.

«84,5% des jeunes femmes se sentent sous pression de devoir toujours être en bonne santé et performantes»

Ce chiffre est tiré de la dernière étude Helsana sur les émotions. Je trouve amusant de constater que pour ma fille, le cap des 18 ans qu'elle vient de franchir l'a fait changer d'attitude. Depuis qu'elle doit assumer elle-même ses absences au gymnase, elle s'en occupe beaucoup plus consciencieusement. Auparavant, elle disait souvent: «Maman, j'ai mes règles et je me sens si mal. Je peux rester à la maison?» Et quand maman (et son cœur tendre) craquait et lui donnait l'absolution, elle ne se posait pas plus de questions. Cette prise de conscience fait bien sûr plaisir.

Mais il y a quelques semaines, elle a voulu se traîner à l'école alors que sa fièvre flirtait avec les 39°C. Je l'ai immédiatement renvoyée au lit et lui ai demandé quelle mouche l'avait piquée. Sa réponse: «J'ai peur qu'on ne croie pas que je suis malade. Si je signe moi-même, je peux faire ce que je veux. Et je ne veux pas qu'on pense que je courbe l'école. Ou que je suis toujours malade».

Le premier élément est plutôt logique, le second est inquiétant. Qu'est-ce que cela dit de notre société si les ados ont déjà l'impression qu'ils doivent absolument se rendre à l'école en étant malades, car sinon ils ont l'impression de ne pas être assez performants?

«56% des jeunes de moins de 25 ans disent faire face à un stress psychologique fort à très fort»

Ce chiffre est tiré de la campagne «Comment vas-tu?» de l'institut GFS Bern (en allemand). Il est très difficile à évaluer, car incroyablement subjectif. Ce que je vois chez ma fille: la pression scolaire est énorme. C'est une bonne élève, mais pas non plus une élève qui se promène aux examens sans effort. Jamais je n'ai autant travaillé pour l'école qu'elle. De temps en temps, je vais dans sa chambre tard le soir et je lui demande pourquoi elle n'étudie pas un peu plus tôt. «Quand, alors?», demande-t-elle. Et elle a raison.

Elle a souvent école jusqu'à 17 heures, est rarement à la maison avant 18 heures et ne peut donc étudier qu'après le souper. Je ne sais pas comment font les autres pour avoir des hobbies réguliers. Ma fille a la chance d'avoir fait de son plus grand hobby, la musique, un travail au gymnase artistique, c'est-à-dire qu'elle l'a intégré dans son emploi du temps. Elle a aussi un groupe avec lequel elle répète régulièrement. Là encore, la question se pose souvent de savoir si elle peut ou veut se permettre de répéter avec son groupe, vu les examens à venir.

Cela lui donne automatiquement mauvaise conscience, soit envers les copains du groupe, soit parce qu'elle a chanté au lieu d'étudier. Oui, je l'ai trouvée plusieurs fois en train de pleurer dans sa chambre parce qu'elle pensait qu'elle n'avait pas assez étudié. Bien sûr, je me demande parfois si la voie qu'elle a choisie est la bonne. Mais elle ne voit pas d'alternative.

D'ailleurs, il y a tout autant de pression lors de la recherche d'une place d'apprentissage, par exemple. De nombreuses entreprises attribuent leurs places un an à l'avance, ce qui signifie de facto que les ados de quatorze ans doivent déjà avoir une place d'apprentissage. Les enfants comme mon fils, qui, à cet âge, n'ont pas encore de plan de ce qu'ils veulent vraiment, ont déjà un temps de retard.

Et d'ailleurs, j'ouvre une parenthèse: je n'ai jamais vu la concurrence entre parents aussi grande qu'aujourd'hui. («Oh, il ne sait même pas ce qu'il veut? Mon Maximilian-Oliver-Tobias est allé faire des initiations à l'âge de onze ans et demi, et il était tellement fort qu'ils ont créé une place d'apprentissage spécialement pour lui.» Ou quelque chose du style.)

Mon fils a fait des initiations, encore et encore. Rien ne lui convenait vraiment. La fin de l'école approchait, la plupart de ses amis avaient déjà une place d'apprentissage, il ne savait même pas ce qu'il voulait. La pression était énorme. Ce à quoi il faut ajouter la période post-Covid, beaucoup de candidatures pour des essais ont été refusées. A quinze ans, même si ta mère t'explique durant des heures que ce n'est pas à cause de toi mais des circonstances, ça reste super frustrant. Mon fils, qui a aujourd'hui seize ans, fait une année d'entrée dans la vie active sous forme d'année de transition, et la recherche d'une place d'apprentissage a déjà commencé (il a décidé de devenir spécialiste en hôtellerie).

Là encore, le fait de voir autant de refus presque un an à l'avance, car les places d'apprentissage sont déjà occupées, augmente encore la pression. Je le vois souvent au bord du désespoir, car il a l'impression que personne ne voudra jamais l'embaucher. Et pourtant, nous sommes en octobre. Et nous parlons bien de places d'apprentissage pour août prochain. C'est dingue!

«Les cliniques psychiatriques pour jeunes enregistrent 30 à 40% d'inscriptions supplémentaires depuis 2020»​

Ce chiffre provient de l'Hôpital pédiatrique universitaire des deux Bâle (UKBB), mais la situation est comparable dans d'autres cliniques. Il est difficile de dire dans quelle mesure cela est dû à la pandémie. Le fait est que l'on reconnaît désormais beaucoup de choses comme maladies psychiques que l'on ne percevait pas comme telles auparavant. A l'époque, les jeunes étaient souvent tristes et sans énergie, mais on ne parlait pas de dépression. Dans l'entourage de ma fille, il y a quelques adolescents qui ont fait un séjour en clinique. Les raisons vont des troubles alimentaires à la dépression en passant par les problèmes de dépendance.

Depuis qu'elle est petite, ma fille porte le poids du monde entier sur ses épaules. Elle souffre avec chacun de ses copains et copines, elle a toujours peur que quelqu'un n'aille pas bien. Ce poids, combiné à la pression scolaire, a parfois conduit à des effondrements. Mais depuis, nous savons elle et moi, notamment grâce à une visite chez un psy pour jeunes, qu'il faut toujours se rappeler que ces phases sont temporaires. Qu'il y a des moments où l'on va mal et qu'il n'y a aucune honte à ressentir. Et qu'après, il y a de nouveau des périodes où l'on se sent bien.

Bilan

Les psychologues affirment que les périodes où le nombre de troubles dépressifs augmente sont généralement soumises à de grands changements. Il n'est pas surprenant que les pandémies, les guerres, mais aussi les progrès techniques rapides entraînent une instabilité psychique chez les jeunes. Mais le fait que le taux de suicide n'ait jamais été aussi bas depuis plus de quarante ans montre aussi que les jeunes peuvent tout à fait considérer leurs moments les plus difficiles pour ce qu'ils sont: temporaires.

Malgré tout, j'ai l'impression de ne pas retrouver l'insouciance de ma jeunesse chez mes enfants. Ce n'est pas toujours une mauvaise chose. Je les trouve très réfléchis et ouverts au monde, ce qui leur ouvrira de nombreuses portes un jour. Et comprendre déjà tôt que le monde n'est pas toujours à nos pieds, cela a aussi des avantages. Mais si je pouvais faire un vœu pour mes futurs petits-enfants, ce serait qu'ils soient un peu moins soumis à la pression de la performance dans leur jeunesse. Elle viendra bien assez tôt.

Et vous, comment voyez-vous la jeunesse d'aujourd'hui? N'hésitez pas à me faire part de vos expériences et de vos opinions en commentaire.

Sandra Casalini, bei sich zu Hause in Thalwil, am 04.12.2018, Foto Lucian Hunziker
bild: Lucia Hunziker

A propos de l'auteure:

Sandra Casalini écrit sur à peu près tout ce qui touche à son quotidien – avec une franchise toujours sans pitié et beaucoup d'auto-ironie. C'est d'ailleurs la tonalité de son blog Rund um Gsund (A votre santé), qui paraît une semaine sur deux sur watson. L'approche de Sandra en matière de santé est la même que celle qu'elle a adoptée pour élever ses enfants: elle n'est pas experte, mais elle s'en sort plutôt bien dans les deux. Parfois avec de l'aide, parfois sans.

Les textes de Sandra Casalini sont régulièrement publiés dans le magazine pour parents Fritz und Fränzi et dans la Schweizer illustrierte. Elle donne également un aperçu hebdomadaire de sa vie avec des ados sur le blog de la Schweizer illustrierte intitulé Der ganz normale Wahnsinn (La folie ordinaire).
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