Michel Fourniret est un patronyme qui rôde dans la mémoire collective. Surnommé l'ogre des Ardennes, ordure absolue, pédocriminel, violeur à la folie meurtrière dévastatrice, ce forestier français, à l'enfance trouble et incertaine, est connu pour être le tueur en série le plus abouti de France. Il serait lié à 80 affaires en tout.
Mais l'homme n'opérait pas seul, une autre personne était là, dans l'ombre, également à la manoeuvre: Monique Olivier. La femme du meurtrier se présentait comme une épouse soumise, une ménagère sans histoire et dans l'ignorance. Mais elle cachait une personnalité complexe, mise en lumière par les enquêteurs.
Il aura fallu deux ans à Michelle Fines et Christophe Astruc, réalisateurs de cette docu-série étalée sur cinq épisodes, pour échafauder un récit glaçant, celui du double machiavélique de Michel Fourniret.
Les nombreux témoignages et les phrases chocs ne manquent pas, elles imprègnent le documentaire par son caractère répugnant. La sarabande des enfers débute par une annonce faite dans un journal de l'époque où Fourniret avait posté une petite annonce pour combler sa solitude en cellule. Et ce 11 décembre 1987, après une longue romance épistolaire entamée six mois avant, alors que Fourniret était incarcéré, le premier crime à deux: Isabelle Laville, une adolescente de 17 ans, est violée et assassinée. Le corps est retrouvé 19 longues années après, le premier meurtre d'une longue liste (onze meurtres avoués et de multiples secrets emportés dans la tombe) avoué par l'ogre des Ardennes.
Monique Olivier était là pour l'aider à disposer d'une «jeune fente» comme Fourniret aimait qualifier ses proies. Elle aura ses mots, tel un dicton diabolique d'un pacte scellé:
La gerbe. Netflix n'a pas raté son entreprise pour vous embarquer dans une épopée écoeurante et dégoûtante. Puisque les termes employés par le tueur en série dessineront le monstre qu'il était, comme cette formule usée à maintes reprises quand il s'apprêtait à s'abattre sur une jeune fille: «Les membranes sur pattes». Le psychiatre Daniel Zagury était si dégoûté, qu'il expliquait avoir« vacillé» pendant les expertises de Michel Fourniret: «J’ai eu du dégoût, jusqu’à la nausée.»
Un retour dans les images d'archives, dans la psyché d'un homme rompu à la folie meurtrière et surtout une femme dévouée, hypnotisée et complice d'un tableau de chasse atroce. Sans Michel Fourniret, «Monique Olivier n'est jamais une criminelle. C'est lui qui la rend comme ça, ce n'est pas l'inverse», concède Richard Delgenes, l'avocat de la veuve qui purge actuellement une peine de réclusion criminelle à perpétuité.
L’Affaire Fourniret: Dans la tête de Monique Olivier, c'est une narration solide à la mélodie grinçante, un retour sur des faits qui fonctionne comme une bise glaçante qui vous traverse les os. On découvre cette femme, victime et bourreau à la fois, qui s'avance en pièce maîtresse dans ce puzzle des enfers, dans une mécanique et une méthodologie minutieuses.
La femme «docile et silencieuse, qui ne triche pas», comme Fourniret avait qualifié Monique Olivier, attirait les victimes. C'était elle l'appât pour assouvir les abominations de son mari - tout était calculé, échafaudé, pour enfin attirer les victimes dans la camionnette blanche.
Francis Nachbar, ancien procureur, est l'un des pions des témoignages clés dans cette série. Surtout, il martèle que le procès, à partir de l'épisode 4, doit être l'instant T: rappeler aux familles des victimes que la société n'oublie pas ces jeunes filles. Et après, l'enjeu de ce procès était de comprendre et analyser Monique Olivier.
«Monique Olivier a été faible à en être coupable», lâche son avocat devant les télévisions lors du premier jour du procès en 2008. Mais dans le sillage de son abominable mari, elle vivait dans la peur, sans avoir le droit à la parole, et cherchait à être transparente pour ne pas réveiller l'ogre. «Elle a cette capacité à être extrêmement influençable. Elle se calque sur son interlocuteur, dans le bien ou dans le mal», rapporte Richard Delgenes. Monique Olivier n'était pas un monstre, mais la complice parfaite pour Michel Fourniret.