Il y a six ans, à Nice, un soir de 14 Juillet, fête nationale en France, un individu au volant d’un poids lourd fonçait dans la foule flânant sur la Promenade des Anglais. Bilan: 86 morts et 450 blessés. Parmi les victimes décédées, trois venaient de Suisse : une mère de 31 ans et sa fille de 7 ans, habitant Yverdon, ainsi qu’une Tessinoise de 54 ans.
Un attentat djihadiste perpétré par un ressortissant tunisien du nom de Mohamed Lahouaiej-Bouhlel, 31 ans à l’époque des faits, tué par la police après avoir parcouru plus d'un kilomètre dans son camion. Le procès des comparses présumés de cette tuerie de masse commence ce lundi à Paris. Il y a deux mois prenait fin celui des attentats du 13 novembre 2015, qui avaient fait, eux, 130 morts dans la capitale française et sa proche banlieue, à Saint-Denis.
Peu après le feu d’artifice, à 22h32, le dix-neuf tonnes de location conduit par le terroriste, s’élance depuis l’extrémité ouest de la Promenade des Anglais. Il prend de la vitesse, jusqu’à 90 km/h, ce qui lui permet de forcer un barrage de police placé à l’entrée de la partie réservée au public. Commence alors le carnage. Le camion va de gauche à droite, grimpe sur le trottoir, revient sur la chaussée. Un homme en scooter monte sur le marchepied du véhicule, tente d’entrer, en vain, dans la cabine du chauffeur. Le terroriste est armé. Il tire sur des policiers, qui ripostent, atteignant les pneus, ainsi que le conducteur, qui décède. Le camion finit par s’immobiliser. Il aura parcouru en tout 1,7 km.
Père de trois enfants, il était marié, séparé depuis deux ans, apparemment en instance de divorce. Venu de Tunisie, Mohamed Lahouaiej Bouhlel était établi à Nice depuis 2008, au bénéfice d’un permis de séjour. Des proches, des voisins le décrivent peu après l’attentat comme un être instable, ayant des accès de violence, buvant de l’alcool, se droguant à l’occasion, adepte de la musculation et de la boxe, mangeant du porc, aimant les femmes, n’allant jamais à la mosquée.
C’est pourtant cet homme apparemment sans foi musulmane, employé dans une entreprise de transport, un casier judiciaire de quelques lignes, qui se radicalisera de façon express, préparera minutieusement son attentat, louant un camion, effectuant des repérages sur les lieux du futur massacre, minutant le temps nécessaire à l’accomplissement de son forfait.
Le psychanalyste franco-tunisien Fethi Benslama a étudié les cas de plusieurs djihadistes. Il est l’auteur de nombreux ouvrages, dont «Un furieux désir de sacrifice. Le surmusulman» (Le Seuil, 2016) et «Le Saut épique ou le basculement dans le jihâd» (Actes Sud, 2021). «Avant qu’il ne commette cet attentat, Mohamed Lahouaiej Bouhlel avait déjà des troubles importants, ayant nécessité des consultations psychiatriques à Tunis. Il avait une personnalité psychopathe», explique Fethi Benslama.
Fethi Benslama n’exonère pas pour autant l’idéologie islamiste, à l’œuvre dans l’attentat de Nice comme dans d’autres.
Le procès de l’attentat de Nice s’ouvrira ce lundi en début d’après-midi. Il devrait durer jusqu’au 15 décembre fin de l’année. «865 victimes se sont constituées parties civiles. En tout, 2 466 victimes indemnisées ou en voie de l’être par le Fonds de garantie des victimes (FGTI) pourront se constituer partie civile jusqu’aux réquisitoires des avocats généraux. Cinq semaines seront consacrées aux auditions des parties civiles», rapporte le journal La Croix.
La famille endeuillée d’Yverdon, une douzaine de personnes en tout, sera représentée par Me Alexa Landert, avocate dans la ville du Nord Vaudois, associée dans ce procès à Me Arthur Sigrist, avocat à Marseille. «Je serai présente à l’ouverture du procès, pas la famille, car au début, c'est très technique», indique Me Landert à watson.
Les accusés (franco-tunisiens, tunisiens et albanais) sont au nombre de huit. Sept comparaissent, six hommes et une femme. Un huitième, un homme, est en fuite et sous le coup d’un mandat d’arrêt. «Les trois principaux accusés, Mohamed G., Chokri C. et Ramzi A., sont poursuivis pour "association de malfaiteurs terroriste criminelle". Ils sont soupçonnés d’avoir "apporté leur concours à la préparation de ce passage à l’acte criminel", même si la complicité n’a pas été retenue puisque les investigations n’ont pas permis de déterminer s’ils étaient au courant du projet d’attentat», écrit le quotidien La Croix.
Les quatre autres accusés sont poursuivis pour des infractions de droit commun, soupçonnés d'avoir aidé le terroriste à se procurer une arme.