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Ukraine: Poutine est pris au piège

Du point de vue du Kremlin, la guerre pourrait se poursuivre indéfiniment.
Du point de vue du Kremlin, la guerre pourrait se poursuivre indéfiniment.Image: watson / shutterstock
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Poutine est pris au piège

L'Occident est las de la guerre et souhaite sa fin, au plus vite. Vladimir Poutine voit les choses différemment, estime l'écrivain russe en exil Vladimir Kaminer.
15.01.2023, 07:5915.01.2023, 17:22
Vladimir Kaminer
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t-online

A peine Poutine lançait-il ses chars sur le territoire ukrainien que le bal des experts commençait déjà. Souvenez-vous des questions qui agitaient l'opinion publique il y a une année: «S'agira-t-il d'une guerre éclair? Poutine va-t-il se retirer? Le conflit sera-t-il terminé d'ici à l'été?»

Au fur et à mesure que le conflit s'est enlisé, les observateurs ont changé de ligne, mais ont continué à se poser des questions:

«Quand peut-on s'attendre à un cessez-le-feu en Ukraine? Les Russes ne devraient-ils pas manquer de munitions?»
Les experts occidentaux

Beaucoup d'experts prédisent que Poutine va se retrouver à court d'obus. Si l'Occident cessait de livrer des armes à l'Ukraine, les deux parties seraient contraintes de s'asseoir à la table des négociations. C'est du moins ce que jurent certains observateurs.

Le monde s'est lassé de cette guerre. Plus vite les deux camps se réconcilieront, mieux ce sera pour nous tous. Peu importe quelle bannière flotte sur cette région perdue de l'Est, à écouter les défenseurs de la paix. Actuellement en tout cas, il n'y a pas de grandes évolutions à attendre du front.

Vladimir Kaminer
Vladimir Kaminer est écrivain et chroniqueur. Il est né en 1967 à Moscou et vit depuis plus de 30 ans en Allemagne.

Vers un conflit infini?

Après presque un an de guerre, les deux parties sont arrivées à un statu quo: les Ukrainiens ont besoin de dix fois plus d'armes et de munitions pour avancer, les Russes de dix fois plus de soldats, de la fermeture des frontières et d'une reconversion de l'économie vers la production militaire. Rien de tout cela ne sera possible cette année.

La première vague de mobilisation en Russie a été chaotique et a presque fait douter la population de la fiabilité de ses dirigeants. Poutine a dû prouver le contraire chaque jour à la télévision pour rassurer la population.

Du point de vue du Kremlin, la guerre pourrait se poursuivre indéfiniment. La centaine de milliers de morts semble être un moindre mal face à une possible perte de pouvoir. Et l'économie russe reste assez solide pour assembler quelques missiles et chars de plus, encore et encore. Pour le régime du Kremlin, la guerre est la seule chance de survivre.

Poutine préfère la guerre

La guerre permet de faire taire immédiatement toute voix critique. Et clôt le sujet des élections présidentielles prévues pour l'année prochaine. Car on ne change évidemment pas de cheval au milieu de la bataille. Tant que les bombes continueront à tomber en Ukraine, le régime pourra se sentir en sécurité.

Le problème de la Russie n'est pas la livraison d'armes occidentales: sa mission première, c'est de maintenir son propre peuple sous sa coupe

Car le peuple n'est pas d'accord avec une guerre permanente. Les voix qui réclament une victoire rapide se font de plus en plus fortes. Pendant des décennies, ils ont entendu que l'armée russe était la plus puissante du monde et qu'elle disposait d'armes uniques qui faisaient peur à l'Occident - surtout aux Américains. Les gens ne comprennent pas pourquoi cette grande armée parvient à peine à s'emparer d'une petite ville ukrainienne comme Lyman ou Soledar.

Où sont les armes modernes que l'on admirait chaque année sur la place Rouge pendant la parade? Le régime de Moscou est pris au piège. Les responsables de l'état-major russe le savent: les prouesses montrées sur la place Rouge étaient factices et l'utilisation d'armes de destruction massive ne peut pas apporter la victoire souhaitée.

Vidéo: watson

Les défenseurs de la paix en Occident commettent l'erreur de sous-estimer la force de l'armée ukrainienne. L'opinion répandue dans certains milieux, selon laquelle l'Ukraine serait vite balayée, et la guerre stoppée, si les Etats-Unis arrêtaient de soutenir le pays, ne correspond pas à la réalité.

L'armée la plus puissante d'Europe

Bien sûr, les livraisons d'armes occidentales ont largement contribué à renforcer la capacité de défense de l'armée ukrainienne, mais il s'est également passé beaucoup de choses dans le pays l'année dernière.

Un investissement sans précédent dans tout ce qui touche à la défense et l’attaque militaire, ainsi que la propension de la population à risquer sa vie pour son pays, ont permis à l'Ukraine de se doter de ce qui est en réalité l'armée la plus puissante d'Europe. Une armée motivée, aguerrie au combat et habituée à manipuler des armes du monde entier. Cette armée a déjà goûté au sang, remporté des victoires face aux Russes, elle connaît la stratégie et la tactique de l'ennemi et peut continuer à se défendre avec succès.

En outre, l'Ukraine peut compter sur des soutiens inconditionnels, à savoir ses pays voisins, qui voient dans la Russie une menace pour leur propre existence et font tout ce qui est en leur pouvoir pour soutenir les Ukrainiens dans leur lutte. La Pologne, la Lettonie, la Lituanie, l'Estonie et la Finlande ont parfaitement la possibilité de devenir un acteur important de la résistance. Et ce, même pas en tant que membres de l'Organisation du traité de l'Atlantique nord (Otan), mais en tant qu'alliance militaire indépendante, créée par l'agression russe.

L'éclatement de la Russie pourrait être fatal

Tous ces pays faisaient autrefois partie du grand Empire russe. Leur soutien pour l'Ukraine est évident: tant que les Russes se battent en Ukraine, il n'ont pas les ressources pour se battre ailleurs. Il en va de même pour l'Europe: plus la guerre dure, plus le dangereux voisin s'affaiblit. Et il ne doit absolument pas gagner, car la victoire serait synonyme de chaos.

Mais le régime ne doit pas non plus disparaître complètement. Vu le nombre d'armées privées qui ont vu le jour, une éventuelle désintégration de la Russie pourrait entraîner des conséquences encore plus importantes et des coûts encore plus élevés pour les Européens. La guerre pèse sur le régime de Poutine, elle le rend vulnérable et le vide lentement, mais sûrement de sa vitalité.

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Video: watson
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