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Guerre contre l'Ukraine

Les start-up européennes de la défense ont du mal à se financer

Pourquoi les start-up européennes de la défense galèrent malgré Poutine

Les investissements dans les start-up européennes de la défense augmentent, mais le financement reste difficile. Malgré l'urgence stratégique, de nombreux investisseurs restent réticents à soutenir ce secteur jugé sensible.
06.04.2025, 15:4506.04.2025, 15:45
Tom BARFIELD / afp
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Si les investissements dans les start-up européennes de la défense sont globalement en hausse depuis le début de la guerre en Ukraine, les acteurs de cette industrie continuent à faire face à de nombreux obstacles en matière de financement.

Le capital-risque qui irrigue les entreprises du secteur «défense, sécurité et résilience» a grimpé de 30% de 2022 à 2024 pour atteindre 5,2 milliards de dollars, selon une étude publiée en février par le Fonds OTAN pour l'innovation (NIF) et l'entreprise d'analyse de données Dealroom.

Cette hausse reflète un changement amorcé avant l'invasion de l'Ukraine par la Russie, lorsque certaines technologies ont commencé à être adaptées à un usage militaire, explique Patrick Schneider-Sikorsky du NIF.

L'impression 3D, l'intelligence artificielle, les technologies de fréquence radio, les batteries attiraient déjà les investissements avant que leur utilisation ne devienne une «nécessité absolue» sur le champ de bataille ukrainien.

Mais, malgré le besoin aujourd'hui vital pour l'Europe de développer des technologies de défense à la pointe, beaucoup d'investisseurs (fonds souverains, banques et fonds de pension) continuent à voir les investissements dans ce type de start-up comme peu recommandables.

«Comme les jeux d'argent et la drogue»

C'est un problème qu'a dû affronter la start-up allemande Donaustahl, qui conçoit des drones armés. Son fondateur, Stefan Thumann, raconte:

«En tant que fabricant d'armes, l'entreprise a été exclue des financements et marchés de capitaux jusqu'à présent et, ce, bien qu'elle ait suscité l'année dernière beaucoup d'intérêt au salon aéronautique international de Berlin.»

Et de regretter:

«C'est comme pour les jeux d'argent et la drogue»
Stefan Thumann, fondateur de la start-up Donaustahl.

Pour contourner cet obstacle, Stefan Thumann a levé des fonds à travers ses réseaux sociaux en émettant des obligations numériques, une démarche rare. Il assure toutefois être actuellement en discussions avec de potentiels investisseurs.

Une solution plus pérenne nécessiterait de revoir les règles en vigueur sur la manière dont les fonds peuvent investir dans les technologies à double usage, civil et militaire, ou la création de fonds dédiés, pour Patrick Schneider-Sikorsky.

Certaines institutions publiques semblent déjà pencher dans cette direction.

Depuis l'année dernière, les entreprises de technologies à double usage financées par la Banque européenne d'investissement (BEI) n'ont par exemple plus l'obligation de générer au moins 50% de leur chiffre d'affaires grâce à des clients civils.

Au sein des pays européens, une appétence se fait par ailleurs sentir pour des technologies plutôt «offensives» en Europe de l'Est et «défensives» en Europe de l'Ouest, d'après Jack Wang de la société de capital-risque Project A. L'Allemagne a ainsi amendé sa constitution pour permettre davantage d'emprunts pour financer la défense.

De son côté l'Estonie, pays limitrophe de la Russie, a annoncé l'année dernière la création d'un fonds d'investissement de 50 millions d'euros pour la défense et les technologies à double usage, quand la directrice du fonds public d'investissement finlandais, Tesi, s'est dit intéressée par la tech de la défense, «un secteur à potentiel de croissance», selon elle.

Manque de temps

A l'autre bout du spectre, les start-up de la défense doivent faire face à des processus de commandes militaires, dont les délais sont souvent longs et où les contrats habituels avec de gros fournisseurs se comptent en dizaines de millions de dollars.

Jack Wang détaille:

«La plupart des fonds de capital-risque ont l'habitude d'investir dans des logiciels vendus à des petites entreprises ou directement à des consommateurs et s'attendent à des retours sur investissement en un an et demi à deux ans. Le cycle de commandes en défense ne fonctionne pas comme ça.»

«Les deux cultures vont devoir changer», a abondé Patrick Schneider-Sikorsky du NIF.

Et à Stefan Thumann de compléter:

«Le temps manque... J'espère que l'armée allemande va moderniser son système de passation de marchés et éliminer certaines complexités dans les appels d'offres qui laissent les petites entreprises sur la touche.»
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