C'est presque ce qu'on appelle une victoire à la Pyrrhus. Bien qu'il ait remporté la primaire sur ses quelques rares concurrents démocrates, le président Joe Biden s'est vu sévèrement sanctionné pour son soutien à Israël. Son seul réel adversaire pour l'investiture démocrate, Dean Phillips, un riche parlementaire de l'Etat du Minnesota, n'a récolté que 2,8% des votes.
Selon des résultats presque définitifs, près de 100 000 votes «non engagés» (l'équivalent d'un vote blanc) ont été déposés dans les urnes, à la suite d'un appel à faire pression sur le président américain pour un cessez-le-feu immédiat à Gaza. Un résultat très inquiétant pour Biden, compte tenu du fait qu'il avait remporté de peu l'Etat face à Donald Trump il y a quatre ans, avec seulement 150 000 voix supplémentaires.
Après la rue ou les conseils municipaux, c'est la première fois depuis l’attaque terroriste du Hamas et la riposte brutale d’Israël à Gaza que des citoyens américains avaient l’opportunité de faire entendre clairement dans les urnes leur désaccord avec la politique de l’administration Biden. Le verdict était redouté par la Maison-Blanche. Il s'avère encore pire qu'attendu.
Alors que les militants à l'origine de la campagne «Listen to Michigan» (Ecoutez le Michigan) visaient au moins 10 000 électeurs pour sa campagne, leur objectif a été dépassé. Et de loin. En 2016 et 2020, rappelle le correspondant américain de Libération, entre 1 et 2% des électeurs seulement avaient opté pour le vote «uncommitted». Ils sont, cette fois-ci, plus de 13%.
A mesure que le nombre de victimes civiles augmente dans le conflit entre Israël et le Hamas, Joe Biden voit son soutien s'éroder significativement parmi les musulmans et les Américains d'origine arabe, un électorat qui avait pourtant été décisif dans sa victoire en 2020. Réagissant à sa victoire à cette primaire mardi dans un communiqué, il a remercié «tous les habitants du Michigan qui ont fait entendre leur voix» - sans mentionner pour autant ce vote de protestation.
De leur côté, les responsables de la Maison Blanche affichent une frustration croissante avec le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahu et sa conduite de la guerre à Gaza. Les Etats-Unis continuent malgré tout de livrer quantité d'armes à Israël, tout en menant d'intenses efforts pour négocier une seconde trêve dans la guerre provoquée par l'attaque du Hamas le 7 octobre sur le sol israélien. Joe Biden a demandé au Congrès des milliards de dollars d'aide militaire supplémentaire pour Israël, et son gouvernement a opposé son veto à l'ONU à plusieurs résolutions appelant au cessez-le-feu.
Côté républicain, Donald Trump a déjà remporté haut la main quatre Etats ayant voté, dont la Caroline du Sud samedi. Le Michigan n'a, pour l'heure, pas interrompu sa marche vers l'investiture républicaine cet été. Pour ses primaires, le Parti républicain a opté pour un système hybride complexe qui se conclura quatre jours plus tard.
Quant à sa seule et ultime adversaire encore en lice, Nikki Haley, bien qu'elle ait largement battue dans son Etat d'origine, la Caroline du Sud, elle se refuse encore rigoureusement à abandonner. La candidate entend offrir une alternative aux électeurs. «L’Amérique a la chance d’être une démocratie. Laissons les gens voter», a-t-elle répété mardi soir sur CNN. (mbr avec ats)