Comment continuer d'exister face à Eric Zemmour? Marine Le Pen se le demande. Bien que toujours pas candidat à la présidentielle française de 2022, le premier attire sur lui toute la lumière médiatique. La candidate du Rassemblement national évolue pour l’heure en retrait. Certes, elle peut faire valoir sa deuxième place dans un récent sondage, devançant d’un petit point Zemmour. Mais c'est lui qui donne le tempo et elle qui suit. Elle a l’obligation de se démarquer. Comment donc? En jouant la carte «femme», par exemple. Mais pas seulement.
«Les femmes, c'est une minorité qui est majoritaire en France», explique un conseiller de Marine Le Pen cité par la radio RTL sur son site: 52,3% des électeurs sont des électrices. Interviewée mardi matin sur France 2, Marine Le Pen a reproché à Eric Zemmour son opposition à la parité hommes-femmes.
Empoignant une question concrète pour les femmes, la candidate RN a alerté sur l’existence de «déserts gynécologiques». «Dans treize départements, il n’y a plus de gynécologues», a-t-elle affirmé. Ajoutant: «Le droit des femmes à la santé est en train de reculer».
Mercredi sur BFMTV, le président du RN, Jordan Bardella (Marine Le Pen souhaitant apparaître au-dessus des contingences partisanes) poursuivait la contre-attaque face à Zemmour, connu pour ses propos misogynes: celui-ci a tort «quand [il] dit que les femmes n’incarnent pas le pouvoir, qu’elles ne sont que des régentes, qu’elles sont le but et le butin de tous les hommes qui réussissent en société». Et le jeune loup nationaliste d’enchaîner: «Je suis à la tête d’un parti politique qui a pour symbole Jeanne d’Arc et qui a pour ambition de faire élire dans six mois la première femme présidente de la République française».
La carte de la solidarité féminine, les femmes et les hommes étant à la fois égaux et «complémentaires» aux yeux de Marine Le Pen, servira-t-elle les intérêts de la candidate RN? En face, sur ce plan-là comme sur d’autres, Eric Zemmour la joue «provoc» à la Trump.
«Je crois que c’est un programme qui est marqué par un ultralibéralisme», a asséné Marine Le Pen mardi sur France 2 à l’encontre d’Eric Zemmour. La candidate nationaliste se revendique d’un «patriotisme économique et social». Une bonne part de l’électorat ouvrier, autrefois acquis à la gauche, vote pour elle. Il y a trois ans, elle a pris le parti des gilets jaunes. Elle met aujourd’hui en garde contre la hausse du prix des carburants. Elle se veut la candidate du pouvoir d’achat des Français.
Surtout, elle sait que l’accusation d’«ultralibéralisme», une tare et un gros mot en France, fait mouche dans l’électorat populaire, de droite comme de gauche. «C’est une très grande différence qui existe entre lui et moi», a-t-elle souligné.
«Je souhaite préserver notre système de protection sociale», a-t-elle dit encore. Elle s’oppose entre autres à un relèvement «à 63, 64 ou 67 ans» de l’âge de départ à la retraite, comme le préconiserait Eric Zemmour. «Il y a énormément de gens qui n'atteindront pas en bonne santé l'âge de la retraite, donc je trouve que ça atteint notre système de protection sociale», a-t-elle soutenu. De fait, le public souvent conservateur qui se presse aux meetings de Zemmour a une approche plutôt libérale des questions économiques et sociales.
Marine Le Pen ne varie pas d’un iota sur son positionnement nationaliste, ce qui la classe à l’extrême droite du spectre politique. Là-dessus, elle et Zemmour, c’est kif-kif. Encore que ce dernier apparaisse plus ultra qu’elle. Sur «l'immigration, l'insécurité et le communautarisme», elle affiche son intransigeance. Elle se prononce notamment contre le regroupement familial. Un discours qu’elle tient depuis de nombreuses années et sur lequel elle entend propriété garder. Comme pour bien faire bien comprendre qu’en la matière, elle est l’originale et Zemmour, la copie.