Dans la nuit du 26 septembre dernier, l'exploitant des deux gazoducs Nord Stream reliant l'Allemagne à la Russie a annoncé une chute de pression dans trois des quatre tubes. Les premières investigations ont permis de découvrir trois fuites au sud-est de l'île danoise de Bornholm. Quelques jours plus tard, une fissure de 200 mètres de long a été constatée sur l'un des tubes.
Les autorités danoises ont établi qu'il ne s'agissait pas d'un accident. En effet, au vu du déroulement des faits et de la proximité des fuites, il était évident qu'il s'agissait d'un acte de sabotage ciblé.
Le président russe Vladimir Poutine a parlé d'un «acte de terrorisme international» et d'un «sabotage sans précédent». Les autorités allemandes ont également parlé de sabotage.
Des calculs ont prouvé que des explosifs très puissants avaient été utilisés. Les médias ont spéculé sur l'identité des auteurs de l'attentat présumé. Le principal suspect reste la Russie.
Une enquête d'un consortium de médias allemands vient de paraître. Elle met en lumière de nouveaux indices sur le déroulement de l'explosion. Les autorités allemandes auraient réussi à faire une percée. Leurs pistes conduisent à ... l'Ukraine.
Les enquêteurs ont réussi à identifier le bateau qui aurait été utilisé pour l'attentat. Il s'agirait d'un yacht privé loué par une société dont le siège est en Pologne. Il appartient à deux Ukrainiens.
Selon l'enquête, le navire a pris la mer le 6 septembre au départ de Rostock en Allemagne. A son bord: un capitaine, deux plongeurs, deux assistants et un médecin. Les enquêteurs ont pu localiser rétroactivement le bateau le lendemain au large de l'île danoise de Christiansø, au nord-est de Bornholm. C'est à ce moment que les auteurs de l'attentat auraient acheminé les explosifs jusqu'aux pipelines et les y auraient installés.
Les enquêteurs seraient parvenus à détecter les explosifs sur le bateau. Car le yacht n'a pas été nettoyé avant d'être rendu à ses propriétaires. Des traces d'explosifs ont été trouvées sur la table, dans la cabine.
Côté américain également, on soupçonne désormais un groupe pro-ukrainien d'être à l'origine de l'attentat. Le New York Times a eu accès à un nouveau rapport des services secrets.
Aucune information concrète n'a été publiée sur les raisons de l'attentat. Le gouvernement américain a certes confirmé l'existence du rapport, mais n'a donné aucune information sur la sécurité de son contenu ou sur la manière dont il a été rédigé.
Mais les autorités américaines ont été formelles: il n'existe aucune preuve de la complicité de Volodymyr Zelensky ou de ses principaux généraux. Rien n'indique non plus que les auteurs aient agi sous la direction de membres du gouvernement ukrainien.
La théorie d'une «opération sous faux drapeau» - soit une manœuvre russe - est toujours d'actualité. Des acteurs russes auraient ainsi mené l'attentat et disséminé de manière ciblée des indices sur l'identité pro-ukrainienne des auteurs. L'objectif? Faire porter le chapeau à l'Ukraine.
Ce ne serait pas la première fois que la Russie serait accusée d'une telle action sous couverture. Ainsi, la théorie selon laquelle les attentats contre des habitations russes, qui ont finalement été à l'origine de la deuxième guerre de Tchétchénie, n'ont pas du tout été menés par des terroristes tchétchènes, mais par des agents russes, est largement répandue.
Pendant ce temps, les Etats-Unis sont accusés d'avoir joué un rôle dans l'attentat. Le légendaire journaliste d'investigation Seymour Hersh a affirmé que les explosifs avaient été placés par des plongeurs de la marine américaine et qu'ils avaient ensuite été déclenchés à distance. Toute cette action aurait eu lieu sous le couvert d'un exercice de l'Otan et aurait été ordonnée directement par la Maison-Blanche. Le journaliste se réfère à une source anonyme qui «semble en savoir beaucoup sur ce qui s'est réellement passé.» Ses hypothèses n'ont pas pu être confirmées.
Un conseiller du président ukrainien a déclaré mardi sur Twitter que l'Ukraine n'avait rien à voir avec «la mésaventure» survenue dans la mer Baltique. C'est maintenant à l'enquête de déterminer de quel côté se trouve la vérité.
On ignore quand les résultats tomberont. Mais une chose est sûre, si le Danemark, l'Allemagne ou la Suède arrivent à la conclusion que des cercles ukrainiens sont effectivement à l'origine de l'attentat, il y aura des conséquences sur les relations bilatérales entre Berlin et Kiev.
Although I enjoy collecting amusing conspiracy theories about 🇺🇦 government, I have to say: 🇺🇦 has nothing to do with the Baltic Sea mishap and has no information about "pro-🇺🇦 sabotage groups". What happened to the Nord Stream pipelines? "They sank," as they say in RF itself...
— Михайло Подоляк (@Podolyak_M) March 7, 2023
Selon le New York Times, la réparation des pipelines endommagés pourrait coûter plus de 500 millions de dollars. La semaine dernière, l'agence de presse Reuters a rapporté que le propriétaire des pipelines, Nord Stream AG, dont le siège est à Zoug, n'avait lancé aucun projet de réparation. Nord Stream AG est majoritairement détenue par le groupe énergétique public russe Gazprom.