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Mort de Max Levin: «Exécuté de sang-froid par les Russes»

Aleksandr Levin déposant des fleurs sur la tombe de son frère Max, à Boyarka, le 30 mai 2022.
Aleksandr Levin déposant des fleurs sur la tombe de son frère Max, à Boyarka, le 30 mai 2022.image: reporters sans frontières

«Exécuté de sang-froid par les Russes»: on en sait plus sur la mort de Max Levin

En avril dernier, watson retraçait l'histoire d'un célèbre photojournaliste ukrainien, Max Levin, tué lors d'un reportage près de la ligne de front. Mercredi, un rapport d'enquête a révélé ce qui lui était réellement arrivé.
22.06.2022, 11:4822.06.2022, 14:31
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Marques de brûlures et de torture, impact de balles par dizaines... Le rapport publié mercredi par Reporters sans frontières (RSF) est glaçant. Il jette une lumière crue sur les circonstances de la mort de Max Levin, jeune photographe de guerre ukrainien, et son collègue, le militaire Oleksiy Chernyshov, tués en avril dernier.

Retour sur les faits

Depuis le début du conflit, le fameux photojournaliste ukrainien, 40 ans, aide à documenter les conséquences de l'invasion russe à l'aide d'images et de vidéos prises avec son drone.

Le 10 mars 2022, flanqué de son collègue et ami de longue date Oleksiy Chernyshov, Max Levin se rend dans le village de Guta Mezhyhirska, à quelques dizaines de kilomètres au nord de la capitale. Manque de chance: la batterie de son drone se vide et l'appareil s'écrase dans une forêt aux alentours. Le petit groupe se met donc en quête pour remettre la main dessus.

Des tirs russes les contraignent à interrompre les recherches et à rebrousser chemin au plus vite. Sitôt de retour à leur base, Max Levin insiste pour retourner sur place. Impossible de se résoudre à abandonner le drone. Et surtout, sa précieuse carte mémoire, qui contient des images capitales attestant de crimes de guerre commis par les Russes dans la zone.

Max Levin quelques jours avant sa mort, le 23 février 2022.
Max Levin quelques jours avant sa mort, le 23 février 2022.image: facebook

Le 13 mars, Levin avertit au téléphone sa petite amie, Inna, qu'il ne sera pas accessible pendant un moment. Au début de la guerre, le couple a conclu un accord: ils doivent s'écrire toutes les deux ou trois heures pour s'assurer que tout va bien. Ceci fait, le photographe retourne sur les lieux, à la recherche de son drone.

A 11h23, Levin envoie un ultime message à Inna.

Au 12h30, Inna répond avec une photo. Le message reste sans réponse. Il n'a pas été lu, ni reçu.

A 12h51, la voiture de Max émet un dernier signalement GSP, à 30 kilomètres en direction de l'ouest, dans la forêt de Guta Mezhyhirska. Dès lors, il ne donne plus aucun signe de vie.

Le 1er avril, son corps et celui de Chernyshov sont retrouvés sans vie.

Que s'est-il passé?

Le 26 mai, les enquêteurs de Reporters sans frontières se rendent sur les lieux de la disparition de Levin pour mener leurs propres investigations. Après plusieurs jours passés à inspecter la scène de crime, collecter des preuves matérielles, des observations et des témoignages, leur conclusion est la suivante: les deux hommes ont sans aucun doute été exécutés de sang-froid par des soldats russes, peut-être après avoir été torturés.

Sur un ton laconique, le rapport indique: «Les preuves recueillies par RSF indiquent que le photojournaliste ukrainien Max Levin et l'ami qui l'accompagnait ont été exécutés de sang-froid par les forces russes, probablement après avoir été interrogés et torturés, le jour de leur disparition, le 13 mars 2022.»

Depuis le début de l'invasion russe, 110 médias ont été contraints d'arrêter ou de suspendre leurs activités, et 32 journalistes ont été tués, dont huit dans l'exercice de leurs fonctions, selon Reporters sans frontières.

Corps brûlé, jerrican d'essence, douilles

Les éléments de preuve récoltés par RSF attestent que Levin a probablement été tué par un ou deux coups de feu tirés à bout portant, alors que le journaliste se trouvait déjà au sol.

Quant à son ami, Chernyshov, la position de son corps laisse supposer qu'il a été brûlé vif. Un jerrycan d'essence se trouvait encore à l'endroit où le cadavre a été retrouvé.

La voiture des deux amis a été criblée de balles, avant d'être incendiée.

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image: reporters sans frontières

Qui sont les coupables?

En l'absence de témoins oculaires, il est impossible de déterminer, avec certitude, la séquence précise des événements qui ont conduit aux meurtres de Levin et de Chernyshov. Il est presque certain, toutefois, qu'il s'agissait de soldats russes présents dans la région à ce moment-là.

En effet, des preuves matérielles attestant d'une présence russe très proche de la scène du crime, notamment des emballages de nourriture et des couverts en plastique qui pourraient encore contenir des traces d'ADN, ont été retrouvés.

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image: reporters sans frontières

Le rapport indique encore qu'à la mi-mars, c'est la 106e division aéroportée de la Garde russe, commandée par le colonel Vladimir Vyacheslavovich Selivyorstov, qui se trouvait dans la zone. Cette division de parachutistes russes compte plus de 12 000 hommes. Les habitants du village proche de Moshchun ont également témoigné de la présence de soldats «Buryat», soupçonnés d'être responsables de crimes de guerre dans la ville de Butcha.

Le rapport d'enquête conclut qu'il revient désormais au ministère de la défense ukrainien de poursuivre les recherches: «Si l'un de ces soldats russes est arrêté, il est essentiel qu'ils puissent être identifiés rapidement afin d'être interrogés et tenus de rendre des comptes pour les meurtres du journaliste Max Levin et de son ami Oleksiy Chernyshov.»

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