Il est déjà nettement passé minuit quand son entraîneur Goran Ivanisevic prend son téléphone et commande du matériel vidéo. La raison: Novak Djokovic n'est pas satisfait de sa performance en retour contre le Polonais Hubert Hurkacz. Cette obsession du détail est l'un des secrets de sa réussite. Même à 36 ans, le Serbe cherche des moyens de s'améliorer.
En tant que quadruple tenant du titre et grand favori, il est particulièrement surveillé à Wimbledon, ce qui ne lui plaît pas toujours. Il l'a fait savoir lors de la conférence de presse avant sa demi-finale contre Jannik Sinner (ce vendredi dès 14h30):
A Wimbledon, les entraînements ont lieu dans l'Aorangi Park, où les spectateurs n'ont pas accès. Seuls un nombre restreint de journalistes, les autres joueurs et leur entourage peuvent y assister. Et donc aussi les concurrents de Djokovic, qui veulent tout faire pour éviter que ce dernier remporte un huitième titre sur le gazon londonien.
Concrètement, l'actuel numéro 2 mondial se sent observé. «Chaque frappe sera analysée et jugée, car elle pourrait influencer le prochain duel avec Alcaraz ou qui que ce soit», s'inquiète-t-il.
Le récit selon lequel le père de l'Espagnol de 20 ans aurait été vu en train de filmer l'entraînement de Djokovic va dans ce sens. «Antisportif, tricheur, interdit», critiquent les fans du Serbe. Pourtant, il n'est pas interdit de filmer. Et le web regorge de vidéos de séances d'entraînement des meilleurs joueurs. Sans compter que le jeu de Djokovic, sa qualité, sa précision et son inimitabilité ne sont plus un secret pour personne.
Il n'y a pas de preuve de l'incident, mais Carlos Alcaraz a été interrogé à ce sujet après sa victoire en quarts de finale contre Rune. «C'est peut-être vrai que mon père a filmé Djokovic à l'entraînement», assume le prodige espagnol. Mais il balaie l'idée d'espionnage:
Ces vidéos prises avec un smartphone, si elles existent vraiment, lui donneront-elles un avantage si les deux joueurs s'affrontent en finale dimanche? «Je ne pense pas. J'ai beaucoup de vidéos de Djokovic sur toutes les plateformes. Je ne pense pas que ce soit un avantage pour moi», répond Alcaraz.
Novak Djokovic est invaincu à Wimbledon depuis 2016. En 2017, il a dû abandonner en quart de finale en raison d'une blessure. Le recordman de sacres en Grand Chelem (23) est quadruple tenant du titre à Londres (en 2020, le tournoi n'a pas eu lieu à cause de la pandémie de Covid-19).
Si le Serbe de 36 ans soulève à nouveau le trophée dimanche, il fera d'une pierre deux coups: il sera seulement le troisième joueur de l'ère Open (entamée en 1978) à remporter cinq fois de suite le tournoi de tennis le plus prestigieux du monde, après Björn Borg (1976 à 1980) et Roger Federer (2003 à 2007). Avec un huitième titre, Djokovic égalerait Roger Federer, le recordman des victoires chez les hommes. Toute autre issue serait une surprise.
De son côté, Carlos Alcaraz – qui affronte Daniil Medvedev en demi-finale ce vendredi (après le duel Djokovic-Sinner) – participe seulement pour la troisième fois à Wimbledon. Lors de sa première en 2021, il a perdu au deuxième tour contre Daniil Medvedev, alors numéro 2 mondial. L'année dernière, il s'était incliné en huitième de finale face à l'Italien Jannik Sinner, qui avait ensuite laissé filer une avance de 2 sets à 0 contre Djokovic.
Aujourd'hui, Alcaraz se sent beaucoup plus à l'aise sur cette surface particulière. Il y a une semaine, il a remporté son premier tournoi sur gazon au Queen's et a du même coup délogé Djokovic de la place de numéro 1 mondial.
Après son sacre au Queen's, Alcaraz a déclaré que pour améliorer son jeu de jambes sur gazon, il regardait des vidéos de Roger Federer et d'Andy Murray, car ce sont eux qui se déplacent le mieux sur cette surface. Djokovic n'est pas une référence pour lui. Et pour cause: le Serbe glisse sur l'herbe comme s'il jouait sur terre battue, ce qui n'est pas possible pour l'Espagnol. Du coup, il n'essaie même pas de l'imiter.
Novak Djokovic peut être rassuré au moins sur ce point: Alcaraz ne décortiquera pas son déplacement en vidéo.
Adaptation en français: Yoann Graber