Malgré une efficacité sur le long terme légèrement supérieure à celle de son homologue Pfizer, le vaccin Moderna semble tomber en désamour dans plusieurs pays européens, Suisse comprise. Faut-il s'en inquiéter et quels sont les effets secondaires potentiels de ce vaccin? Explications.
La décision a été prise presque simultanément par la Suède, la Norvège, le Danemark et la Finlande. Il y a dix jours, les quatre pays scandinaves ont annoncé limiter temporairement l’usage du vaccin de Moderna, avec quelques variations dans la pratique:
Pourquoi cette décision? Selon Le Monde, les autorités de santé ont mentionné une «mesure de précaution». Une étude (non publiée), basée sur les quatre pays scandinaves, a révélé un risque d’effets secondaires plus marqué pour le vaccin de Moderna.
Le risque de développer une une myocardite ou une péricardite, même s'il reste «très rare», serait en effet légèrement accru lors d'une seconde injection du vaccin Spikevax de Moderna. À noter que ce risque est «bien plus significatif chez certains groupes, surtout chez les jeunes hommes», selon l’épidémiologiste en chef suédois Anders Tegnell.
Malgré sa suspension, les autorités sanitaires de ces pays ont pris soin de souligner «l’efficacité» du vaccin de Moderna. Il conserve ainsi «une place importante dans le programme de vaccination général du Danemark», a précisé l’Institut national de sérologie à Copenhague.
L'annonce de la Scandinavie a été suivie le 8 octobre dernier par celle de l'Islande, qui va même plus loin que ses voisins. Si l'usage de Moderna est seulement limitée en Scandinavie, Reykjavik cessera tout simplement de l'utiliser.
Dans un communiqué par la Direction islandaise de la Santé, les autorités indiquent ainsi que «comme l'approvisionnement en vaccin Pfizer est suffisant sur le territoire (...), le chef épidémiologiste a décidé de ne pas utiliser le vaccin Moderna en Islande».
Une décision qui n'aura pas d'incidence sur la campagne de vaccination sur l'île de l'Atlantique nord, où 88% de la population âgée de plus de 12 ans est déjà entièrement vaccinée, souligne Le Point.
Plus proche de nous, en France, la Haute autorité de santé (HAS) a quant à elle recommandé que seul le vaccin de Pfizer soit injecté pour la dose dite «de rappel», administrée à présent pour les plus de 65 ans, les immunodéprimés et leurs proches, les personnes à risque, ainsi que les soignants.
Le sérum de Moderna n'ayant pas encore reçu d’avis favorable de l’Agence européenne du médicament (EMA) pour cette troisième dose, le gouvernement français a indiqué qu’il allait suivre cet avis.
La HAS se justifie ainsi: au-delà des effets indésirables, il reste des doutes sur la bonne population cible et «surtout le dosage». En effet, le vaccin de Moderna possède trois fois plus de substance active que le Pfizer. L'Agence européenne du médicament doit déterminer, d'ici la fin du mois d'octobre, quelle est la bonne dose à injecter lors d'un rappel: une dose entière ou une demi-dose.
D’ici là, le Spikevax de Moderna devra rester limité aux premières et aux secondes doses en France.
En Suisse, le vaccin Moderna est autorisé à partir de 12 ans. Après l’analyse de toutes les données disponibles pour le moment, Swissmedic, relayée par Le Temps, estime qu’un lien de causalité entre les vaccins et la myocardite/péricardite «est au minimum possible».
Le canton de Vaud s'est toutefois démarqué en prenant une décision jusqu'à présent unique en Suisse, selon les mots du médecin responsable de la campagne vaudoise de vaccination, Blaise Genton, au Courrier.
Dorénavant, Vaud «recommande de privilégier de vacciner les 12-18 ans avec Pfizer plutôt que Moderna». «(...) L’incidence est légèrement supérieure pour Moderna que Pfizer. Par principe de précaution, nous le privilégions pour les moins de 18 ans», explique Blaise Genton.
En Suisse, Swissmedic a recensé, au 21 septembre, 151 cas de suspicion de myocardite et/ou péricardite, dont:
Chez qui? La majorité étaient des hommes (120). L’âge moyen était de 37,8 ans (sur une fourchette de 16 à 88 ans). Parmi les personnes touchées, 135 ont été hospitalisées.
«Ces risques sont connus et suivis de près. Les réactions disparaissent dans la grande majorité des cas spontanément en quelques jours», a indiqué Lukas Jaggi, porte-parole de Swissmedic. «Les complications sont rares, cependant certaines, très graves, peuvent survenir». Aucun chiffre ni détail n’est donné sur ces complications rares.
Pour Swissmedic, les données actuelles de pharmacovigilance ne justifient pas de prendre de dispositions concernant le vaccin Moderna. (mbr)