«La menace plane sur la Suisse.» C'est dans un suspens absolument insoutenable que les Jeunes UDC Vaud dégoupillent leur nouvelle vidéo de recrutement. En ligne depuis le début de la semaine, elle est censée taper dans l'œil d'un tout frais vivier de bébés politiciens (déjà) très conservateurs.
Si l'on peut raisonnablement penser que l'immense majorité du parti n'est pas du genre à hanter les salles de classe gauchistes d'une école d'art, cette vidéo parvient tout de même à surprendre par son objective médiocrité technique. Le montage est haché, sans cœur, la voix off a été froidement étouffée dans un coussin, les acteurs n'ont sans doute jamais vu un film de leur vie et le nombre de pixels provoque un saignement des yeux dès que l'internaute se risque à la visionner sur un écran plus ambitieux que celui d'un Nokia 3210. (Au moins ont-ils eu la courtoisie d'attendre la clôture du Festival de Cannes pour dévoiler l'œuvre.)
Le pitch, lui, est simple(t). Sous la forme d'une parodie de Mission Impossible, le narrateur nous emmène aux confins des clichés qu'on peut cueillir aux racines de l'UDC. L'ennemi à abattre? Une «organisation secrète»: la «Grande Coalition». Dans l'ordre:
Vous aurez évidemment reconnu le PLR, le PS, Les Verts et... les médias. Leur crime?
Et vous aurez évidemment deviné que le français admirablement aléatoire de cette réplique est d'origine. La première prouesse de cette vidéo étant d'ailleurs le niveau constant de la syntaxe durant ces deux (interminables) minutes. Dans la narration, mais également dans les sous-titres.
Pour ce qui est du fond, pas de surprise. Noyés dans un océan d'effets (pas très) spéciaux, les thèmes fétiches de l'UDC respirent du bout de la narine. Europhobie, allergie à l'immigration, intolérance aux mesures Covid, paranoïa écologique, mais aussi addiction aigüe aux valeurs familiales traditionnelles.
Heureusement, la jeune garde conservatrice offre des solutions à faire pâlir les espions britanniques (oui, c'est possible): référendums, initiatives, débats «infrarouges» et articles de journaux (dans des médias pourtant considérés comme des ennemis, mais passons).
La cohérence du message final est à la hauteur de ce qui précède. Après avoir sondé la motivation de ceux qui auraient survécu jusque là, le clou de spectacle:
«Election Impossible: bientôt dans vos urnes.»
Un slogan maladroitement prémonitoire?