L’initiative «Pour une Suisse libre de pesticides de synthèse» a été déposée en mai 2018 avec 120 000 signatures validées, soit 20 000 de plus que les 100 000 nécessaires. Elle a été lancée par «un groupe de citoyennes et citoyens engagés, en particulier des viticulteurs, des médecins et des scientifiques», peut-on lire sur le site des initiants.
Dans le comité politique, on retrouve plusieurs politiciens de gauche, tels que Mattea Meyer et Cédric Wermuth, les co-présidents du Parti Socialiste suisse (PS) ou le président des Verts, Balthasar Glättli. Le comité agriculture comprends aussi quelques personnalités comme Fernand Cuche, agriculteur et ancien conseiller national écologiste.
Le texte demande l’interdiction des pesticides de synthèse, en particulier dans l’agriculture, la production et la transformation des denrées alimentaires, l’entretien des espaces verts publics et des jardins privés, et la protection d’infrastructures telles que les voies de chemin de fer.
L’importation de denrées alimentaires produites à l’étranger à l’aide de pesticides de synthèse ou contenant de tels pesticides serait aussi interdite.
L’interdiction devrait être totalement mise en œuvre dans un délai de dix ans. Durant ce délai, le Conseil fédéral pourrait autoriser des exceptions si l’agriculture, la population ou la nature étaient gravement menacées, par exemple en cas de pénurie extraordinaire.
«Cette période de transition doit permettre à l’agriculture de faire une transition en douceur. Elle donne aussi aux acteurs individuels suffisamment de temps pour prendre les mesures nécessaires pour se passer des pesticides de synthèse», écrivent les initiants.
En substance, selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS), le terme «pesticide» désigne toute substance ou association de substances destinée à repousser, détruire ou combattre les ravageurs et les espèces indésirables de plantes ou d'animaux nuisibles aux denrées alimentaires ou autres produits agricoles.
Les pesticides de synthèse désignent ceux qui contiennent des compositions chimiques qui n’existent pas à l’état naturel, selon les initiants. On pense notamment au glyphosate ou aux néonicotinoïdes, un insecticide jugé dangereux pour les abeilles.
Ne seraient pas concernés «les agents biologiques, les pesticides biologiques, les insectes bénéfiques, les pesticides organiques, mécaniques, électriques ou thermiques ainsi que toutes les alternatives qui ne contiennent pas de toxiques chimiques». Largement utilisé dans l’agriculture bio, le sulfate de cuivre serait toujours autorisé. L'utilisation d'engrais resterait admissible.
Reste que, le texte de l’initiative ne précise pas ce qu’il faut entendre par pesticides de synthèse, relève la Confédération. Les pesticides non synthétiques qui ne sont pas concernés par l’interdiction dépendront de la définition que le Parlement devra fixer dans la loi si l’initiative est acceptée.
1. Se passer de ces «poisons». Un million de Suisses boivent de l’eau contaminée par des pesticides de synthèse. Et ce, tous les jours. Même à de très faibles concentrations, ces pesticides ont des effets négatifs sur la santé. «Des centaines d’études» tissent le lien entre ces produits et la maladie de Parkinson, de baisse du quotient intellectuel et de la fertilité, entre autres. Sans parler des risques pour le développement des enfants.
2. Des solutions existent. Près de 50% des agriculteurs n’utilisent pas (agriculture biologique) ou presque pas (agriculture avec label IP-Suisse) de pesticides de synthèse aujourd’hui déjà. Grâce aux solutions innovantes qu’apporte la recherche actuelle, s’affranchir des pesticides de synthèse est possible. De plus, la période transitoire de 10 ans et les aides permettront aux agriculteurs d’adapter leurs pratiques.
3. L’agriculture suisse soutenue. Comme l’initiative interdira l’importation d’aliments contenant des pesticides de synthèse, les règles seront plus équitables pour les agriculteurs suisses. De plus, sortir de la dépendance à ces produits donnera un élan à la recherche pour aboutir à des innovations durables pour l’agriculture.
1. Hausse des prix. En augmentant le niveau d’exigences pour la production suisse et pour l’importation, le prix des denrées alimentaires augmentera. La principale population du pays qui en souffrira sera celle à faible revenu. De plus, ces mêmes exigences généreront un désavantage pour les producteurs suisses axés sur l’exportation.
2. Sécurité d’approvisionnement réduite. Avec une interdiction de produits servant à protéger efficacement les plantes et les produits agricoles, la quantité de denrées alimentaires indigène sera limitée. Il faudra alors augmenter l’importation. Or, l’initiative vise aussi à interdire les denrées importées produites à l’aide de pesticide de synthèse.
3. Démarches déjà entreprises. De nouvelles dispositions viennent compléter les mesures actuelles visant à réduire les risques liés à l’utilisation de pesticides de synthèse. Alternatives à l’initiative, elles durcissent l’autorisation d’utiliser des pesticide de synthèse mais de manière progressive et mesurée.
Pour le texte: PS, Les Verts, Bio Suisse, Greenpeace, Grève du climat, Pro Natura, Demeter, Société romande d'apiculture.
Contre le texte: Conseil fédéral, Conseil national, Conseil des Etats, UDC, PLR, Le Centre, Union suisse des paysans, Union des villes suisses.