L’initiative nommée «Oui à l’interdiction de se dissimuler le visage» exige d’inscrire dans la Constitution l’interdiction de cacher son visage sur l’ensemble de l’espace public et dans tous les lieux accessibles au public (rue, stades, restaurants, commerces, bâtiments publics, etc.).
Le texte interdit non seulement certaines tenues religieuses, mais aussi la dissimulation du visage (avec une cagoule, par exemple) lors de grands événements ou des manifestations. De telles interdictions existent déjà dans de nombreux cantons.
L'initiative prévoit des exceptions: se dissimuler le visage reste autorisé dans les lieux sacrés (églises, mosquées, synagogues, etc.), ainsi que pour des raisons sanitaires (avec un masque) ou climatiques. De plus, le texte autorise de se cacher le visage si c’est en lien avec des coutumes locales (carnavals), ou pour des raisons sécuritaires (casque).
L'initiative a été lancée par le comité d'Egerkingen. Proche de l’UDC et qualifié d’islamophobe, il a été fondé en 2006. Sur son site internet, il explique qu’il organise «la résistance contre les revendications de pouvoir de l'islam politique en Suisse».
Son fait d’armes, et pas des moindres: l’initiative sur les minarets, acceptée par le peuple (57%) et les cantons en 2009 après une campagne houleuse, faite d’affiches «choc». A l’époque, dans le comité d'initiative, on retrouvait notamment les UDC Oskar Freysinger (VS) et Ulrich Schlüer (ZH), un des pères du comité d’Egerkingen.
Bien que le texte ne l’évoque pas, les motivations islamophobes de l’initiative sont clairement affichées. Preuve en est le slogan «Stop à l’extrémisme», placé à côté d’une femme portant un niqab.
Si le peuple vote uniquement sur l’initiative, le Conseil fédéral et le Parlement ont élaboré un contre-projet indirect. Il entrera en vigueur si l’initiative est rejetée ou retirée. En substance, le contre-projet propose de créer une loi fédérale qui oblige de montrer son visage aux représentants d’une autorité si ceux-ci en ont besoin pour vérifier une identité. Une amende est prévue en cas de non-respect de cette injonction.
Le Parlement a par ailleurs complété le contre-projet par des amendements qui exigent l'égalité entre femmes et hommes et une amélioration de la situation des femmes.
Dans la proposition du Conseil fédéral et du Parlement, il n'y a pas d'interdiction explicite de dissimuler son visage dans l’espace public. Pour le Conseil fédéral, le droit actuel punit déjà celui qui contraint une femme à se couvrir le visage.
Non, pas vraiment. Quand nous parlons de burqa, il s’agit d’être précis. Souvent, on pense à ça:
Or, ce n’est pas une burqa, mais un niqab. Les yeux sont bien visibles alors qu’avec une burqa, ceux-ci sont entièrement voilés et cachés derrière un tissu, un filet ou une grille.
Dans les débats, on entend pourtant souvent parler de l’initiative «anti-burqa». Le texte ne souhaite par ailleurs pas l’interdiction du foulard: les hijabs, tchadors et autres vêtements religieux qui ne couvrent pas le visage ne sont pas visés par l'initiative.
Autre élément qui n’a rien à voir avec la burqa: en exigeant une interdiction générale de se dissimuler le visage, les initiants s’attaquent aussi au port de tout habit (religieux ou non) qui cache le visage. On pense ici à ceux qui se cachent le visage lors de manifestations politiques ou sportives.
Selon l’interprétation, le port d’un masque «Anonymous» serait interdit si l’initiative est acceptée.
Oui. A l’heure actuelle, la Confédération n’a pas la base légale pour introduire à l’échelle nationale une interdiction de se dissimuler le visage. Certains cantons l’ont toutefois créée de leur côté.
De Genève à Thurgovie, il existe une série de lois qui interdisent de se masquer le visage lors de manifestations ou d’événements sportifs.
Seuls les cantons de Saint-Gall et du Tessin ont créé une «véritable» interdiction de se dissimuler le visage. Dans les deux cas, c’est le peuple qui l’avait décidée en votation.