L'été est enfin là et avec lui l'appel du large et de l'étranger. Mais même si beaucoup d'entre nous ont hâte de reprendre l'avion, il est utile de rappeler qu'un kilomètre en avion pollue trente fois plus le climat que la même distance en train. Et nous, Suissesses et Suisses, volons deux fois plus souvent que les habitants de nos pays voisins. C'est pourquoi j'opte pour une petite excursion dans le Val-de-Travers (NE). Pour m'y rendre, il me faut environ deux heures de train depuis Zurich, magnifiques vues sur le lac de Bienne et le lac de Neuchâtel incluses.
J'effectue mon premier arrêt à Couvet, un village de 2700 habitants, qui est aussi le berceau de la fameuse absinthe. Mais je suis ici pour une raison différente: au magasin de vélo Le Vélotier, je récupère l'E-VTT que j'ai réservé (un Giant Trance X E+ 3 Pro, pour les mordus d'entre vous) pour deux demi-journées. Pour 80 francs, c'est moins cher que de louer un vélo, je soutiens une petite entreprise et j'obtiens aussi des conseils sur la région. Par exemple, que l'exposition d'art en plein air «Môtiers 2021 - Art en plein air» se trouve dans le village voisin de Môtiers.
Avant de continuer jusqu'à Travers, où m'attend mon hébergement, «l'Ecopod», je commence par savourer un délicieux curry de lentilles à l'Hôtel Restaurant de l'Aigle à Couvet. L'hôtel décrit le développement durable comme sa philosophie. En témoignent l'utilisation de produits régionaux et saisonniers, les panneaux solaires sur son toit, les produits d'entretien respectueux de l'environnement et une station de recharge publique pour les véhicules électriques, notamment.
Je longe l'Areuse à une vitesse de croisière de 25 km/h, sous une pluie battante et, en dix minutes, je touche déjà au but: la ferme bio La Coué à Travers. Le lieu est géré par la famille Beck depuis 1984. Il comprend quarante vaches Angus, des moutons, des chèvres, des chiens, des chats, des lapins, deux chevaux, un âne et un poney. Depuis 23 ans, les propriétaires proposent des vacances de camping et depuis près de trois ans, les clients peuvent également passer la nuit dans l'«Ecopod», qu'ils ont construit eux-mêmes avec le bois de leur propre forêt (150 francs/nuit, petit-déjeuner compris). Grâce aux cellules solaires installées sur le toit, ce confortable tonneau en bois est autonome à 100% et dispose également d'eau potable.
À seulement une heure et demie de la ferme se trouve l'arène rocheuse naturelle du Creux-du-Van. Elle est nichée dans la plus grande réserve naturelle du canton de Neuchâtel, qui est aussi la plus ancienne de Suisse depuis 1870. La route y mène à travers des forêts luxuriantes et de mousse, au côté de vaches en liberté, qui me procurent un sympathique boost d'adrénaline lorsqu'elles se mettent à galoper sauvagement à côté de moi dans un puissant tintement de cloches. Je ne savais pas que les vaches étaient capables de courir si vite. Autant dire que je suis bien contente d'avoir opté pour cet E-VTT.
Au restaurant Le Soliat, je parviens à obtenir l'une des dernières places libres avant l'orage et déguste une fondue aux cèpes et une bière d'alpage, avant de rentrer à la ferme dans la belle ambiance du soir, qui succède à la pluie. Ma fin de journée se passe sur ma terrasse privée, où je déguste une autre bière, que je me procure à la boutique libre-service de la ferme.
L'Ecopod est certes un peu petit, mais ce n'est pas le cas de son lit (160x200 cm). Je dors très bien et suis réveillée par le bruit des coqs et des tracteurs. Mais un déjeuner copieux m'attend déjà avec du pain bio fait maison, du muesli, un plateau de fromages, diverses confitures, du café, du jus de fruit et des fruits frais.
Pour une fois, je suis motivée à sortir du lit. Si je ne me dépêche pas, les chats vont venir me voler ma nourriture. Sans oublier que l'exposition d'art en plein air de Môtiers m'attend.
Môtiers est la principale localité du Val-de-Travers. C'est sa plus ancienne commune et un lieu tout tranquille avec ses quelque 800 habitants. Ce village pittoresque est caractérisé par des bâtiments datant du XVIe au XVIIIe siècle, certains remontant même aux XIe et XIIe siècles.
L'exposition d'art contemporain «Art en plein air» s'y tient depuis 1985. Cette année, pour la huitième édition, 47 artistes ont été invités à orner de leur art le village et le paysage environnant le long du ruisseau du Bied, jusqu'à la cascade de Môtiers. L'exposition est encore visible jusqu'au 20 septembre 2021. Pour 15 francs, je peux obtenir un plan du village devant le Musée des Mascarons, Grande Rue 14 (ma-di, 10h-18h), qui m'indique où se trouvent les œuvres d'art, ainsi qu'un audioguide pour mon smartphone.
Pendant trois heures, je me promène, conquise par les beautés de l'endroit. Je ne peux que partager les propos de Jean-Jacques Rousseau, qui a vécu ici de 1762 à 1765: «Au reste, on sait déjà ce que j’entends par un beau pays. Il me faut des torrents, des rochers, des sapins, des bois noirs, des montagnes, des chemins raboteux à monter et à descendre, des précipices à mes côtés qui me fassent bien peur».
Les œuvres d'art des expositions précédentes apparaissent ici et là, et les frontières entre l'art, le paysage, la nature et l'infrastructure réelle du joli petit village deviennent souvent floues. C'est pourquoi je laisse maintenant parler les images, afin que vous puissiez vous faire une idée des diverses sculptures et installations sur place.