«Hé! Oui, toi!»
« ... »
«Psst!»
«Oh, mais qui me parle?»
«C’est moi. Tu le sais bien.»
«Je ne sais rien.»
«J’ai un indice à te donner: je suis sale.»
«... mes pensées?»
«Non, tu me fais rire. Sale et tout moisi.»
«Ma cave?»
«Non! Je suis ton bac à compost. M’aurais-tu oublié?»
«Hum, oui... juste. J’avais pris la bonne résolution de me mettre au compostage.»
«Exact. Je te signale que cela fait trois semaines maintenant. Et là, ce n’est plus tenable. Ta bonne résolution ne sent vraiment plus très bon. Peux-tu m’aider?»
«Oui, bien sûr. Tout de suite.»
(...)
«Hé! Mais que fais-tu? Ma place n’est pas avec les ordures. Tu crois quoi?»
Entre mon bac à compost et moi, la séparation a été houleuse. La purée gluante et puante qu’il renfermait, accumulée pendant des semaines, m’a tellement dégoûtée que je l’ai lâchement abandonné au fond de ma poubelle, le jour du ramassage des ordures. Voilà pour les faits. Rien de durable dans tout cela.
Actuellement, et depuis quelques années, tout le monde semble n’avoir qu’un mot à la bouche: durabilité. «Sustainable», «climat compatible», «respectueux de l’environnement»: ce ne sont pas les synonymes qui manquent. Chaque salade de supermarché porte la mention «végane», le vélo connaît un essor sans précédent, notamment grâce au coronavirus et il y a belle lurette que les voyages en avion sont décriés.
Plus je pense au développement durable dans ma vie, et plus je constate qu’il joue un rôle dans tous les domaines. Que je le veuille ou non. En soi, être en vie n’est pas durable. Un bilan.
Nocif pour le climat: je vis. J’utilise chaque jour des disques de ouate. J’aime prendre de longues douches. Ma salle de bain est peuplée d’innombrables flacons, pots et tubes en plastique. Je vis seule. Je n’ai pas de compost. Je prends souvent l’avion. Je ne mange presque plus de viande, mais pas mal de poisson. J’achète de nouveaux vêtements, des chaussures, des accessoires pour la maison. Je fume. J’utilise des rasoirs jetables. Mon argent n’est pas placé de façon durable. J’achète des repas à l’emporter emballés dans de grandes quantités de plastique. La liste de mes comportements nuisibles pour le climat est longue, et surtout pas exhaustive.
La liste des points positifs est volontairement plus longue que celle de mes comportements nuisibles pour le climat. Car j’aime bien me voir comme quelqu’un qui veille sur l’environnement. Le fait que j’en sois bien loin ne m’inquiète pas outre mesure. Au contraire. J’ai le sentiment, rassurant, de faire de mon mieux à mon échelle, et d’apprendre sans cesse.
Car vivre de façon durable peut apparaître comme une tâche immense, quasi insurmontable. Je comprends tout à fait que l’on se perde dans la forêt d’offres durables ou que l’on ait l’impression que ce mode de vie est trop compliqué ou qu’il coûte trop cher. Surtout, je peux parfaitement imaginer que l’on se dise:
Ce n’est pas parce que je ne prends plus l’avion que le monde est sauvé. Surtout, si je suis la seule à me priver ainsi. Les modifications réelles doivent se faire au niveau politique et économique et à l’échelle internationale.
Mais en tant que consommatrices et consommateurs, électrices et électeurs, nous pouvons contribuer à améliorer un petit peu la situation et à faire en sorte que la planète reste habitable. Voter ou élire sont des actes politiques, mais nos décisions d’achat aussi. Nous avons plus de pouvoir que nous l’imaginons. Comme le dit si bien un dicton anglais: «Put your money where your mouth is.»
Et pourtant, j’en entends encore se plaindre ou soupirer. Ce qui me donne envie de leur dire:
Souvent, vivre de façon plus durable est même très amusant. Et il ne s’agit pas d’être infaillibles. Le but n’est pas le zéro déchets, ni d’être radicalement végane. Mais vous pouvez, par exemple, économiser de l’argent en utilisant des emballages alimentaires en cire d’abeille, plutôt que du film plastique, croquer à belles dents dans un délicieux hamburger végane, plutôt que dans un filet de bœuf, bien plus lourd à digérer, ou enfourcher votre vélo, au lieu de respirer votre mauvaise haleine sous votre masque dans les transports en commun bondés.
Etre durable ne doit pas être cher, triste et pénible. Personne ne vous force à suivre cette «tendance». Je préfère le voir comme un défi personnel que comme une mode. Au lieu d’enfoncer ma tête dans le sable et de renoncer, je préfère essayer de me concentrer sur les choses que je suis en mesure d’influencer. De cette manière, j’espère aussi motiver mon entourage à vivre de manière plus respectueuse du climat.
A quoi pensez-vous quand vous entendez le mot «durable»? Votre conscience vous irrite-t-elle ou l’avez-vous repoussée au plus profond de votre subconscient, comme ceux qui mangent de la viande occultent leur amour pour les animaux? Quelles astuces avez-vous développées pour ménager le climat? Dans quelles aventures culinaires, cosmétiques et autres voulez-vous vous lancer? Et quelles sont celles que je devrais tester pour vous? A vos commentaires, mes chers!
Je me réjouis de faire honneur à mon titre de «Mme durabilité», ou du moins d’essayer.