Cette victoire marque le retour au pouvoir de la gauche de l'emblématique ex-président José «Pepe» Mujica qui, à 89 ans et en dépit d'une santé déclinante, n'a pas ménagé sa peine pour mettre sa grande popularité au service de son poulain.
Candidat de la coalition de gauche Frente Amplio, Yamandu Orsi s'est, selon les résultats officiels définitifs, imposé par 49,8% des voix contre 45,9% pour son adversaire de centre droit Alvaro Delgado, homme du président sortant Luis Lacalle Pou, au pouvoir depuis 2020.
Alvaro Delgado, ancien vétérinaire issu du parti National de droite, a rapidement concédé sa défaite, disant «saluer» son adversaire au nom de «tous les acteurs de la coalition» gouvernementale qui l'ont soutenu.
Des coups de klaxon et des cris de joie ont résonné dimanche soir dans la capitale Montevideo, bastion du Frente Amplio, et des milliers de personnes sont descendues dans les rues pour célébrer la victoire de Yamandu Orsi. «Je suis heureux! Le peuple a encore gagné», a déclaré après l'annonce de la victoire du président-élu, Walkiria Paris, une retraitée de 63 ans enveloppée dans le drapeau du Frente Amplio.
L'élection de Yamandu Orsi, qui prendra ses fonctions le 1er mars, marque le retour de la gauche au pouvoir après une précédente séquence que quinze ans sous Tabaré Vazquez (2005-2010 et 2015-2020) et José Mujica (2010-2015). Dans ce pays de 3,4 millions d'habitants coincé entre Argentine et Brésil et considéré comme un havre de paix et de stabilité en Amérique du Sud, Orsi, un tenant de la gauche modérée, a assuré que sa victoire augurait d'un «changement» qui ne sera «pas radical».
Pendant la campagne, à la fois Orsi et Delgado ont insisté sur la relance de la croissance et la réduction du déficit budgétaire. Ils se sont engagés à ne pas augmenter la pression fiscale et ont promis de lutter contre la criminalité liée au trafic de drogue en augmentation. Le candidat de gauche souhaite par ailleurs développer des échanges à l'échelle régionale.
«Je tiens à féliciter [...] le président élu Yamandu Orsi, le Frente Amplio et mon ami Pepe Mujica», a réagi sur le réseau social X le président du Brésil voisin, Luiz Inacio Lula da Silva. «C'est une victoire pour toute l'Amérique latine et les Caraïbes», a-t-il relevé. D'autres dirigeants latino-américains ont salué la victoire, comme le président argentin ultra-libéral Javier Milei qui a repartagé sur X un message du ministère argentin des affaires étrangères félicitant le président-élu.
Si l'Uruguay affiche un niveau de vie élevé et de moindres niveaux de pauvreté et d'inégalités que dans le reste de l'Amérique du Sud, l'emploi et la sécurité ont été placés au centre des préoccupations de ce pays aux 12 millions de têtes de bétail.
Malgré ses 89 ans, son combat contre le cancer et des difficultés à se déplacer, José Mujica, un ex-guérillero qui avait été torturé sous la dictature militaire, a multiplié les apparitions et réunions électorales pour attirer le vote des jeunes et indécis qui semblaient détenir la clé du scrutin.
Le président sortant Luis Lacalle Pou n'a pu se représenter malgré une cote de popularité de 50%, car la constitution interdit de briguer un second mandat consécutif. Il a promis une transition «ordonnée».
Le 27 octobre, des élections parlementaires concomitantes au premier tour avaient vu le Frente Amplio remporter 16 des 30 sièges du Sénat et 48 des 99 sièges de la chambre des députés. Un résultat qui offrait à la gauche les conditions pour «mener à bien les transformations dont le pays a besoin», selon Yamandu Orsi durant sa campagne. (mbr/ats)