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«Ministère de la remigration»: Zemmour a joué sa dernière carte

Eric Zemmour.
Eric Zemmour.image: shutterstock
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Avec son «ministère de la remigration», Zemmour a joué sa dernière carte

Eric Zemmour, le candidat du parti d'extrême droite Reconquête à la présidentielle française, est comme pris d'une fuite en avant au moment où il chute dans les sondages.
23.03.2022, 17:0524.03.2022, 08:31
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Il avait gardé une carte pour la fin, un peu comme on se réserve le dernier carré de chocolat. Il l’a abattue, respectivement mangé, mardi, à Aulnay-sous-Bois. L’une de ces villes de la banlieue parisienne, démonstration à ses yeux de ce «grand remplacement» qu'il dénonce. Alors qu’il avait mis, sinon en sourdine, du moins entre parenthèses, le terme «remigration», il l’a ressorti tout enrobé de taffetas: «Ministère de la remigration». Les dimanches à Bamako, c’est jour de mariage, dit la chanson? Eh bien, retour à Bamako.

Eric Zemmour termine sa campagne comme il l’avait commencée. Au-dessous de 10% dans les sondages. Il n’était jamais descendu sous ce seuil depuis qu’il l’avait franchi le 21 septembre de l’année dernière, allant alors de conquête en reconquête, lui arrivant de pointer à la deuxième place dans les intentions de vote, avant même de s’être déclaré candidat. C’était en octobre. Depuis, il oscillait autour des 15% avec d’autres viennent ensuite (derrière Macron), Valérie Pécresse et Marine Le Pen.

Mais à moins de trois semaines du premier tour de la présidentielle, le schéma de 2017 semble revenir en force, qui range l'indétrônable Macron, Le Pen et Mélenchon dans les places de devant.

D’où, pour Zemmour, cette dernière carte, ce dernier carré de chocolat censé le revigorer. Avec cette ultime proposition de campagne – un ministère de la remigration –, «il tente le tout pour le tout», lit-on un peu partout. Et l’on sait ce qu’il entend par-là: le renvoi des étrangers indésirables en France, parce que «clandestins», «délinquants», «criminels» ou encore «fichés S étrangers», autrement dit représentant un danger pour la sécurité de la France. Il a compté: cela pourrait faire 100 000 expulsions par an.

A vrai dire, Eric Zemmour n’est pas le seul à prôner le renvoi d’étrangers condamnés ou en situation irrégulière. Marine Le Pen et Valérie Pécresse ont des idées semblables, qui séduisent un électorat français inquiet d'une évolution démographique changeant ses repères. Ce qui fait la patte du candidat de Reconquête, c’est le vocabulaire, tranchant, la posture, inflexible, le style, autoritaire.

Ses lunettes de commissaire à la remigration, comme empruntées à Trotsky, l’ancien commissaire du peuple aux affaires étrangères du temps de l’URSS, accentuent la sévérité de ses propos. Il n’y a pas beaucoup de chaleur qui se dégage de cet homme-là.

Proposer un ministère de la remigration en fin de campagne, c’est avouer, au fond, qu’on n’a pas su élargir l’horizon de ses thèmes. Zemmour s’est «planté» sur la guerre en Ukraine? Il pâtit de ses déclarations enamourées à Poutine? C’est plus que probable. Les Français ne souhaitent peut-être pas être dirigés par un si mauvais pronostiqueur, par l’ami de celui qui se révèle être un ennemi.

Mais l’essentiel de sa chute dans les sondages, il le doit sans doute à son cœur sec. Quelle ironie de l’entendre prôner la création d’un ministère de la remigration, le jour où, à Genève, l’un de ses premiers soutiens, le conservateur Jean-Frédéric Poisson, président du Parti chrétien-démocrate, discourant dans un hangar devant environ 150 partisans franco-suisses du leader du parti Reconquête, après avoir salué l'engagement de ce dernier contre l’«islam conquérant», l’invite à se montrer généreux envers les plus faibles: les handicapés, les mères isolées, les toxicomanes.

Poisson d'avril?

Poisson d’avril? On pourrait le croire, tant ce sont là des catégories de personnes parfaitement étrangères à la vision politique d’Eric Zemmour. Non qu’il leur veuille du mal, faisons-lui crédit de cette humanité. Mais parce que les faibles ne font pas partie de ses rêves.

Eric Zemmour - Référence à la Suisse
Video: watson
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