Le «président viriliste»? Le Poutine ou le Trump français? «Rocky Macron»? Le chef de guerre prêt à en découdre? On a tout entendu depuis que le locataire de l'Elysée a autorisé une série de photographies, le dévoilant en noir et blanc, en muscles et en sueur dans sa salle de sport.
Pour le journal Libération, ce serait la preuve d'un grave «néopopulisme». Sur la plateformeX, l'Insoumis Alexis Corbière en a même profité pour ressortir un vieux cliché de Jean-Marie Le Pen tapant lui aussi dans un sac, l'accusant d'emprunter les codes (et les sports) de l'extrême droite. Et quand ce n'est pas Le Pen, ça va piocher du jeune Vladimir Poutine les deux mains dans des gants.
A l'inverse, certains versent dans la lutte des classes, en lui reprochant de faire sa comm' sur un sport qui appartiendrait à une France moins favorisée. Les autres hurlent à l'escalade, faisant d'une série de photographies la plus franche déclaration de guerre au Kremlin.
Et puis, aussi étrange que cela puisse paraître, c'est sur le plateau de Pascal Praud que la critique la moins alarmiste, la moins hystérique et la plus rigoureuse sera démoulée.
Rappelons que les deux clichés d'Emmanuel Macron en pleine séance de boxe ont été publiés mercredi sur le compte Instagram de sa photographe attitrée. La mâchoire est serrée, l'œil déterminé, le biceps saillant. Depuis son élection en 2017, Emmanuel Macron dorlote son culte de la personnalité en ne voyageant jamais sans Soazig de la Moissonnière et ses objectifs. Le président, élu à l'âge de 39 ans, a toujours joué sur sa jeunesse et le dynamisme qui va avec. La boxe, il l'a déjà mise en scène deux fois, notamment en «affrontant» un jeune de Saint-Denis sous l'œil gourmand des photographes.
Un rapide coup d'œil au compte de sa photographe permet d'ailleurs de comprendre que Macron le boxeur n'exprime pas grand-chose d'autre que Macron le jeune chef d'Etat qui mange quatre par quatre les marches des escaliers de son jet présidentiel.
Des escaliers qu'on reproche précisément à Joe Biden de ne pas pouvoir emprunter sans s'y casser la gueule. Le locataire de la Maison-Blanche, que plus de la moitié des Américains considère comme «trop vieux» pour rempiler, passe son temps à prouver qu'il est suffisamment vigousse pour défier la violence du monde moderne. Pour Emmanuel Macron, à chaque période son atmosphère. Lorsqu'il fut raillé pour avoir enfilé un hoodie de l'armée de l'air, on lui reprochait alors de singer l'attitude de Volodymyr Zelensky.
Mercredi soir, la journaliste Ruth Elkrief rappelait très justement que «ce n'est jamais une coïncidence, ce n'est jamais un hasard qu'on publie la photo d'un président».
Macron en mars 2024, c'est un chef d'Etat poussé dans les cordes à l'intérieur de son propre pays et chef de file d'une Europe qui n'abandonnera en aucun cas Kiev. Quitte à envoyer des Français sur le sol ukrainien. C'est un Macron qui se livre à une baston de regards avec un Poutine de plus en plus menaçant envers l'Occident, et l'Otan en particulier. Les Français préféreraient-ils découvrir un président de la République en plein match de tchoukball? Pas sûr.
Dans le dictionnaire, montrer les muscles, c'est «faire une démonstration de force pour intimider». On aurait tort de lui reprocher de «jouer au combattant», alors qu'il se montre simplement combattif.